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Un tsar en Helvétie

Lucerne
Centre de la culture et des congrès
01/09/2019 -  
Piotr Illitch Tchaïkovski : Iolanta, opus 69 (extraits) – Symphonie n° 5 en mi mineur, opus 64
Irina Churilova (Iolanta), Najmiddin Mavlyanov (Vaudémont), Roman Burdenko (Robert), Mikhail Petrenko (René), Evgeny Nikitin (Ibn-Hakia)
Orchestre du Théâtre Mariinski, Valery Gergiev (direction)


V. Gergiev (© Alexander Shapunov)


Numéro un de la distribution de détail en Suisse, la coopérative Migros est également un organisateur important de concerts de musique classique. Selon le vœu de son fondateur en effet, la société est tenue d’allouer 1% de son chiffre d’affaires (Pour-cent culturel Migros) à la culture, à la formation et aux loisirs. De cette manne, la culture s’octroie, bon an mal an, une part de près de 30%, soit quelque 30 millions d’euros. La Migros a toujours soutenu la musique classique en organisant, depuis 1948, une saison de concerts (Pour-cent culturel Migros Classics) dans les principales villes de Suisse. Depuis 2007, la saison est placée sous la direction artistique du chef d’orchestre et pianiste franco-bulgare Mischa Damev. Ce dernier présidera aussi désormais aux destinées du Septembre musical de Montreux, ayant succédé à Tobias Richter.


Mischa Damev a noué une relation privilégiée avec Valery Gergiev, qu’il a fait venir la saison dernière en Suisse avec son orchestre du Théâtre Mariinski pour l’intégrale des symphonies de Tchaïkovski. Et c’est également Valery Gergiev qui ouvrira, cet automne, la première édition du Septembre musical placée sous la houlette de Mischa Damev. Pour la saison en cours, le chef russe et son orchestre ont été invités pour un concert à Lucerne, dans la célèbre salle conçue par Jean Nouvel, avec un programme 100% Tchaïkovski: des extraits de l’opéra Iolanta en première partie puis, après l’entracte, la Cinquième Symphonie. Quand on connaît les affinités du maestro et des musiciens avec le compositeur, on était en droit d’attendre le meilleur. Et effectivement, le public n’a pas été déçu, la soirée se révélant passionnante.


Et pourtant, le concert a bien failli ne pas avoir lieu. Mischa Damev s’avance sur scène, un micro à la main : il annonce au public qu’il a une bonne et une mauvaise nouvelle. La mauvaise, c’est que le chanteur qui devait interpréter le rôle du roi René a été contraint de déclarer forfait la veille. La bonne nouvelle, c’est qu’un remplaçant a pu être trouvé en la personne de Mikhail Petrenko. Celui-ci aurait dû prendre un avion depuis l’Italie, mais son vol a été annulé en raison de la neige tombée en abondance. Le chanteur a quand même réussi l’exploit de rejoindre Lucerne, arrivant 40 minutes avant le début du concert. Il s’est glissé sans peine dans son personnage, autre exploit.


Iolanta est le dernier opéra de Tchaïkovski, écrit en même temps que le ballet Casse-Noisette, pour répondre à une double commande des Théâtres impériaux. L’histoire de la guérison miraculeuse d’une jeune fille aveugle séduit par son originalité, sa poésie et son lyrisme. Par son mystère aussi : la vue recouvrée est-elle une réflexion sur le prix à payer pour la connaissance ou alors s’agit-il d’une allégorie sur la vie et la mort, sur le passage dans un autre monde ? Malgré l’effectif orchestral imposant, Valery Gergiev l’impétueux offre une lecture intimiste et raffinée de la partition, exacerbant les couleurs et les atmosphères. Irina Churilova est une Iolanta émouvante et lumineuse, Mikhail Petrenko un souverain noble et humain, Najmiddin Mavlyanov un Vaudémont transi, Roman Burdenko un Robert racé et Evgeny Nikitin un médecin humaniste. On ne peut que regretter que l’ouvrage, une rareté hors de Russie, n’ait pas été donné dans son intégralité.


En seconde partie de soirée, dans la Cinquième Symphonie, on a le sentiment de découvrir un Valery Gergiev insoupçonné : celui qui est parfois surnommé l’ogre ou le démiurge, réputé pour ses excès, semble ici apaisé et serein : sa direction est lente et solennelle, toute en majesté, mais jamais pesante, même le tourbillon final semble assagi. Serait-ce ce qu’on appelle la maturité ou la plénitude ? Quoi qu’il en soit, jamais la partition n’a semblé aussi nostalgique et lumineuse à la fois. Le public s’est levé comme un seul homme pour saluer une prestation qui restera dans les annales.


Le site des concerts de la Migros



Claudio Poloni

 

 

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