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Deux femmes, deux opéras

Geneva
Opéra des Nations
03/17/2018 -  et 19*, 21, 23, 25, 27, 29 mars 2018
Pietro Mascagni : Cavalleria rusticana
Roman Burdenko (Alfio), Melody Louledjian (Lola), Oksana Volkova (Santuzza), Stefania Toczyska (Mamma Lucia), Marcello Giordani (Turiddu)
Chœur du Grand Théâtre, Alan Woodbridge (préparation), Orchestre de la Suisse Romande, Alexander Joel (direction musicale)
Emma Dante (mise en scène), Gianni Maras (assistant à la mise en scène), Carmine Maringola (décors), Vanessa Sannino (costumes), Cristian Zucaro (lumières), Manuela Lo Sicco (chorégraphie)


Ruggero Leoncavallo : Pagliacci
Diego Torre (Canio), Nino Machaidze (Nedda), Roman Burdenko (Tonio), Migran Agadzhanyan (Beppo), Markus Werba*/Mark Stone (Silvio), Terige Sirolli, Rodrigo Garcia Muñoz (Deux villageois)
Chœur du Grand Théâtre, Alan Woodbridge (préparation), Maîtrise du Conservatoire populaire de musique, danse et théâtre, Magali Dami, Fruzsina Szuromi (préparation), Orchestre de la Suisse Romande, Alexander Joel (direction musicale)
Serena Sinigaglia (mise en scène), Omar Nedjari (assistant à la mise en scène), Maria Spazzi (décors), Carla Teti (costumes), Claudio De Pace (lumières)


(© GTG / Carole Parodi)


Le Grand Théâtre de Genève a eu la main particulièrement heureuse en confiant le célèbre binôme vériste Cavalleria rusticana/Pagliacci à deux femmes. Chacune à leur manière, les deux metteuses en scène ont imaginé une ode à la féminité pour raconter leur perception des deux ouvrages, marqués par le machisme et la violence faite aux femmes dans l’Italie de la fin du XIXe siècle. Leur regard trouve une résonance actuelle forte et n’en est que plus percutant, compte tenu de certains événements récents. Si Cavalleria rusticana est la reprise d’un spectacle créé à Bologne il y a exactement une année, Pagliacci est une nouvelle production montée expressément pour l’Opéra des Nations.


Fidèle à ses principes, la grande dame du théâtre italien qu’est Emma Dante fait se dérouler le chef-d’œuvre de Mascagni dans un décor sombre et sobre, occupé seulement par trois structures amovibles représentant la façade d’une maison avec un escalier et un balcon. Elle dépeint une Sicile stylisée et haute en couleur avec ses nombreuses fêtes et processions, mais placée aussi sous le joug inflexible de la religion (avec de nombreuses croix qui descendent des cintres et une scène du calvaire représentée à plusieurs reprises par des figurants) et corsetée par des règles exigeant la soumission des femmes, sans oublier la chaleur qui accable les corps et les esprits. Dans ce carcan, Santuzza a beau essayer de lutter et de garder la tête haute, son combat est immanquablement voué à l’échec. Malheureusement, la distribution vocale, très moyenne, n’est pas à la hauteur de la réalisation scénique. Luttant avec de fâcheux problèmes d’intonation et des aigus serrés, Oksana Volkova n’en incarne pas moins une Santuzza digne et émouvante. Marcello Giordani est un Turiddu monochrome et sans nuances, chantant constamment en force. Melody Louledjian incarne une Lola plutôt fade, dont le chant a perdu son attrait habituel. Heureusement, Stefania Toczyska campe une Mamma Lucia particulièrement expressive et Roman Burdenko un Alfio jovial et sonore. Sous la baguette d’Alexander Joel, l’Orchestre de la Suisse Romande livre une prestation en demi-teinte: si les couleurs sont soyeuses, la formation ne s’embarrasse pas de nuances et couvre parfois les chanteurs.


A la noirceur de Cavalleria rusticana font écho la lumière et les couleurs de Pagliacci dans une production imaginée par Serena Sinigaglia. Sur le plateau laissé nu par sa consœur, elle place des techniciens qui installent, au centre de la scène, des tréteaux sur lesquels va se jouer le drame. La direction d’acteurs est minutieusement réglée; ici aussi, tout tourne autour du personnage féminin principal, Nedda en l’occurrence, qui se retrouve seule sur scène au rideau final. La distribution est cette fois de très haut niveau. Elle est emmenée par la superbe Nedda de Nino Machaidze, à la voix très bien conduite sur toute la tessiture et au timbre lumineux et idéalement projeté. On admire aussi la vaillance de Diego Torre, Canio aux accents ardents et lumineux, à défaut d’être nuancé. Markus Werba incarne un Silvio stylé et Roman Burdenko fait à nouveau forte impression. Malgré quelques réserves, le binôme imaginé par le Grand Théâtre de Genève est une réussite.



Claudio Poloni

 

 

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