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Sokhiev + Chostakovitch = bonheur

Toulouse
Halle aux Grains
11/03/2018 -  et 5 novembre 2018 (Paris)
Qigang Chen : Itinéraire d’une illusion
Dimitri Chostakovitch : Concerto pour violoncelle n° 2, opus 126 – Symphonie n° 5, opus 47

Edgar Moreau (violoncelle)
Orchestre national du Capitole de Toulouse, Tugan Sokhiev (direction)


E. Moreau, T. Sokhiev (© Léo Mora)


Nous avions laissé Tugan Sokhiev avec son Orchestre national du Capitole de Toulouse, en juin dernier, à la Halle aux Grains, et c’est pour mieux les y retrouver ce soir dans un beau programme russe, dédiée essentiellement à Chostakovitch, une musique qui résonne doublement très fort dans l’âme du chef ossète.


Mais comme d’habitude dans la saison symphonique toulousaine, c’est par une pièce de musique contemporaine que débute la soirée: Itinéraire d’une illusion de Qigang Chen. Connu en France pour avoir été le dernier élève d’Olivier Messiaen, le compositeur chinois est devenu un artiste de premier plan, devenant même le directeur musical de la cérémonie des Jeux olympiques de Pékin en 2008. Cette présentation succincte résume au fond l’évolution de l’art de Chen: il est passé d’une certaine forme originale du modernisme synthétisant les traditions d’Europe et d’Asie à un art plus accessible qui fusionne la musique de film et un certain cachet «folklorique» dans les mélodies. Mais le musicien est un orchestrateur hors pair et réussit à faire marcher la machine orchestrale avec une totale souplesse stylistique. La partition débute par une évocation des grandioses paysages de la Chine, avec des réminiscences toutes debussystes, pour ensuite évoluer vers une musique plus narrative, très hollywoodienne, qui n’évite pas la prolifération d’images des plus faciles... mais qui ne manquent cependant pas de ravir un public visiblement conquis.


Grand habitué de la phalange occitane, le violoncelliste Edgar Moreau (24 ans) entre ensuite sur la scène hexagonale de la Halle aux Grains pour s’attaquer au Second Concerto de Chostakovitch, créé par le grand Rostropovitch le 25 septembre 1966, sous la direction d’Evgueni Svetlanov à la tête de l’Orchestre symphonique de l’URSS. La réception de l’œuvre auprès du public a été moins immédiate que pour le Premier Concerto, peut-être à cause de son atmosphère plus fugitive et énigmatique: c’est une partition élégiaque, typique du dernier style de Chostakovitch, où se mêlent humour baroque, intimité, et nostalgie. Dès les premiers accords, le si talentueux Edgard Moreau et son magnifique violoncelle font surgir un vrai moment de musique pure, d’une qualité instrumentale exceptionnelle: le son d’abord, à la fois riche et délicat, le contrôle du vibrato, celui du phrasé, et un deuxième mouvement tout en luminescence et en sonorités épurées. De la belle ouvrage, et malgré les vivats à l’issue du dernier mouvement, Moreau ne cédera pas aux injonctions du public quémandant un bis.


En seconde partie, place à la grandiose Cinquième Symphonie du même Chostakovitch. On le savait déjà, Tugan Sokhiev est un grand interprète des ouvrages de maître russe. En parfaite symbiose avec son Orchestre national du Capitole, flexible et réactif à souhait, il délivre une lecture vraiment enivrante de cet Himalaya de la littérature symphonique. Modulations, équilibres, chemins intimes même: on ne perd rien ici du détail, de la polyphonie, tant le geste est cohérent; une conception d’un engagement et d’une intensité inouïes, mais lumineuse et aérienne, jamais emphatique ni surjouée. Les claquements des violoncelles et des contrebasses, les bois passionnés – le basson notamment! – du deuxième mouvement, mais aussi les pianissimi éthérés du troisième, tout est ici sortilège! Le contrôle de la tension des grands crescendi (I & III), son maintien dans les climax, ou encore la conduite entièrement concentrée dans le quatrième mouvement provoquent ici une fascination totale. Un voyage dont les auditeurs toulousains – et votre serviteur! – ne sortent pas indemnes, salué par des tonnerres d’applaudissements amplement mérités.



Emmanuel Andrieu

 

 

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