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Philharmonie im Gasteig
06/27/2019 -  et 28* (München), 29 juin (Ingolstadt) 2019
Béla Bartók : A csodálatos mandarin (Suite), opus 19, sz. 73
Maurice Ravel : Concerto pour piano en sol majeur
Hector Berlioz : Roméo et Juliette, opus 17 (extraits)

Jean-Yves Thibaudet (piano)
Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Daniel Harding (direction)


D. Harding (© Peter Meisel)


Après un incident survenu en public début juin (un accès de faiblesse inopiné, pendant les saluts, à l’issue d’un concert avec les Wiener Philharmoniker), Mariss Jansons s’est vu fermement préconiser par ses médecins d’arrêter toute activité jusqu’à la fin de l’été 2019. Il est vrai que pour un chef de cet âge, au demeurant fermement sous contrat de directeur musical de l’Orchestre de la Radio bavaroise jusqu’en 2024, l’agenda estival paraissait très chargé, avec pas moins d’encore onze concerts à assurer jusqu’au début du mois d’août (Munich, Riga, Londres, Salzbourg...). Un peu retardée, sans doute aussi le temps de trouver des titulaires de remplacement (en l’occurrence de bonne pointure : Daniel Harding, Susanna Mälkki, et plus tard Yannick Nézet-Séguin pour Salzbourg), la nouvelle de la défection du chef letton est finalement tombée peu avant le présent concert. Déception évidente, mais qui n’explique sans doute pas à elle seule que la salle du Gasteig soit à ce point peu remplie. On suppose que le programme initialement prévu (Debussy, Ravel et Bartók) a dû y être aussi pour quelque chose, preuve que même à Munich, pourtant métropole musicale de haute volée, la musique française ne se vend pas toujours bien.


Programme remanié suite à l’arrivée de Daniel Harding, qui a tenu à diriger en lieu et place des deux premiers Nocturnes et d’Iberia de Debussy, quatre extraits symphoniques du Roméo et Juliette de Berlioz. Une belle occasion, dans ce contexte d’anniversaire, de rendre à Berlioz un plus ample hommage. Ordre des pièces modifié aussi, puisque le concert commence, plutôt bien, par la suite du Mandarin merveilleux de Bartók. Orchestre au grand complet, superbe tenue d’ensemble, y compris dans les passages les plus complexes : manifestement Daniel Harding a les leviers bien en main, pour une exécution relativement analytique. On apprécie la netteté des contours, voire la tenue exceptionnelle d’un pupitre de cuivres aux couleurs rutilantes. Cela dit, tout reste trop apparemment contrôlé, un rien minutieux, là où on attendrait, sinon davantage de sauvagerie, du moins de malaise et d’instabilité latents. Indiscutablement une exécution propre, mais d’une objectivité qui laisse sur sa faim.


Dans le Concerto en sol de Ravel, Jean-Yves Thibaudet paraît parfaitement à l’aise. Aucun problème technique, une belle palette, un toucher tantôt brillant tantôt d’un beau raffinement : la sécurité de cette partie pianistique fait plaisir à entendre, même si on y apprécierait parfois un rien d’abandon en plus. L’orchestre, en terrain beaucoup moins familier, résiste bien, y compris pour le terrible solo de trompette initial, mais Daniel Harding ne semble guère préoccupé de lui insuffler un quelconque caractère. Les musiciens en restent à une lecture sans grande saveur, voire d’une relative indifférence dans l’Adagio central, en dépit de la beauté de la flûte de Philippe Boucly. Peut-être aussi parce que le pianiste y respecte à la lettre les nuances écrites par Ravel pour ce mouvement, ce qui contraint l’accompagnement à une grande discrétion, éventail dynamique restreint que Harding ne parvient pas à habiter. On a juste l’impression d’un orchestre timide et écrasé, mais il est vrai que l’acoustique traître de la salle du Gasteig n’aide probablement pas beaucoup. En bis, une exécution d’une noblesse sans afféterie de la Pavane pour une infante défunte. « C’était bien du Satie, n’est-ce pas ? » me demande ma voisine. Décidément, la musique française ici...


En seconde partie, les quatre extraits de Roméo et Juliette (« Grande fête chez Capulet », « Scène d’amour », « Scherzo de la reine Mab » et « Roméo au tombeau des Capulets ») paraissent exécutés sans grande motivation. Bien sûr un merveilleux orchestre est à l’œuvre, et chaque détail est en place, y compris dans la vétilleuse dentelle de la reine Mab ou la fée des songes, mais émotionnellement il ne se passe vraiment pas grand-chose, et surtout pas dans une « Scène d’amour » redoutablement inerte. Non pas que les musiciens ne s’y sentent pas concernés, mais la direction de Daniel Harding ne parvient à communiquer aucune tension particulière à leur jeu : un nocturne étale, sans enjeu, et surtout sans fièvre amoureuse. Quant au public, cette musique visionnaire semble lui passer totalement au dessus de la tête. Vraiment, de tout cœur, souhaitons un prompt rétablissement à Mariss Jansons : Maestro, revenez-nous vite !



Laurent Barthel

 

 

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