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Macbeth au pays des algorithmes

Lyon
Opéra
03/16/2018 -  et 21, 25, 27, 31 mars, 3, 5 avril 2018
Giuseppe Verdi : Macbeth
Elchin Azizov (Macbeth), Susanna Branchini (Lady Macbeth), Arseny Yakovlev (Macduff), Louis Zaitoun (Malcolm), Patrick Bolleire (Un médecin), Clémence Poussin (La suivante), Roberto Scandiuzzi (Banco)
Chœurs et Studio de l’Opéra de Lyon, Marco Ozbic (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra de Lyon, Daniele Rustioni (direction musicale)
Ivo van Hove (mise en scène), Jan Versweyveld (décors, lumières), Wojciech Dziedzic (costumes), Janine Brogt (dramaturgie théâtrale), Jan Vandenhouve (dramaturgie musicale), Tal Yarden (vidéo)


(© Bertrand Stofleth)


Déjà donnée à Lyon en 2012 avec des interprètes différents, la production de Macbeth qui ouvre cette année le festival Verdi nous embarque dans le monde cruel de la haute finance new-yorkaise: le metteur en scène belge Ivo van Hove imagine une vaste salle d’échanges boursiers qui embrasse toute la scène pendant l’ensemble de la représentation. Ce décor unique, dur et froid à l’image du monde sans pitié qui est décrit, bénéficie des éclairages variés de Jan Versweyveld – également scénographe. Cette transposition contemporaine réglée avec minutie est souvent proche du travail de Christoph Marthaler, aussi bien dans l’utilisation de la lumière crue des néons que celle des personnages comme éléments de décor: ainsi de la femme de ménage omniprésente, tout autant que le chœur réparti autour des écrans.


L’utilisation de la vidéo en surplomb vient apporter des images tour à tour banales et saisissantes de cette modernité inhumaine dans son impersonnalisation: l’opposition entre les algorithmes financiers et les manifestants au dehors est plusieurs fois mise en avant, tandis que les vidéos en film négatif soulignent la cruauté du regard en noir et blanc de la haute finance. L’ensemble est bien réglé, malgré certaines maladresses qui privilégient l’efficacité théâtrale aux attendus lyriques – on pense par exemple au chœur qui chante à quelques reprises dos au public. La démonstration simple et directe trouve une efficacité soutenue, même si l’ensemble peut parfois sembler redondant et manichéen. On pourra aussi regretter que la direction d’acteur se perde dans cette vaste scénographie moins aboutie dans les scènes intimes. Quoi qu’il en soit, malgré ces réserves, la transposition se tient et reste plaisante de bout en bout, appelant à renoncer à la fatalité et à l’inaction: «nous sortons tous d’une rêverie qui est devenue un cauchemar» entonne ainsi l’un des manifestants en fin d’ouvrage.


Le plateau vocal réuni est sans conteste dominé par la grande classe de Roberto Scandiuzzi en Banco, admirable dans ses phrasés et ses couleurs. C’est justement de couleurs que manque le chant monotone d’Elchin Azizov (Macbeth), impeccable au niveau technique, mais trop prévisible dans son interprétation. A ses côtés, Susanna Branchini (Lady Macbeth) affiche le meilleur et le moins bon, ratant son air d’entrée pour se rattraper ensuite. Le positionnement de voix est parfois instable, l’aigu très dur, mais quelle variété dans le corsé du timbre et le caractère de ses phrasés! On souhaiterait l’entendre dans un rôle à sa portée – à moins qu’un rôle de mezzo ne lui convienne mieux? Autre déception avec le Macduff d’Arseny Yakovlev, qui craque à deux reprises son aigu puis le grave. C’est d’autant plus regrettable qu’il avait fait montre au préalable d’une ligne vocale harmonieuse et sensible, bien que peu projetée. Tous les seconds rôles sont parfaits, tandis que le chœur affiche une fois encore sa superbe, ce qui est à souligner dans une partition qui le sollicite beaucoup. On mentionnera enfin la direction trop sonore de Daniele Rustioni dans les parties verticales, heureusement plus nuancée dans les passages apaisés.



Florent Coudeyrat

 

 

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