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Un chef mahlérien Paris Philharmonie 02/27/2023 - et 24, 25, 26 (München), 28 (Amsterdam) février 2023 Gustav Mahler : Symphonie n° 6 Müncher Philharmoniker, Lorenzo Viotti (direction)
L. Viotti (© Charles d’Hérouville)
On ne se plaindra pas que Lorenzo Viotti ait remplacé Valery Gergiev pour la tournée de l’Orchestre philharmonique de Munich. Voilà longtemps que nous le suivons et que nous voyons son talent s’épanouir. Et il eût fait un excellent candidat pour l’Opéra de Paris.
Comme à son habitude, il présente le concert en quelques mots, faisant de la Sixième Symphonie de Mahler une sorte de Faust-Symphonie, dont le premier mouvement illustrerait les combats intérieurs du héros de Goethe. En se gardant bien de toute précipitation, en tenant se montrant très attentif au rythme, le jeune chef suisse construit rigoureusement cet Allegro energico, ma non troppo. Tout s’y enchaîne naturellement, la musique avance telle une force qui va et sait où elle va, jusqu’à une presque sauvage coda. La direction reste aussi très claire, avec un grand souci des contrechants, dans un grand respect des indications de Mahler et un refus de toute surenchère pour le très effusif « thème d’Alma », où d’autres s’épanchent un peu trop.
Ce respect fait le prix du Scherzo, qu’il enchaîne heureusement au premier mouvement – le placer en troisième position déstructure la Symphonie. Il n’en outre pas la « pesanteur », l’altväterisch et le Trio prennent la pose avec de l’humour dans l’alanguissement. L’Andante moderato est une oasis de nuances, notamment pour le Misterioso, aux pianissimi subtils, et de lyrisme contenu ; le climax crée une tension extrême mais toujours dominée. Le final, encore plus difficile à bâtir que le premier mouvement, confirme le caractère unitaire, narratif aussi, de la vision, servie par un magnifique orchestre qui, s’il n’a pas les rondeurs de celui de la Radio bavaroise, se signale à la fois par l’excellence de ses pupitres – quels beaux solos ! –, la beauté de ses couleurs et la cohésion de son ensemble. Le Sostenuto des premières mesures, où la musique expose les différents éléments de la structure, est déjà remarquable.
On connaissait les affinités mahlériennes de Lorenzo Viotti, par le concert de février 2020 où il remplaçait Yannick Nézet‑Seguin à la tête des Berliner Philharmoniker dans la Troisième Symphonie de Mahler (concert à revoir sur le site de l’orchestre) : cette superbe Sixième les confirme brillamment.
Didier van Moere
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