About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Le grand Nelson Goerner

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
12/08/2019 -  
Robert Schumann : Blumenstück, opus 19
Johannes Brahms : Sonate pour piano n° 3, opus 5
Franz Liszt : Harmonies poétiques et religieuses, S. 173: 7. «Funérailles» – Années de pèlerinage (Troisième Année: Italie), S. 163: . 4. «Les Jeux d’eaux à la villa d’Este» – Rhapsodie espagnole, S. 254

Nelson Goerner (piano)


N. Goerner (© Marco Borggreve)


La faute aux grèves? Nelson Goerner n’a pas rempli les Champs-Elysées ! Il y a pourtant donné un mémorable récital. Le Blumenstück de Schumann n’est pas simple échauffement, il révèle déjà une profondeur du toucher, un éventail de couleurs, un art de l’intériorisation. Vient alors la Troisième Sonate de Brahms, ce monument du romantisme où l’exaltation du sentiment se canalise dans une rigoureuse architecture. Un concert sans orchestre, comme une autre Troisième Sonate, celle du vénéré Schumann... dans la même tonalité de fa mineur, en cinq mouvements déjà. L’Allegro maestoso, grandiose, déploie justement une gamme de sonorités dignes de l’orchestre, avec un timbrage de chaque note jusqu’aux registres extrêmes, d’une parfaite maîtrise de la forme aussi, d’une concentration de l’émotion enfin – les trois n’allant pas toujours de pair. Dans l’Andante espressivo, l’art cache l’art, comme si la simplicité venait du raffinement pour ce lied sans paroles, où les mains produisent de magiques jeux d’échos. Le Scherzo ne se précipite pas, d’autant mieux campé sur son rythme dansant, d’autant plus fantasque, alors que l’Intermezzo, sorte de Nachtstück à la Schumann, ravive les souvenirs à travers des clairs obscurs ponctués par les timbales – un authentique «Rückblick». La dispersion peut guetter le Finale: l’Argentin n’y succombe pas, il le ramène à l’unité sans lâcher la bride à son imagination, avec, pour la coda où la plupart se trouvent à la peine, une maîtrise confondante des doigts et du clavier. Cette Troisième Sonate figure sur son dernier CD, consacré au Hambourgeois (Alpha).


L’imagination du pianiste vaut ensuite des «Funérailles» visionnaires, où l’on croit, ici aussi, entendre un orchestre dès le début, dont les cuivres ont une profondeur, une puissance – sans dureté – et une noirceur d’Apocalypse. Mais lorsqu’il faut ensuite chanter, le pianiste cisèle des cantabile belcantistes. La fin est hallucinée. Quant aux doigts, entend-on souvent de telles octaves? «Les Jeux d’eaux à la villa d’Este» ont des irisations magnifiques, jeux de couleurs autant que de sonorités, authentique musique de l’eau avant Ravel et Debussy. Réinventée, la Rhapsodie espagnole n’est plus seulement démonstration éblouissante, mais vision elle aussi, comme un tableau de Goya, avec, pour la Jota, une anticipation du piano d’Albéniz.


Trois bis: Goerner revient à Brahms à travers un Intermezzo opus 118 n° 2 d’une poésie automnale, fait escale en Argentine avec le Bailecito de Carlos Guastavino, prend congé sur la Courante de la Sixième Partita de Bach, réinventée, osée, presque jazzy. Un des plus grands pianistes d’aujourd’hui. Mais qui en doutait?


Le site de Nelson Goerner



Didier van Moere

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com