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Soir de fête : concert fleuve pour un cinquantenaire

Paris
Philharmonie
11/01/2017 -  et 2* novembre 2017
Luciano Berio : Sinfonia
Jörg Widmann : Fantasie – Au cœur de Paris (création)
György Ligeti : Poème symphonique
Igor Stravinsky : Symphonie de psaumes
Claude Debussy : La Mer
Franz Schubert : An die Musik, D. 547 (arrangement Luciano Berio)

Jörg Widmann (clarinette)
London Voices, Ben Parry (direction), Chœur de l’Orchestre de Paris, Lionel Sow (chef de chœur), Orchestre de Paris, Daniel Harding (direction)


Deux concerts gratuits... pour ses cinquante ans, l’Orchestre de Paris est grand seigneur. La Philharmonie, pourtant, éclairée de néons colorés rappelant les mises en scène d’Oliver Py, n’a pas affiché complet, du moins pour le second. A cause du programme, qui ne remontait pas au-delà de Debussy ? De l’absence de grand soliste international ? Il y a encore beaucoup à faire pour la formation des publics français… Mais cela montre les affinités de l’orchestre avec différents visages de la modernité musicale, incarnés par Stravinsky, Berio, Ligeti, et, aujourd’hui, Jörg Widmann, son compositeur en résidence : cela fait quatre générations... Est-on si loin du concert inaugural du novembre 1967, aux Champs-Elysées ? Certes Charles Münch finissait par un de ses grands chevaux de bataille romantiques, la Symphonie fantastique. Mais il avait commencé par La Mer, également choisie par Daniel Harding. Et la musique contemporaine était représentée : première française des Requiem Canticles de Stravinsky, un an après la création américaine par Robert Craft, avec Denise Scharley et Pierre Thau.


La Sinfonia de Berio, aujourd’hui grand classique du vingtième siècle, éblouit par sa virtuosité éruptive, parfois orgiaque, avec des London Voices magnifiques, parfaits successeurs des Swingle Singers. On admire la maîtrise du chef, qui évite la dispersion dans l’éclatement et le collage, notamment pour la fameuse troisième partie, où Berio reprend, en le détournant et en le contournant, l’intégralité du Scherzo de la Deuxième Symphonie de Mahler. Cinquante et un an après, ce melting-pot musical et culturel, pourtant très marqué par son époque, n’a pas pris une ride – du moins ainsi conçu.


Pendant qu’on prépare le dispositif orchestral de la Symphonie de psaumes, cent métronomes placés au sommet de la salle, derrière l’orchestre, éclairent la pénombre avec le Poème symphonique de Ligeti, devenu presque musique d’ameublement. Jörg Widmann, lui aussi haut perché, joue ensuite en virtuose sa Fantasie pour clarinette seule, sort de chant d’oiseau aux vocalises jubilatoires, entre pépiements et bribes de chant, aux rythmes déhanchés, où un jeune compositeur de vingt ans conjugue brillamment les libertés de l’improvisation et la maîtrise des structures. Le Stravinsky sonne ensuite assez droit, voire sec, tant côté chœur, aux voix d’hommes un peu tendues, que côté orchestre. Plus porté sur l’entrelacs polyphonique et les associations de timbre, en particulier dans la fugue de la deuxième partie, que sur la ferveur, le chef semble se laisser prendre au piège des déclarations de Stravinsky et ne pas chercher « dans la musique autre chose que ce qu’elle est » – ont ainsi disparu les instruments trop expressifs que sont les cordes aiguës ou les clarinettes. Tout s’assouplit cependant pour la troisième partie, comme s’il se prenait au jeu – tel, au fond, Stravinsky lui-même...


La création de Au cœur de Paris inaugure la seconde partie, où Roland Daugareil remplace Philippe Aïche comme premier violon. Tout à fait adaptée à l’occasion, une œuvre de pure circonstance, brillantissime et brève étude pour orchestre, où Offenbach croise Edith Piaf. La Mer nous reconduit aux sommets atteints par la Sinfonia. Plus proche d’un Boulez que d’un Münch, Harding privilégie les superpositions de rythmes, à la faveur d’une lecture d’une clarté analytique, très mobile, à l’image de l’incessant mouvement des ondes : il dirige une sorte de rhapsodie marine, où les sonorités de « Jeux de vagues » s’atomisent un peu alla Webern. Alors qu’il filait droit chez Stravinsky, tout n’est ici que souplesse, avec même quelques abandons. Beaucoup moins contraint que dans la Symphonie de psaumes, le chœur, debout sur les travées, chante enfin ce qui réunit tout le monde : « An die Musik » de Schubert… arrangé par Luciano Berio pour le troisième concert d’adieux de Daniel Barenboim en 1989.


Après un « Joyeux anniversaire » chanté par toute la salle à un orchestre superbe en ce soir de fête, il fallait à ce concert fleuve, dont on n’a jamais éprouvé la longueur, un bis d’apothéose : le final de L’Oiseau de feu, somptueux crescendo inauguré par le cor merveilleux d’André Cazalet.


L’intégralité du concert sur le site ARTE Concert:






Didier van Moere

 

 

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