About us / Contact

The Classical Music Network

Salzburg

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Asmik Grigorian, Salomé phénoménale

Salzburg
Felsenreitschule
08/25/2019 -  et 28, 31 août 2019
Richard Strauss : Salome, opus 54
John Daszak (Hérode), Anna Maria Chiuri (Hérodias), Asmik Grigorian (Salomé), Gábor Bretz (Jochanaan), Julian Prégardien (Narraboth), Christina Bock (Le page d’Hérodias), Matthäus Schmidlechner (Premier Juif), Mathias Frey (2e Juif), Kristofer Lundin (3e Juif), Joshua Whitener (4e Juif, Un esclave), David Steffens (5e Juif), Tilmann Rönnebeck (Premier Nazaréen), Paweł Trojak (Second Nazaréen), Thomas Bennett (Un Cappadocien), Peter Kellner (Premier Soldat), Dashon Burton (Second Soldat)
Wiener Philharmoniker, Franz Welser-Möst (direction)
Romeo Castellucci (mise en scène, décors, costumes, lumières), Silvia Costa (collaboration artistique), Cindy Van Acker (chorégraphie), Piersandra Di Matteo (dramaturgie)


(© Salzburger Festspiele/Ruth Walz)


On ne change pas une équipe qui gagne. Sensation de l’édition 2018 du Festival de Salzbourg, la Salomé conçue par Romeo Castellucci est reprise cet été pour trois représentations, dans la même distribution. Dans le rôle-titre, la jeune soprano lituanienne Asmik Grigorian est toujours aussi phénoménale. Silhouette fine et juvénile, voix puissante à la projection insolente, rayonnement scénique incontestable, la chanteuse incarne une princesse de Judée incandescente, à la fois adolescente fragile qui a ses premières règles et découvre l’attirance physique, et enfant gâtée qui trépigne d’impatience en attendant sa récompense. Asmik Grigorian tient là un des rôles de sa carrière, un rôle qui l’a déjà propulsée l’année dernière au rang de star. Le reste de la distribution a beau être d’excellent niveau, on ne voit ni n’entend qu’elle. Avec son timbre sonore et corsé, Gábor Bretz confère pourtant solennité et mystère à Jochanaan. John Daszak incarne un Hérode à la voix éclatante et au caractère tranchant, face à l’Hérodias impassible et opulente d’Anna Maria Chiuri. On retient aussi le Narraboth lumineux de Julian Prégardien. Les musiciens de l’Orchestre Philharmonique de Vienne connaissent leur Strauss sur le bout des doigts. Sous la baguette de Franz Welser-Möst, très attentif à l’équilibre entre fosse et plateau, les sonorités sont raffinées et luxuriantes à la fois, la puissance est exceptionnelle, mais tout paraît bien sage en fin de compte, il manque les débordements et la folie qui caractérisent Salomé. Espérons que le chef saura lâcher prise l’année prochaine pour l’Elektra prévue avec Krzysztof Warlikowski.


Romeo Castellucci utilise pleinement le décor naturel de la Felsenreitschule, l’ancien manège creusé à même la roche. Il en a fermé les arcades pour rendre l’endroit plus impressionnant et oppressant, avec des personnages à la bouche entravée qui se ressemblent tous, sauf Salomé et Jochanaan. Sur un plateau doré peuplé de quelques accessoires, il signe une production sobre, pleine de symboles et d’images poétiques. Un cheval noir tournoie dans la citerne où est enfermé Jochanaan, comme une référence au lieu. Salomé est vêtue de blanc alors que le prophète est en noir, comme si le bien et le mal étaient inversés. Le soleil et la lune sont noirs tous les deux. Salomé ne danse pas mais reste en position fœtale sur un socle tout au long de la « Danse des sept voiles ». C’est la tête du cheval qui lui est finalement présentée, et non celle de Jochanaan. Le corps décapité de ce dernier, installé sur une chaise, est couronné par Salomé de son diadème. A la fin de l’ouvrage, Salomé meurt dans un bassin d’où n’émerge que sa tête, comme posée sur un plateau d’argent. Le public a réservé un triomphe à ce spectacle fort, qui restera dans les annales de Salzbourg. L’année prochaine, pour les 100 ans du Festival de Salzbourg, Romeo Castellucci devrait mettre en scène Don Giovanni, avec Teodor Currentzis à la direction musicale. La rencontre des deux enfants terribles des scènes lyriques provoquera sûrement des étincelles.



Claudio Poloni

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com