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Not «naughty» enough

München
Isarphilharmonie
10/28/2021 -  10/29/2021
Miloslav Kabelác: Mysterium casu, opus 31
Benjamin Britten: Concerto pour violon, opus 15
Dimitri Chostakovitch: Symphonie n° 1, opus 10

Isabelle Faust (violon)
Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Jakub Hrůsa (direction)


I. Faust, J. Hrůsa (© Astrid Ackermann)


Pour un orchestre, la découverte d’une nouvelles salle est un exercice délicat. Les réflexes collectifs bâtis sur des années de pratiques communes doivent être reconstruits. Les musiciens doivent découvrir comment s’équilibrer et comment une salle sonne lorsqu’elle est pleine ou lorsqu’ils répètent sans public. C’est à Jakub Hrůsa qu’est échue la responsabilité de faire cette expérience pour ce premier concert de l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise dans la salle de l’Isarphilharmonie.


Il y aurait des parallèles à établir entre Mystère du temps de Miloslav Kabelác et les Arising Dances de Thierry Escaich que Valery Gergiev avait données en création pour l’ouverture de la salle. Ces deux pièces ont en commun de présenter une dynamique très large et donc de pouvoir permettre aux musiciens de tester la dynamique de la salle. Mais la comparaison s’arrête là. La création d’Escaich est pleine de variété et d’imagination tandis que la pièce du compositeur tchèque souffre d’une absence de thème. Il y a certes des beaux effets d’orchestration, surtout au début où la moitié des premiers violons jouent sans vibrato et qu’entrent progressivement certains instruments, mais pour prendre une comparaison simple, le Boléro de Ravel a un thème plus séduisant et au moins sait changer de tonalité à la fin.


Le Concerto pour violon de Britten est une œuvre de jeunesse que plusieurs violonistes ont défendue. Il commence par une introduction aux timbales, comme celui de Beethoven. Son orchestration est assez originale: combien de compositeurs ont-ils fait dialoguer piccolo et tuba tandis qu’au milieu de la Passacaille finale, un choral des cors qui accompagne le violon n’est pas sans évoquer le style des interludes du futur Peter Grimes? Isabelle Faust se distingue par sa concentration et une certaine intériorité qui nous rappelle qu’elle a souvent été accompagnée par Bernard Haitink, le plus intègre des chefs, que cet orchestre a bien connu et dont nous pleurons la disparition.


A plusieurs reprises, les musiciens cherchent encore des équilibres. Certains tutti du dernier mouvement sont un peu déséquilibrés en faveur des cuivres et plusieurs traits manquent de continuité. Chef et soliste trouvent cependant le climat juste de ce passage magique vers la fin du premier mouvement où la partie chantante du violon est accompagnée par une série de «vagues» des cordes. Très applaudie, Isabelle Faust donne en bis une œuvre moderne que je dois avouer ne pas connaître, mais qui permet surtout d’apprécier la finesse de l’acoustique de la salle, toutes les nuances de sons filés pianissimo sonnant merveilleusement avec tant de naturel.


Munich se passionne pour Chostakovitch. Igor Levit donnait en début de semaine dernière l’intégralité de ses Préludes et Fugues et c’est une production très forte du Nez qui est la première production de la nouvelle équipe du Bayerische Staatsoper. Chostakovitch a composé ce coup de maître qu’est cette Première Symphonie trois ans avant son premier opéra.


Les musiciens de l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise sont-ils chez eux dans cette pochade d’un compositeur aussi radical? La qualité de la mise en place et la beauté des couleurs orchestrales sont là mais il manque une certaine insolence dans les deux premiers mouvements. Certains mélomanes connaissent peut-être le document datant de 1988 où Leonard Bernstein fait répéter un orchestre de jeunes du Schleswig-Holstein. Le «professeur» Bernstein, à son meilleur, explique à quel point il s’agit d’une œuvre d’un naughty boy et fait tout son possible pour que les jeunes musiciens oublient les habitudes prises par la pratique de Bruckner et Wagner. Ce n’est pas le cas ici, les musiciens restent un peu sages. Mais le troisième mouvement (Lento), grâce à l’introduction au hautbois de Stefan Schilli, trouve une justesse de climat et le Finale a un incontestable panache.


Cette nouvelle salle n’a pas fini de nous impressionner. A nouveau, elle est un peu excentrée mais très accessible. Son accueil est un peu froid mais son acoustique assez fabuleuse. Dans quelques semaines, l’orchestre et son futur directeur musical Sir Simon Rattle s’y produiront ensemble pour deux programmes Bach et Mahler. Il va être fascinant de voir comment salle, musiciens et chefs vont s’y adapter et se transformer.



Antoine Lévy-Leboyer

 

 

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