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Nationalisme... dans le bon sens

Geneva
Victoria Hall
01/10/2019 -  
Claude Debussy: Prélude à l’après-midi d’un faune
Serge Prokofiev: Cendrillon, opus 87
Richard Strauss: Ein Heldenleben, opus 40

Orchestre du Théâtre Mariinski, Valery Gergiev (direction)


V. Gergiev (© Alexander Shapunov)


Il y a une certaine habitude dans les tournées des orchestres étrangers de s’attendre à ce qu’ils se produisent dans les œuvres de leurs pays. Les Viennois doivent jouer des valses de Strauss, le Gewandhaus de Leipzig est attendu dans Mendelssohn, les Berlinois dans Brahms, les formations d’Amérique latine dans du Ginastera ou du Chávez ou celles de Chine dans des pièces inspirées du folklore traditionnel. Plus proche de nous, l’Orchestre de la Suisse romande se doit de programmer de la musique française. Quant aux formations russes, elles se cantonnent trop souvent à des sempiternelles Symphonie Pathétique ou suites de Roméo et Juliette.


Le concert donné par le Mariinski et son infatigable directeur musical a montré qu’il est possible au contraire que des formations puissent concilier leur style propre tout en explorant des répertoires qui ne sont pas naturellement les leurs. Le son et le style qu’ils ont développé dans la musique française et allemande est bien le leur mais l’éclairage nouveau et inhabituel qu’ils apportent est fascinant.


Le Prélude à l’après-midi d’un faune est ainsi pris à un tempo plutôt retenu, la flûte solo cherche dès le début une certaine amplitude sonore. Les cordes sont présentes et soutiennent une longueur de ligne et s’équilibrent avec les bois qui ne dominent pas le discours musical. Les couleurs sont plus fortes. Le passage central avec un rubato retenu un peu plus marqué a un relief saisissant.


Les musiciens russes sont bien évidemment chez eux dans ces extraits du ballet Cendrillon de Prokofiev. Gergiev, en grand chef de théâtre, raconte une histoire. Les différents personnages, en particulier les deux sœurs évoquées aux deux premiers violons, sont pleins de caractère. Les solos des bois sont superbes et celui de la clarinette brillantissime. Les attaques sont claires pour cette musique qui demande tant de précision. La sonorité des violons est particulièrement séduisante avec des glissandos réglés et exécutés au millimètre près par tout le pupitre.


Gergiev fait démarrer son orchestre dans Une vie de héros avec un tempo plus animé que celui qu’il a lui-même adopté dans l’enregistrement qu’il a gravé récemment avec son orchestre munichois. Si son faune debussyste prenait son temps, son héros straussien est volontaire et pressé. Comme à New York, Lorenz Nasturica Herschcowici est un premier violon d’exception aussi bien pour la splendeur de son redoutable solo mais surtout dans sa manière d’entraîner son pupitre. A nouveau la sonorité des cordes est remarquable. Nous ne sommes pas à Vienne avec la suavité et la séduction dont ils sont capables, le son est aussi riche mais il est ici plus dense. Dans la salle du Victoria Hall dont nous avons souvent regretté l’acoustique, les nombreux tutti de cette œuvre fortement orchestrée ne saturent pas. La conduite de la ligne, si importante chez Strauss, est exemplaire. A nouveau, la musique de Strauss est redécouverte par un style orchestral russe.


Très applaudis par un public particulièrement attentif, les musiciens nous donnent en bis le Prélude du troisième acte de Lohengrin, un peu clinquant mais qui permet au pupitre des cors de briller. Valéry Gergiev sera de retour en Suisse cet été à Verbier, dont il est le directeur musical de l’Orchestre du Festival, et également avec le Mariinski au Festival de Montreux, mais ce sera là dans un programme exclusivement russe.



Antoine Lévy-Leboyer

 

 

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