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Féerie hollywoodienne Paris Opéra Bastille 03/09/2017 - et 11, 12, 14, 15*, 17, 18, 21, 23, 24, 27, 29 mars 2017 Le Songe d’une nuit d’été George Balanchine (chorégraphie), Felix Mendelssohn (musique)
Eleonora Abbagnato/Marion Barbeau*/Hannah O’Neill (Titania), Hugo Marchand/Paul Marque*/Fabien Revillion (Obéron), Letizia Galloni/Alice Renavand/Ida Viikinkoski* (Hippolyte), Antoine Kirscher/Emmanuel Thibault/Hugo Vigliotti* (Puck), Yannick Bittencourt*/Audric Bezard/Florian Magnenet (Thésée), Marie-Solène Boulet*/Fanny Gorse/Sae Eun Park (Héléna), Mélanie Hurel*/Laëtitia Pujol/Muriel Zusperreguy (Hermia), Alessio Carbone/Fabien Revillion*/Simon Valastro (Lysandre), Audric Bezard/Vincent Chaillet/Axel Ibot* (Démétrius), Stéphane Bullion*/Karl Paquette (Chevalier de Titania), Alice Catonnet/Letizia Galloni*/Muriel Zusperreguy (Papillon), Marion Barbeau/Dorothée Marchand/Sae Eun Park* (Divertissement, soliste femme), Florian Magnenet/Hugo Marchand/Karl Paquette* (Divertissement, soliste homme), Ballet et Ecole de danse de l’Opéra national de Paris
Pranvera Lehnert, Anne-Sophie Ducret (sopranos), Chœurs de l’Opéra national de Paris, José Luis Basso (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra national de Paris, Simon Hewett (direction musicale)
Christian Lacroix (décors, costumes), Jennifer Tipton (lumières)
(© Agathe Poupeney/Opéra national de Paris)
L’entrée au répertoire du Ballet de l’Opéra national de Paris (BOP) du Songe d’une nuit d’été de George Balanchine, créé en 1962 par le New York City Ballet, a été voulue par Benjamin Millepied lors de son court directorat pour en enrichir le répertoire déjà riche – trente-trois œuvres désormais – de ce chorégraphe américain.
Il s’agit d’un de ses rares ballets narratifs, le pendant de la saison d’été au Casse-Noisette qu’il avait monté pour la saison d’hiver (voir ici). Le substrat musical en est l’Ouverture et la musique de scène composés par Felix Mendelssohn-Bartholdy en 1826 et 1843 agrémentés de quelques autres de ses œuvres, Athalie, La Belle Mélusine, la Première Nuit de Walpurgis, l’ouverture du Retour dans la patrie ainsi que la Neuvième Symphonie pour cordes. Un très bon montage permet une chorégraphie sans temps mort, divisée en deux actes de six tableaux. Il a rarement été donné en Europe mais la production historique du Teatro alla Scala de 2007 avec ses grandes étoiles Alessandra Ferri, Roberto Bolle et Massimo Murru est immortalisée à jamais par un film disponible sur DVD (TDK).
Pour cette création à Paris, les décors et costumes ont été réalisés d’après les maquettes originales de Barbara Karinska par le styliste Christian Lacroix sous la stricte surveillance du Balanchine Trust tout comme pour la reprise de la chorégraphie par Sandra Jennings.
Toutes sortes de reproches ont été faits à ce ballet: édulcorer la rivalité entre Titania et Obéron, les batailles entre les amoureux, escamoter les pantomimes des artisans dont on ne conserve que l’épisode de l’âne Bottom, hypertrophier les cérémonies du mariage... Il n’en demeure pas moins que dans ses décors de féerie hollywoodienne avec ses toiles peintes et ses fleurs géantes, et en tant que raccourci simplificateur d’une action un peu embrouillée dans l’original shakespearien, c’est parmi tous les avatars connus du Songe un des plus distrayants et réalisé dans un vrai respect de la tradition du ballet russe impérial à l’école duquel avait été formé Balanchine. Les 210 costumes brodés de cristaux Swarovski sont somptueux et participent beaucoup à l’enchantement, et quelques petits ajouts comme la chasse d’Hippolyte avec ses désopilants chiens ainsi que les insectes de la forêt dansés à ravir par les élèves de l’Ecole de danse sont un pur bonheur. Pour notre part, en tant que spectateur d’aujourd’hui, on ne peut s’empêcher de penser que la réussite aurait été totale si le ballet avait été amputé de son inutile et très long divertissement de l’acte II, qui casse l’action, ainsi que de quelques mignardises qui suivent la noce, et aurait certainement eu plus de force s’il était donné sans interruption pour se terminer sur le tableau des mariages, très spectaculaire sur l’éternelle «Marche nuptiale». Mais il s’agit d’un ballet d’un autre siècle, réalisé pour un tout autre public!
L’interprétation des danseurs de la première des distributions possibles de ces douze représentations était remarquable avec dans les rôles principaux de très jeunes solistes, sujets du BOP pour la plupart: Marion Barbeau très gracieuse Titania et Paul Marque en Obéron, promu sujet au dernier concours interne et médaille d’or au Concours de Varna. Le jeune coryphée Hugo Vigliotti était espiègle à souhait et d’une belle virtuosité dans le rôle de Puck, ensuite repris par Hugo Marchand qui vient d’être promu danseur étoile. On n’a pas été épaté par le duo formé par Karl Paquette et Sae Eun Park qui, ce soir, rivalisaient de raideur et d’absence de naturel dans le Divertissement.
On ne dira jamais assez le luxe de la présence d’un orchestre dans la fosse, quand tant de représentations sont aujourd’hui dansées sur des musiques enregistrées. Celui de l’Opéra de Paris, agrémenté pour ce spectacle de la présence de la fraction féminine de son Chœur ainsi que de deux sopranos et dirigé par l’Australien Simon Hewett, premier directeur musical du Ballet de Hambourg, était ce soir superlatif et à l’applaudimètre largement emporté le succès auprès du public.
Olivier Brunel
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