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Un public conquis

Paris
Enghien-les-Bains (Ecole de musique et de danse)
04/13/2019 -  
Frédéric Chopin : Sonate pour piano n° 2 «Funèbre», opus 35
Karol Beffa : Etudes n° 7, n° 10 et n° 11
Franz Liszt : Réminiscences de «Norma», S. 394

Tristan Pfaff (piano)


T. Pfaff (© Jean-Baptiste Millot)


Riche, déjà, d’une belle carrière au répertoire étendu, Tristan Pfaff n’avait cependant jamais abordé la Sonate «Funèbre» de Chopin en concert. C’est donc une première à laquelle nous avons assisté lors du récital que le pianiste donnait à l’auditorium de l’Ecole de musique et de danse d’Enghien-les-Bains.


Tristan Pfaff construit l’œuvre avec un sentiment d’urgence, dans un style dépouillé, sans épanchement. Les deux premiers mouvements, fiévreux et frémissants, dans lesquels le pianiste trace les phrases comme un chemin qui amène irrémédiablement à la «Marche funèbre», sont impressionnants de tension. D’une grande stabilité et avec beaucoup d’élévation, la célèbre Marche avance inexorablement; le trio central remarquablement timbré, dans un halo lumineux, apporte une couleur céleste de toute beauté. Glaçant et terrifiant, le finale, course effrénée aux deux mains à l’unisson, prend avec Tristan Pfaff tout son sens visionnaire et nous emporte, entre vagues et rafales...


Un choix de trois Etudes de Karol Beffa, dont Tristan Pfaff vient d’enregistrer l’intégrale (Ad Vitam Records), poursuit le programme. Déjà remarquée à l’occasion de ce magnifique enregistrement, l’osmose entre le compositeur et le pianiste se dévoile en direct. A côté du pianiste, le compositeur tourne les pages de ces pièces rutilantes pour le piano, si bien écrites, si poétiques, aux couleurs si particulières et attachantes. Clarté de son, intelligence aiguë du texte, technique pianistique éprouvée afin de nous livrer les atmosphères contrastées, les timbres subtils et la vitalité digitale de ces petits chefs-d’œuvre, Tristan Pfaff s’impose.


Traits fulgurants, bravoure et panache, le jeune pianiste se lance à corps perdu dans Réminiscences de «Norma» de Liszt. S’il n’est pas toujours facile d’éviter les écueils de la virtuosité gratuite et démonstrative dans ces transcriptions lisztiennes, Tristan Pfaff tire cependant fort bien son épingle du jeu. Octaves crépitantes, charme dans les épisodes lyriques, effets de timbales accrus dans les basses, endurance, l’œuvre est servie avec des moyens spectaculaires.


En bis, «Etincelles» de Moszkowski, chères à Vladimir Horowitz, ici dans une transcription ébouriffante d’Arcadi Volodos, électrisent un public conquis.



Christian Lorandin

 

 

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