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Passion aboutie

Paris
Philharmonie
01/04/2022 -  1er (Gent), 2 (Antwerpen), 3 (Luxembourg), 6 (Köln), 7 (Wien), 8 (Budapest), 10 (Hamme), 12 (Barcelona), 13 (Bruxelles), 14 (Innsbruck), 15 (München), 16 (Zürich) avril 2022
Johann Sebastian Bach : Matthäus-Passion, BWV 244
Reinoud Van Mechelen (Evangéliste), Florian Boesch (Jésus), Dorothee Mields, Grace Davidson (sopranos), Tim Mead (contre‑ténor), Samuel Boden (ténor), James Hall, Guy Cutting (Témoins), Peter Kooij (Pierre, Pontife 1), Tobias Berndt (Judas), Philipp Kaven (Pilate, Pontife II), Chiyuki Okamura, Magdalena Podkoscielna (Servantes)
Collegium vocale Gent, Philippe Herreweghe (direction)


P. Herreweghe (© Michiel Hendryckx)


Après la Passion seulement à moitié réussie de Leonardo García Alarcoń il y a quelques jours à La Seine musicale, place cette fois à Philippe Herreweghe, familier de cette œuvre depuis plus de trente ans. Le résultat est très différent et cette fois complètement convaincant. Le placement est classique, avec les deux chœurs sur scène de chaque côté du chef et de l’orchestre sans spatialisation. On se concentre donc d’autant mieux sur la musique.


Dès le chœur introductif, Philippe Herreweghe réussit ce qui fait la marque de son Bach. Ce mélange de lumière, de tension, de ligne et de spiritualité met l’auditeur dans un état d’écoute active et le fait instantanément entrer au cœur de cette musique. Trois heures plus tard, il y est toujours. Chaque interprète sur scène participe réellement ce soir à ce miracle interprétatif. L’orchestre, bien sûr, mais aussi un chœur de vingt‑quatre chanteurs, avec un mélange d’alti hommes et femmes, et huit chanteuses femmes adultes à la place de l’habituel chœur d’enfants. Les cordes sont suaves et jamais aigres, les bois clairs et précis et le continuo d’une précision totale.


Evangéliste de très haute volée, Reinoud Van Mechelen a toutes les qualités de ce rôle évidemment essentiel : justesse, pureté du timbre, intelligibilité du texte, puissance d’évocation – du très grand art. Il en est de même pour le Jésus de Florian Boesch au timbre somptueux et à l’expression variée, subtile et précise. Les interventions des autres solistes sont faites par des chanteurs qui appartiennent également au chœur dans la pure tradition de l’époque de Bach. On avoue avoir préféré le superbe contre‑ténor James Hall et le très émouvant ténor Samuel Boden au contre‑ténor Tim Head au chant puissant mais un peu extérieur et qui force certains aigus qui perdent alors en précision d’intonation. Chez les basses, Peter Kooij, à la déjà longue carrière, est visiblement à la peine alors que Tobias Berndt est un magnifique et émouvant Judas. Les autres interventions ponctuelles, sans être exceptionnelles, servent l’esprit communautaire au sens religieux du terme de cette lecture. Le chœur se couvre de gloire avec une intonation parfaite, une polyphonie toujours audible et de très belles nuances qui participent à la puissance et à l’incarnation du récit liturgique.


La direction de Philippe Herreweghe, un peu énigmatique pour le spectateur, est d’une grande efficacité. Plus incitative que traditionnelle, elle s’accompagne d’une fluidité de chaque instant qui n’exclut pas quelques moments plus actifs, notamment à la toute fin de l’œuvre lorsque le chef quitte le podium pour se rapprocher de ses musiciens. Insistant sur les nuances, le texte, les ruptures, les nuances, sa vision est en fait théâtrale, presque opératique ce qui n’est pas un non‑sens, bien au contraire.


En somme, une extraordinaire et très émouvante Passion selon saint Matthieu qui emporte tout sur son passage, de plus magnifiée par la superbe acoustique de la Philharmonie de Paris. A bientôt 75 ans Philippe Herreweghe offre ici une interprétation totalement aboutie, d’une incroyable humanité, et parvient même à maintenir le public silencieux durant toute la soirée. Un signe qui ne trompe pas.



Gilles Lesur

 

 

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