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Le chant du violoncelle

Strasbourg
Palais de la Musique
03/24/2017 -  
Antonín Dvorák : Concerto pour violoncelle n° 2 en si mineur, opus 104
Charles Ives : Three Places in New England
Zoltán Kodály : Háry János, suite d’orchestre

Antonio Meneses (violoncelle)
Orchestre philharmonique de Strasbourg, Jonathan Stokhammer (direction)


A. Meneses (© Clive Barda)


Au vu du programme peu courant de la soirée, trouver un remplaçant pour Axel Kober qui a déclaré forfait pour cause de maladie quatre jours auparavant, n’a pas dû être facile. Et pourtant, et sans rien changer au menu, le chef accouru au pied levé se révèle une perle rare : Jonathan Stockhammer, impressionnant concentré d’énergie et gestique d’une précision exceptionnelle. L’Orchestre philharmonique de Strasbourg est manifestement sous le charme et ce dès l’introduction du Concerto pour violoncelle de Dvorák. De belles couleurs de cordes, des cuivres dopés d’énergie conquérante : un ensemble aux aguets aborde les prairies de Bohême, le chef semblant tout à la fois sécuriser ses musiciens et infléchir leurs phrasés à volonté par de subits élargissements de sa carrure. On retrouvera cette aisance tout au long de cet accompagnement confortable, jusqu’à l’opulente affirmation conclusive où Dvorák ose le grand écran hollywoodien avant l’heure (cet élargissement flatteur est du reste un ajout postérieur, à une première version où cette péroraison tournait bizarrement court). Ne manque au début de l’Adagio qu’un peu plus de sens de l’écoute mutuelle dans la petite harmonie, mais là c'est aussi la présence simultanée de plusieurs nouvelles recrues qui est en cause, avec encore quelques progrès de cohésion à réaliser.


Bien des années ont passé depuis ce concert salzbourgeois du Festival de Pâques où Herbert von Karajan nous faisait découvrir un jeune violoncelliste brésilien pas du tout impressionné, plein d’assurance sous sa tignasse ébouriffée, assis sur son petit podium devant des Berliner Philharmoniker au grand complet. Ce Don Quichotte de Strauss reste pour nous un immense souvenir, Antonio Meneses ayant cependant davantage bifurqué ensuite vers une carrière de musicien de chambre au plus haut niveau (il fut notamment membre du Beaux Arts Trio dix années durant). On le retrouve aujourd’hui, sous un aspect physique évidemment bien changé, avec toujours ce plaisir de jouer, cette rechange des couleurs et cette expressivité de la technique d'archet qui font de Meneses un interprète passionnant pour les concertos à grand souffle romantique, alors même qu’il n’a pas forcément une carrure sonore très impressionnante à faire valoir. Davantage qu’une interprétation : une présence toujours poétique et surtout, en dialogue avec l’orchestre, un sens de la ligne qui a tout de l’expressivité d'une voix.


La mise en place de Three Places in New England de Charles Ives a vraisemblablement mobilisé une partie notable du temps de répétition disponible, mais finalement la décontraction apparente avec laquelle Jonathan Stockhammer coordonne ces musiques toutes en superpositions complexes leur confère un parfait naturel. L’orchestre gère sans broncher les clivages variables qui amènent subitement un groupe de pupitres à jouer des thèmes qui n’ont aucun rapport avec ce que font les voisins, parce que les regards peuvent converger en toute sérénité vers un podium central dont émanent toujours les bons signaux au bon moment. Du coup il reste des réserves pour nuancer, phraser, et cette mosaïque de thèmes peut tourner véritablement au tableau impressionniste.


Les extraits symphoniques de Háry János referment le programme avec moins de subtilité. Ici les musiciens se font plaisir, en particulier une belle conflagration de cuivres en fanfare. Stockhammer lâche assez souvent la bride et comme tout le monde s’amuse bien il n’y a guère d'accident à déplorer. Cymbalum au premier plan pour les bariolages magyars de rigueur, peut-être trop envahissants du fait d’une amplification indiscrète. Somme toute un plaisant bastringue qui projette de Kodály une image un peu trop carrée et univoque mais conclut joyeusement cette juxtaposition de "folklores symphoniques", pour reprendre le raccourci proposé par l’affiche.



Laurent Barthel

 

 

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