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Au Casino

Normandie
Deauville (Théâtre du Casino Barrière)
08/09/2022 -  
Mauricio Kagel : Trio avec piano (Trio in drei Sätzen)
Ludwig van Beethoven : Trio avec piano n° 7 en si bémol majeur « A l’Archiduc , opus 97

Trio Messiaen : Philippe Hattat (piano), David Petrlik (violon), Volodia van Keulen (violoncelle)


P. Hattat, D. Petrlik, V.  van Keulen (© Picart)


Le septième et avant-dernier concert de l’Août musical de cette année ne se déroulait pas à l’endroit habituel, la salle Elie de Brignac-Arqana, celle‑ci étant réquisitionnée pour des ventes de chevaux, son objet à vrai dire normal. Le festival se repliait en effet au théâtre du Casino, perdu au milieu des machines à sous, ringard, inconfortable et dans un état si déplorable (moquette fripée tenant avec du scotch, sièges plus ou moins défoncés, mal fixés au sol et aux tissus sales, usés ou arrachés au niveau des accoudoirs...) qu’on pouvait se demander s’il fallait lancer une quête en faveur du groupe Barrière pour en permettre la rénovation.


Le concert y était, comme la plupart de la série du festival, articulé autour de deux compositeurs, cette fois Mauricio Kagel (1931‑2008) et Ludwig van Beethoven (1770‑1827). Le lien entre le trublion de la musique contemporaine d’une part et Beethoven d’autre part pourra paraître ténu mais il faut se souvenir que le premier écrivait des pièces dont les titres faisaient souvent référence aux maîtres du passé et avait réalisé un film, Ludwig van, en 1969, comportant des arrangements de pièces du maître de Bonn tout en contestant le produit industriel qu’il était devenu. Si Kagel n’était pas avare de déboulonnages de grandes figures de la musique classique, son ironie mordante était quand même mêlée à de l’admiration, ne serait‑ce que par la reprise de l’instrumentation et des formes classiques, par exemple du trio et de la forme sonate.


L’œuvre de Kagel, le Premier Trio (1985), retenue pour le concert de ce soir et extraite de son important corpus de musique de chambre avait déjà été interprétée à Deauville lors du festival de Pâques de 2005 mais par le Trio Les Esprits, du nom d’un célèbre trio de... Beethoven. Cette année, c’est le Trio Messiaen, créé en 2014, qui s’y collait. Kagel s’étant inspiré des Evangiles du diable selon la croyance populaire, légendes des campagnes françaises publiées en 1964, l’œuvre démarre dans une atmosphère sombre et inquiétante. Le deuxième mouvement est empreint d’une trouble poésie tandis que le dernier est émaillé de surprises avec cette valse aussi parodique qu’entraînante. Les interprètes font face vaillamment à ce trio complexe et difficile, le pianiste devant par exemple poser la main sur les cordes du piano en frappant les touches en même temps ou pincer directement les cordes. Mais la réalisation est moins convaincante qu’espéré. Les interprètes ne semblent guère y croire et le violon est d’une netteté toute relative ; ça grince quand même pas mal, trop.


On attend donc beaucoup de la seconde partie du concert consacrée au monumental et dernier Trio (1811) de Beethoven, dédié à l’archiduc Rodolphe, qu’on avait aussi entendu à Deauville, il y a peu lors du festival de Pâques de 2019 par des interprètes rassemblés autour du regretté Nicholas Angelich. Le Trio Messiaen aborde l’œuvre avec prudence, au point que cela n’avance guère. On aurait voulu un Andante plus chantant et l’Allegro final pâtit d’accents exagérément durs même si les ultimes mesures sont bien enlevées. Les pianiste et violoniste, les yeux rivés sur leur partition fournissent une lecture assez prosaïque du trio, seul le violoncelliste cherchant quelque expression. C’est donc une certaine déception qui nous étreint. L’ensemble n’était, il est vrai, guère favorisé par l’acoustique de la salle, très sèche avec ses rideaux de scène et ses sièges en velours, sa moquette et sa toile de Jouy aux murs étouffant rapidement les sons et ne pardonnant rien.


Le bis offert par le Trio Messiaen le montra heureusement sous un meilleur jour ; il y parut bien plus à son aise. C’est un deuxième mouvement du Deuxième Trio (1882) de Johannes Brahms (1833‑1897) chantant et habité qui conclut en effet de belle manière la soirée.



Stéphane Guy

 

 

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