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Triste et sombre

Paris
Opéra Comique
12/19/2017 -  et 21, 23, 25*, 27, 29 décembre 2017
Gioachino Rossini: Le Comte Ory
Philippe Talbot (Le Comte Ory), Julie Fuchs (La Comtesse), Gaëlle Arquez (Isolier), Eve-Maud Hubeaux (Dame Ragonde), Patrick Bolleire (Le Gouverneur), Jean-Sébastien Bou (Raimbaud), Jodie Devos (Alice), Laurent Podalydès, Léo Reynaud (comédiens)
Chœur Les Eléments, Joël Suhubiette (chef de chœur), Orchestre des Champs-Elysées, Louis Langrée (direction musicale)
Denis Podalydès (mise en scène), Eric Ruf (décors), Christian Lacroix (costumes), Stéphanie Daniel (lumières)


(© Vincent Pontet)


Le Comte Ory, opéra de Rossini pas étiqueté buffa certes, mais néanmoins assez comique et pittoresque pour en faire une friandise idéale pour les fêtes de fin d’année, perd tout son sel dans la nouvelle production signée Denis Podalydès et Louis Langrée.


On se réjouissait pour la matinée de Noël de le voir, ce Comte Ory avec ses chevaliers médiévaux déguisés en nonnes, son Comte travesti en ermite puis en religieuse et ses rebondissements truculents quasi vaudevillesques. En transposant l’action du temps des Croisades à celui de la Restauration (époque de la création, en voilà une idée bien neuve!), on la prive de tout son pittoresque d’autant que les costumes signés Christian Lacroix dans des camaïeux de gris et verdâtre uniformisent les personnages au point de rendre incompréhensible le premier acte. L’Ermite et Raimbaud en curés, Ragonde en bourgeoise, la Comtesse en dame de compagnie, etc...: on n’a pas vraiment envie de rire, ni même de sourire. Si l’on a honte à ce point des croisades et autres sujets coloniaux qui font le fond de commerce de l’opéra comique du XIXe siècle, il faut simplement arrêter de les monter et ne pas les camoufler avec leurs dialogues certes aujourd’hui pouvant sonner politiquement incorrects derrière des images qui n’ont rien à voir avec ce qu’ils racontent.


La direction d’acteurs de Denis Podalydès est réglée au millimètre près mais prend l’ouvrage à un niveau de sérieux auquel il ne peut prétendre. Le trio du lit qui est le centre comique de l’œuvre est complètement raté à force de vouloir y trouver un sens qu’il n’a pas. La scénographie grisâtre d’Eric Ruf est belle pour le château du deuxième acte mais le fouillis de confessionnaux, chaires et autres prie-Dieu au premier prive simplement le spectateur des clés de compréhension de l’action.


On a réuni pour cette production la fine fleur du chant français d’aujourd’hui. Pour avoir beaucoup entendu celle d’hier, il est permis de penser que l’on perd au change. Certes Julie Fuchs a très bien développé sa voix au timbre exquis et ses moyens sont adéquats au rôle de la Comtesse. Mais le style n’y est pas, le mordant nécessaire pour que le chant exprime son constant sous-entendu comique lui est étranger. Y a t-il à ce point une démission des équipes pédagogiques, à commencer par le chef d’orchestre, que ces rudiments stylistiques ne soient plus transmis? Philippe Talbot a lui aussi les notes du Comte Ory mais la couleur vocale est simplement absente et prive son chant de ce qu’il pourrait y mettre pour rendre les raffinements comiques du rôle. Gaëlle Arquez sauve la mise en Isolier avec une diction impeccable. Dame Ragonde (Eve-Maud Hubeaux), on l’a dit, est sinistre alors que son rôle est de l’essence du burlesque. Le chœur Les Eléments est strictement incompréhensible dès qu’il passe à la double croche, ce qui, dans Rossini, est rédhibitoire.


Louis Langrée dirige l’Orchestre des Champs Elysées comme s’il s’agissait d’une œuvre du grand répertoire symphonique. Puisque les longs et coûteux travaux de réfection de la salle Favart n’ont pas permis de remédier au problème de l’acoustique de la fosse, on a l’impression constante que l’orchestre cherche à couvrir les chanteurs, ce qu’il fait plus d’une fois.


Qu’il nous soit permis de ne pas partager l’engouement général qui a accueilli ce spectacle auquel, comme au récent Barbier de Séville du Théâtre des Champs-Elysées, on s’est, c’est un comble, franchement ennuyé.



Olivier Brunel

 

 

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