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Quand Orlando fâché

Tourcoing
Théâtre municipal Raymond Devos
03/31/2017 -  et 2*, 4 (Tourcoing), 19 (Paris, version de concert) avril
Antonio Vivaldi: Orlando furioso, RV 728
Amaya Domínguez (Orlando), Samantha Louis-Jean (Angelica), Clémence Tilquin (Alcina), Yann Rolland (Bradamante), Víctor Jiménez Díaz (Medoro), Jean-Michel Fumas (Ruggiero), Nicolas Rivenq (Astolfo)
Ensemble vocal de l’Atelier lyrique de Tourcoing, La Grande Ecurie et la Chambre du Roy, Jean Claude Malgoire (direction)
Christian Schiaretti (mise en scène), Fanny Gamet (décors), Emily Cauwet-Lafont (costumes), Julia Grand (lumières)


(© Danielle Pierre)


Pour sa onzième collaboration avec l’Atelier lyrique de Tourcoing, Christian Schiaretti se met en difficulté en abordant Orlando furioso (1727). Comment traiter aujourd’hui un livret de ce genre sans tomber dans le ridicule ou la lourdeur ? S’il ne l’interprète pas au premier degré, le metteur en scène aurait dû davantage jouer sur le second. S’en tenant à une direction d’acteur stéréotypée, ce fidèle de l’institution tourquennoise prend une distance trop peu ironique sur les situations vécues par les personnages. L’action manque de vitalité, ce qui affaiblit les facettes dramatique et magique de cet opéra de Vivaldi. Légère, la scénographie se rapproche à peu près de l’esthétique du théâtre baroque : des panneaux de bois peints se déplaçant latéralement, ce qui modifie l’habituelle mobilité des personnages, qui apparaissent et disparaissent devant ou derrière ces peintures au lieu de simplement entrer et sortir par les coulisses. Une idée intéressante, mais ce spectacle avare en charme en comporte trop peu pour soutenir constamment l’intérêt. L’Italienne à Alger imaginé par ce metteur en scène, la saison dernière, nous a moins frustré et, surtout, beaucoup moins ennuyé.


La distribution laisse entrevoir les prouesses que des artistes plus exceptionnels accompliraient dans cet opéra mais elle honore la réputation de l’Atelier. D’ailleurs, comme l’esprit de troupe domine, aucun chanteur ne salue isolément et chacun s’engage avec sincérité, ce qui compense les faiblesses vocales. Le timbre et la voix d’Amaya Domínguez épousent étroitement la psychologie d’Orlando. Conjuguant habilement théâtralité et virtuosité, la mezzo-soprano affiche un fort tempérament, sans appuyer exagérément le trait dans les climax dramatiques. La prestation de Samantha Louis-Jean, qui incarne une Angelica fort ravissante, éclaire le potentiel de cette soprano au timbre séduisant et à la ligne vocale finement troussée, bien qu’entachée d’une émission parfois inégale. Quant à Clémence Tilquin, elle trouve en Alcina un emploi à sa mesure : de la présence, de l’énergie et une belle voix, conduite avec sûreté.


La contribution des contre-ténors laisse plus à désirer. En Bradamante, Yann Rolland peine dans les vocalises et marque faiblement ce rôle de travesti de son empreinte, alors qu’il s’agit d’un des personnages les plus hauts en couleur de cet ouvrage, mais le timbre parvient tout de même à séduire un peu. Voix lumineuse mais modérément puissante, Víctor Jiménez Díaz montre du style et de la maîtrise en Medoro. Jean-Michel Fumas évolue, quant à lui, dans son répertoire de prédilection, à en croire sa notice biographique, mais l’instrument demeure fragile et peu virtuose, ce qui met parfois ce chanteur honnête en péril. La voix de Nicolas Rivenq, chargé du rôle d’Astolfo, revêt des teintes peu marquées mais ce baryton fidèle à l’Atelier depuis longtemps affiche une certaine prestance.


Dans la fosse, Jean-Claude Malgoire reste égal lui-même. Toujours trop mesurée et routinière, sa direction préserve l’intégrité des chanteurs et des instrumentistes tout en insufflant un minimum d’impulsion. L’articulation entre les pupitres de La Grande Ecurie et la Chambre du Roy s’assouplit plus ou moins au fur et à mesure de la représentation et la mise en place demeure en fin de compte relativement acceptable. Les cordes paraissent toujours trop sèches et les vents pincés, ce que compensent le ton général assez volontaire de l’ensemble et la qualité du continuo qui intervient toujours avec à-propos. A saluer, enfin, la prestation fruitée et pleine d’esprit d’Alexis Kossenko à la flûte. Et à regretter, aussi, l’absence de précision dans le programme sur l’édition utilisée et sur les aménagements et autres coupes opérés dans cette partition redoutable pour des structures modestes comme l’Atelier lyrique de Tourcoing.



Sébastien Foucart

 

 

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