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Macbeth sur macadam

Milano
Teatro alla Scala
12/07/2021 -  et 10, 13, 15, 19*, 22, 29 décembre 2021
Giuseppe Verdi : Macbeth
Luca Salsi (Macbeth), Anna Netrebko*/Ekaterina Semenchuk (Lady Macbeth), Ildar Abdrazakov (Banco), Francesco Meli (Macduff), Iván Ayón Rivas (Malcolm), Chiara Isotton (Dama di Lady Macbeth), Andrea Pellegrini (Medico), Leonardo Galeazzi (Domestico), Guillermo Bussolini*/Alberto Rota (Sicario), Costantino Finucci (1° apparizione), Bianca Casertano/Giovanni Crisostomo*/Angelica Antonini (2° apparizione), Rebecca Luoni*/Eva Blu Zenoni/Angelica Antonini (3° apparizione)
Coro del Teatro alla Scala, Alberto Malazzi (préparation), Orchestra del Teatro alla Scala, Riccardo Chailly (direction musicale)
Davide Livermore (mise en scène), Lorenza Cantini (collaboration à la mise en scène), Giò Forma (décors), Gianluca Falaschi (costumes), Antonio Castro (lumières), D-Wok (vidéos), Daniel Ezralow (chorégraphie)


(© Brescia e Amisano/Teatro alla Scala)


Traditionnellement, la saison de la Scala débute le 7 décembre, jour de la Saint-Ambroise, patron de la ville de Milan. Dans la capitale lombarde, mais aussi dans l’Italie entière, cette prima est un événement de tout premier plan, à la fois artistique et mondain, la presse écrite, les radios et les télévisions n’hésitant pas à commencer d’en parler en long et en large bien des semaines avant la date fatidique. Un peu comme pour le Festival de Cannes en France. Cette année, c’est Macbeth qui est à l’honneur, dans la version parisienne de 1865, avec notamment le ballet et un air supplémentaire pour la soprano (« La luce langue »). Généralement, la tension et la pression sont telles que les artistes sont rarement au meilleur de leur forme le soir du 7 décembre. Tous ceux qui ont suivi la première du chef-d’œuvre de Verdi en direct à la télévision italienne ou en léger différé sur Arte ont pu s’en rendre compte. Cinq représentations plus tard, les choses se sont bonifiées.


A commencer par la prestation d’Anna Netrebko en Lady Macbeth, dont le premier air (« Vieni, t’affretta ») avait déclenché quelques sifflets le soir de l’ouverture, au point que certains n’avaient pas hésité à parler du déclin vocal de la célèbre soprano russe. En ce dimanche après-midi, elle affiche une forme éblouissante, avec des vocalises précises, acérées comme une lame de rasoir, des aigus étincelants, des graves corsés et de somptueux pianissimi. Anna Netrebko participe aussi au ballet et durant la scène du somnambulisme, elle se déplace sur une étroite structure métallique à plusieurs mètres au-dessus du sol, chapeau. Scéniquement, sa Lady est noire à souhait, la haine et le mépris se lisant instantanément sur son visage. Luca Salsi est son exact opposé, incarnant un Macbeth particulièrement tourmenté et torturé, tourné vers l’introspection et superbement expressif, le chanteur allant pratiquement jusqu’à déclamer certaines phrases. Ildar Abdrazakov est un Banco noble, aux graves sonores et percutants et au somptueux legato, alors que Francesco Meli en Macduff offre un beau moment de chant avec un « Ah ! La paterna mano » ardent et expressif, au phrasé impeccable. On saluera aussi les interventions des seconds rôles (Iván Ayón Rivas, un nom à retenir, en Malcolm, Chiara Isotton en dame de compagnie et Andrea Pellegrini en médecin), sans oublier la magnifique prestation du chœur dans un « Patria oppressa » qui donne les frissons. Dans la fosse, Riccardo Chailly connaît son Macbeth sur le bout des doigts et en offre une lecture homogène et équilibrée, aux sonorités splendides, mais le choix du chef d’adopter des tempi plutôt lents fait que le spectacle pèche globalement par un manque de noirceur et d’intensité dramatique.


Pour sa quatrième ouverture de saison consécutive à la Scala – un record – Davide Livermore a conçu une production qui sollicite à plein toute la machinerie de l’illustre théâtre : le plateau est rempli d’écrans géants sur lesquels sont projetées des images de gratte-ciel ; un ascenseur qui monte et qui descend occupe le milieu de la scène et un énorme dispositif sur deux niveaux fait apparaître successivement un enchevêtrement de ponts et de labyrinthes ou les différentes pièces art déco du luxueux palais des Macbeth. Le metteur en scène s’est explicitement inspiré du film de science-fiction Inception (2010) de Christopher Nolan, mais le décor n’est pas sans rappeler non plus Metropolis (1927) de Fritz Lang. L’intrigue est ainsi transposée dans une sorte de jungle urbaine, où une guerre des clans fait régner la terreur. Les gratte-ciel parfois renversés et les effets sur les perspectives suggèrent également la manipulation des esprits par le pouvoir, et on pense instantanément au couple Ceaucescu. Il est intéressant de noter que le spectacle a aussi été conçu spécialement pour la télévision : des caméras dans l’ascenseur, sous la scène ou dans les cintres donnent des images à la télévision que les spectateurs dans la salle ne peuvent pas voir. Le 7 décembre 2022, c’est Boris Godounov qui devrait ouvrir la saison de la Scala.



Claudio Poloni

 

 

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