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Un opéra pour faire « coin coin ! »

Liège
Opéra royal de Wallonie
03/05/2023 -  et 6, 7, 8, 9, 10, 11 (Liège), 17, 18 (Charleroi) mars 2023
Jacques Offenbach : L’Ile de Tulipatan
Virginie Léonard (Alexis), Xavier Flabat (Hermosa), Alexander Marev (Cacatois XXII), Jérôme Billy (Romboïdal), Marie-Catherine Baclin (Théodorine)
Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie, Giulio Cilona (direction musicale)
Olivier Lepelletier-Leeds (mise en scène), Emmanuel Charles (décors), David Belugou (costumes), Sylvain Geerts (lumières)


(© Valentin Bianchi/ORW Liège)


Quel contraste par rapport à dimanche dernier ! Alors que la série de représentations d’Hamlet touche à sa fin, l’Opéra royal de Wallonie programme un spectacle destiné au jeune public. Le choix s’est porté sur un ouvrage créé la même année que celui de Thomas, L’Ile de Tulipatan (1868) d’Offenbach. L’idée principale de ce projet destiné à familiariser les enfants au monde de l’opéra consiste à inviter le public, en l’occurrence, ce dimanche, quasi‑exclusivement des familles, à participer à la représentation, en frappant des mains sur les cuisses pour marquer le rythme, en faisant « coin, coin » ou « poum, poum », et même en poussant la chansonnette, en suivant les paroles reprises dans le programme, le tout sous la conduite du bienveillant chef d’orchestre qui se retourne vers les spectateurs pour les diriger le moment venu.


L’argument de cet opéra‑bouffe en un acte est fort simple. Sur une île isolée, le roi Cacatois, un être plutôt obstiné, a un fils, le timide Alexis, qui est en réalité une fille, tandis que le premier ministre, le rigide Romboïdal, et sa femme, l’horripilante Théodorine, ont une fille, la franche Hermosa, éprise de liberté, en fait un garçon. Le secret sur le sexe manigancé par les épouses des deux dirigeants a pour simple but d’assurer au roi une descendance et d’éviter que l’enfant du premier ministre parte à la guerre. A la fin, comme Alexis et Hermosa, qui découvrent leur véritable identité, s’éprennent l’un de l’autre, tout cela fini par un mariage. Le metteur en scène, Olivier Lepelletier-Leeds, a imaginé, moyennant quelques adaptions, un spectacle loufoque et coloré, bien rythmé, correctement calibré pour un public jeune, sans toutefois supprimer dans les dialogues ce qui peut paraître un peu désuet pour les enfants d’aujourd’hui, comme le vouvoiement entre époux. David Belugou a imaginé des costumes tout à fait fantaisistes, et il faut reconnaître que les deux chouettes aux couleurs pastel, interprétées par des jeunes enfants, sont absolument adorables. Les décors d’Emmanuel Charles présentent, quant à eux, une fort plaisante touche végétale.


Des rires, dans la salle, il y en a, évidemment, mais pas autant qu’escompté. L’humour demeure de bon goût, pas toujours très subtil, certes, mais réglé pour plaire à ce public particulier. Mais ce spectacle somme toute sympathique et consciencieusement réalisé est surtout destiné aux enfants. Les parents pourraient, en effet, regretter un manque de second degré, de sophistication, au contraire de ces dessins animés qui offrent plusieurs niveaux de lecture pour plaire aux jeunes et aux moins jeunes. Mais les adultes saisiront à coup sûr les allusions aux questions de genre dont il est beaucoup question à notre époque. Même si le public de ce dimanche et celui de la semaine passée nourrissent des attentes difficilement conciliables, le plus important ne demeure‑t‑il pas que les plus jeunes se familiarisent avec l’opéra, le genre comme le lieu, quitte à ne pas encore en maîtriser les codes ? Sur cent enfants présents à cette représentation, si ne serait‑ce que dix continuent plus tard à se rendre de leur plein gré à l’opéra, ce serait déjà une victoire.


Sous la direction de Giulio Cilona, qui a remporté l’année passée le deuxième prix du concours international de chefs d’orchestre d’opéra, organisé par l’Opéra royal de Wallonie, l’orchestre, suffisamment vif, précis et léger, s’acquitte de sa tâche avec probité. Les chanteurs, quant à eux, soignent la diction et adoptent le style de jeu qui convient. Nous apprécions beaucoup l’incarnation amusante de Xavier Flabat en Hermosa, tandis qu’Alexander Marev consolide son métier et confirme son talent dans le rôle du roi. Si Jérôme Billy rend remarquablement vie au premier ministre, Marie‑Catherine Baclin ne craint pas, elle, de forcer le trait en Théodorine, tandis que Virginie Léonard affiche ce qu’il faut de grâce et de finesse. Comme les parents et les enfants participent de bon cœur à la représentation, il convient de juger aussi de leur prestation : si la cohésion laisse parfois à désirer, les timbres affichent une réjouissante fraîcheur et tout le monde marque le rythme avec suffisamment de vigueur.



Sébastien Foucart

 

 

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