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Le versant sérieux

Bad Wildbad
Trinkhalle
07/21/2018 -  et 27 juillet 2018
Gioachino Rossini: Zelmira
Federico Sacchi (Polidoro), Silvia Dalla Benetta (Zelmira), Mert Süngü (Ilo), Joshua Stewart (Antenore), Marina Comparato (Emma), Luca Dall’Amico (Leucippo), Xiang Xu (Eacide)
Górecki Chamber Choir, Mateusz Prendota (chef de chœur), Virtuosi Brunenses, Gianluigi Gelmetti (direction)


(© Andreas Heideker)


«Rossini in Wildbad» se consacre au beau chant, comme l’indique son nom en petits caractères («Belcanto Opera Festival»), mais ce festival en Forêt noire programme aussi des raretés de compositeurs contemporains de Rossini ; travail admirable, documenté depuis plusieurs années chez Naxos. Mais pour cette trentième édition, du 12 au 29 juillet, c’est évidemment l’illustre Pesarais, mort il y a cent cinquante ans, qui se trouve au centre de toutes les attentions, avec trois opéras mis en scène, L’equivoco stravagante, La cambiale di matrimonio et Moïse et Pharaon, et un en version de concert, Zelmira (1822) – le versant sérieux et la face comique, le musicien débutant et le maître accompli, le connu et le plus rare.


Les productions révèlent de talentueux musiciens qui se perfectionnent à l’Académie attachée au festival, mais pour ce concert, la distribution réunit des chanteurs confirmés qui relèvent brillamment le défi lancé par Rossini. Exécuté dans la version parisienne de 1826, cet ouvrage n’épargne personne, surtout dans les rôles principaux, mais chacun affronte vaillamment les périls du chant rossinien. En Zelmira, Silvia Dalla Benetta ne craint pas les passages les plus virtuoses, mais si la soprano affiche beaucoup de rigueur, en particulier dans la vocalisation, ses interventions captivent modérément ; le timbre manque d’onctuosité et le chant de pureté pour totalement séduire. Mert Süngü se montre bien plus charismatique en Ilo et transporte la salle par sa voix splendide, son registre de tête suprêmement maîtrisé, ses aigus claironnants, sa ligne de chant raffinée. Ce ténor flamboyant possède sans aucun doute la carrure et le tempérament pour rejoindre les plus grands interprètes de l’opéra italien du début du XIXe siècle.


Federico Sacchi, qui remplace Emmanuel Franco, se détache en Polidoro par la noblesse du phrasé et la gravité du timbre, tandis que Joshua Stewart demeure stylistiquement plus ordinaire en Antenore, bien que ce ténor à la virtuosité plus limitée en comparaison avec le reste du plateau assure plus que correctement sa partie. Il faut patienter jusqu’au second acte pour enfin apprécier en Emma le talent et la sensibilité de Marina Comparato, souple dans l’ornementation et peu contrainte dans l’exploration des graves – le bas du registre de la mezzo reste cependant peu nourri. Du Leucippe de Luca Dall’Amico, retenons le mordant du phrasé et la profondeur des basses, et de l’Eacide de Xiang Xu, bien moins sollicité que ce dernier, la pureté de la voix et la netteté de la projection.


Pour diriger cet ouvrage complexe et imposant, il faut un musicien aussi expérimenté et renommé que Gianluigi Gelmetti : attentif à la cohésion du plateau, scrupuleux sur les nuances et la clarté, il imprime du souffle et de l’élan à cet opéra sérieux parmi les plus aboutis du compositeur. Les chanteurs peuvent reposer sur ce chef qui ne bouscule jamais les tempi. Malgré quelques acidités par moments, les Virtuosi Brunenses livrent une excellente prestation et produisent une sonorité le plus souvent plaisante, bien que peu typée, avec un jeu soliste particulièrement précis et expressif – admirable cor anglais, combiné avec la harpe, dans le duo entre Zelmira et Emma. La prestation des choristes, qui accomplissent leur tâche avec présence et conviction, se hisse au même niveau que celle des autres participants.


Les micros suggèrent une publication discographique chez Naxos, qui ne possède pas encore Zelmira à son catalogue. Dans un souci d’exhaustivité, et comme le festival prend la chose rossinienne très au sérieux, les interprètes exécutent aussi une variante de la fin du second acte, devant un public admirablement silencieux, mais qui acclame les chanteurs entre les numéros à coups de bravo. Bad Wildbad attire manifestement de véritables passionnés, et pas uniquement pour ses thermes et son air pur.



Sébastien Foucart

 

 

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