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Virtuosité américaine

Toulouse
Théâtre du Capitole
12/20/2016 -  et 22*, 24, 27, 29, 31 décembre 2016
Leonard Bernstein : Candide
Andrew Stenson (Candide), Wynn Harmon (Voltaire, Pangloss), Ashley Emerson (Cunégonde), Marietta Simpson (La duègne), Christian Bowers (Maximilian, Révérend Père), Kristen Choi (Paquette), Matthew Scollin (Martin, Jacques), Andrew Maughan (Cacambo, ensemble), Cynthia Cook (Vanderdendur, La Baronne), Brad Raymond (Le Grand Inquisiteur, Le Gouverneur), Cole Francum (Le Roi de Bavière, Un homme), Brian Wallin (Le Roi d’Eldorado, Un marin), Maren Weinberger (La femme du pasteur, La Reine d’Eldorado), Anthony Schneider (Le Capitaine I, Un inquisiteur, Un seigneur), Corrie Stallings (Caporal), Giovanni Da Silva (Un esclave, ensemble), Carlos Perez-Mansilla (Le pasteur, Un seigneur), Christian Lovato (Don Issacar, Le Capitaine II), Laurent Labarde (Le Baron, Un inquisiteur), Isabelle Antoine (Un mouton, ensemble), Judith Paimblanc (Un mouton, ensemble), Zena Baker, Olivia Barbieri, Amanda Compton LoPresti, Daniela Guerini Rocco, Andrew Harper, Emmanuel Parrag, Felicity Stiverson (ensemble)
Orchestre national du Capitole de Toulouse, James Lowe (direction musicale)
Francesca Zambello (mise en scène), E. Loren Meeker (collaboration artistique à la mise en scène), Eric Sean Fogel (chorégraphie), James Noone (décors), Jennifer Moeller (costumes), Mark McCullough (lumières)


(© Patrice Nin)


Face au cahier des charges des fêtes de fin d’année, le Théâtre du Capitole de Toulouse a choisi un partenariat entre les deux rives de l’Atlantique, sinon un carrefour entre deux répertoires, avec un Candide coproduit avec le festival de Glimmerglass, dans l’Etat de New York, où il a été étrenné en 2015. Se jouant habilement des étiquettes, l’opus de Bernstein se prête aussi bien à une lecture très opératique qu’à une conception plus proche de Broadway, et le spectacle réglé par Francesca Zambello offre une brillante synthèse entre les deux traditions – ce dont le plateau se fait le relais enthousiaste.


Le sens du rythme s’exprime dès le lever de rideau, faisant sortir les personnages d’un coffre, à la manière d’une illusion théâtrale aux confins de la narration contée, au diapason d’une adaptation de Voltaire voulue au plus près de l’original par le compositeur lui-même – on sait qu’il retoucha à plusieurs reprises la pièce, et c’est, nonobstant de mineurs accommodements, la version finale et posthume éditée par John Caird qui est ici choisie. Empruntant les perruques du Siècle des Lumières, la fantaisie des costumes dessinés par Jennifer Moeller ne se confine pas à une improbable restitution historique, et s’en sert davantage comme un ingrédient à la versatilité dynamique du spectacle, perceptible par ailleurs dans le virtuose tuilage entre déclamation narrative, séquences parlées et numéros chantés, assumant sans faiblesse la fluidité formelle de l’ouvrage. Encouragés par la ductilité des lumières réglées par Mark McCullough, les décors de James Noone participent de l’artifice général assumé et de son efficace mobilité. Le génie du conte et celui du spectacle se rejoignent, dans une production soucieuse de son effet, avant que d’induire le public dans une lecture trop imprégnée quelque actualité ou parti pris herméneutique : il s’agit d’abord de mettre en lumière le texte et son acuité plus intemporelle qu’opportunément contemporaine.


D’une distribution pléthorique composée de jeunes solistes, on retiendra d’abord le rôle-titre, incarné par avec une fraîcheur juvénile que d’aucuns pourraient juger un rien figée dans son sourire, quand bien la déception éprouvée par le jeune homme ne fait pas défaut. Comédien plus que chanteur, Wynn Harmon résume la volubilité de Voltaire, le conteur, autant que l’imperturbable logorrhée de Pangloss, en y imprimant une personnalité reconnaissable autour de laquelle s’articule le drame. En Cunégonde, Ashley Emerson fait palpiter le babil léger et fruité que l’on attend, avec un soupçon de sagesse qui épargne la coquine Paquette de Kristen Choi. Marietta Simpson se délecte ostensiblement de l’exotisme de la Duègne. Maximilian et Révérend Père, Christian Bowers allie un sens de la distinction à une allure un rien rustaude.


Les interventions plus circonstancielles ne sont pas négligées. Matthew Scollin ne démérite pas en Martin et Jacques, comme le Cacambo confié à Andrew Maughan. Apparaissant également en Baronne, Cynthia Cook impose un Vanderdendur haut en couleurs. Brad Raymond ne caricature pas le Grand Inquisiteur, et ne fait pas oublier le Gouverneur. Mentionnons encore le Roi de Bavière et celui d’Eldorado, campés respectivement par Cole Francum et Brian Wallin, aux côtés de Maren Weinberger – femme du Pasteur et Reine d’Eldorado – ainsi que les deux capitaines apparaissant chacun dans un acte – Anthony Schneider et Christian Lovato, également Don Issacar, le premier revêtant par ailleurs la bure d’un inquisiteur à l’instar du Baron de Laurent Labarde, ainsi que la défroque d’un seigneur, à l’image du Pasteur de Carlos Perez-Mansilla. Outre le Caporal de Corrie Stallings, Giovanni Da Silva, en esclave maltraité, illustre remarquablement la polyvalence de la comédie musicale, à laquelle s’essaient les deux moutons – Isabelle Antoine et Judith Paimblanc – et que confirme les ensembles où se mêlent artistes américains et membres des Chœurs du Capitole de Toulouse. Quant à la direction de James Lowe, elle fait respirer la plasticité de l’Orchestre national du Capitole, dont les saveurs denses n’entravent pas une partition chaloupée entre fragrances mahlériennes et foisonnement rythmiques de tous bords. On ne saurait mieux faire sourire un tel syncrétisme stylistique.



Gilles Charlassier

 

 

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