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Heureux qui comme ULYSSES...

Paris
Centre Pompidou
07/01/2017 -  
Arnold Schoenberg/Heinz Holliger : Sechs kleine Klavierstücke, op. 19
Arnold Schoenberg : Herzgewächse, op. 20
Anton Webern : Fünfe Stücke für Orchester, op. 10 – Fünf geistliche Lieder, op. 15
Heinz Holliger : Increschantüm
Niccolò Castiglioni : Risognanze
Yan Maresz : Sul Segno

Sarah Maria Sun (soprano)
Ensemble ULYSSES, Ensemble Intercontemporain, Heinz Holliger (direction)
Manuel Poletti, Denis Lorrain (réalisation informatique musicale Ircam)


H. Holliger (© Daniel Vass)


C’est sous la férule du chef et compositeur Heinz Holliger (né en 1939) et des solistes de l’Ensemble Intercontemporain que le jeune Ensemble ULYSSES clôt ce festival ManiFeste 2017, avant de circuler tout l’été entre plusieurs académies. Le programme mêle quelques classiques du XXe siècle et des partitions plus contemporaines dont l’effectif met en valeur les instruments résonants.


L’orchestration (2006) par Heinz Holliger des Six Petites Pièces pour piano opus 19 (1911) s’inscrit dans le sillage de la Klangfarbenmelodie pratiquée alors par les trois Viennois, à commencer par Anton Webern (1883-1945). Une musique conçue comme de la dentelle, tout en chuchotement et déchirement de soie, où le moindre écart dans l’intonation peut être fatal. Chez Arnold Schoenberg (1874-1951), le rôle structurant de l’ostinato se voit ici paré de couleurs scintillantes par rapport au noir et blanc original du piano. Dans les Cinq Pièces pour orchestre opus 10 (1913), certaines attaques des percussions nous ont semblé trop irrégulières, notamment dans la fascinante Troisième Pièce, où les trémolos gagnent à être joués avec régularité. Sarah Maria Sun, qui a collaboré au très bref adieu composé par Holliger en hommage à Pierre Boulez, venait se confronter aux redoutables Feuillages du cœur (1911) de Schoenberg et aux Chants spirituels (1922) de Webern. Ligne vocale constituée d’intervalles disjoints, aigus stratosphériques, prosodie bousculée: son soprano colorature triomphe des périls, soutenu par la direction diligente de Holliger, plus attachée à clarifier les lignes qu’à exalter le climat expressionniste et poisseux dégagé par les rares Feuillages du cœur d’après Maurice Maeterlinck. A ce poème français traduit en allemand se substitue, dans Increschantüm (2014) pour soprano et quatuor à cordes, les textes de la poétesse Louise Famos, écrits en romanche, un dialecte suisse dont Holliger, dans une brève lecture liminaire, s’est plu à souligner les consonnes ciselées et les chuintements. L’éclairage trop tamisé de la salle n’autorisant pas la lecture des poèmes pourtant inclus dans le programme, l’oreille seule captait un discours riche en grandes envolées lyriques du quatuor à cordes. Les musiciens de l’Ensemble ULYSSES se sont surpassés dans cette œuvre émouvante qui, dans le même effectif (voix et quatuor à cordes), rejoint les réussites d’Othmar Schoeck (Notturno) et d’Aribert Reimann (Unrevealed, Shine und Dark).


Après l’entracte, place à Niccolò Castiglioni (1932-1996), dont Risognanze (1989) illustre la prédilection pour les sonorités claires, les textures aérées et transparentes, à mi-chemin entre l’ironie et le divertissement. Une ambiguïté parfaitement captée par les musiciens (épaulés par l’excellente flûtiste de l’EIC Emmanuelle Ophèle) dans cette suite de miniatures – « fragment de rêve », dit le Milanais – aussi fraîches qu’inspirées. Sul Segno (2004) de Yan Maresz (né en 1966) porte bien ses treize printemps. Le terrain des instruments résonants à cordes pincées avait déjà été investi par l’emblématique Sur Incises (1998) pour trois pianos, trois harpes et trois percussions-claviers de Pierre Boulez (1925-2016). On retrouve ici le même type de sonorités, le champ acoustique étant substantiellement élargi grâce à l’électronique. Aussi une harpe, une guitare, un cymbalum et une contrebasse suffisent-ils à générer un espace remarquablement sonorisé par l’informatique musicale de l’Ircam. De quoi faire débuter la tournée européenne de l’Ensemble ULYSSES sous les meilleurs auspices.



Jérémie Bigorie

 

 

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