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En hommage à Neville Marriner

Baden-Baden
Festspielhaus
12/17/2016 -  et 18 décembre 2016 (München)
Felix Mendelssohn-Bartholdy : Symphonies n° 4 en la majeur « Italienne », opus 90, et n° 5 en ré majeur « Réformation », opus 107 – Concerto pour piano n° 1 en sol mineur, opus 25
Yulianna Avdeeva (piano)
Academy of St Martin in the Fields, Jaime Martin (direction)


Y. Avdeeva (© Harald Hoffmann)


Cette petite série allemande de trois concerts Mendelssohn (un à Baden-Baden, puis deux à Munich), aurait dû être dirigée par Sir Neville Marriner, « président à vie » de cette Academy of St Martin in the Fields qu’il a fondée en 1958. Le chef britannique nous ayant quittés le 2 octobre 2016, à l’âge respectable de 92 ans, ce n’est pas le directeur musical actuel de l’Academy, le violoniste Joshua Bell, qui a pu prendre le relais, mais un ancien flûtiste de la formation, Jaime Martín, qui s’est lancé depuis peu d’années dans une carrière internationale de chef d’orchestre. Au menu de cette tournée, un peu particulière puisque entièrement dédiée à un seul compositeur assez peu fréquemment joué, ou en tout cas rarement de façon aussi exhaustive : quatre symphonies (Première, Troisième, Quatrième et Cinquième) et deux concertos (le Premier Concerto pour piano, avec Yulianna Avdeeva, et le Second Concerto pour violon, avec Renaud Capuçon). Pour des raisons de remplissage, le Festspielhaus de Baden-Baden a choisi prudemment de n’accueillir qu’un seul des deux programmes, mais à l’issue de ce concert on se déclarerait volontiers partant pour le second volet, tant cette musique nous a paru bénéficier ici de conditions exceptionnelles.


L’Academy of Saint Martin in the Fields actuelle a peut-être un peu perdu du lustre qu’elle avait dans les grandes années Marriner, où elle enregistrait à tour de bras pour le défunt label Philips. Cela dit, sa forme du moment semble globalement plus attractive que le souvenir laissé par son précédent passage à Baden-Baden, en 2009, où ses membres nous avaient semblé un peu démotivés. Même si le petit effectif de cordes continue à manquer de quelques sonorités plus luxueuses, en particulier pour les violons 1, la petite harmonie recèle beaucoup d’individualités intéressantes, qui trouvent dans ce programme énormément d’occasions de briller. L’autre surprise vient de Jaime Martín, chef efficace dont la battue précise mais jamais exagérée retrouve bien les valeurs de fluidité de et de clarté qui furent longtemps celles de Neville Marriner à la tête de ces musiciens. La silhouette même du chef espagnol, sobrement campée et sans débordements gestuels, participe à cette même ambiance de musique de très haut niveau mais sans théâtralité ni aspérités excessives : un confort un peu passé de mode aujourd’hui, mais qui demeure tout à fait agréable.


Les Quatrième et Cinquième Symphonies de Mendelssohn bénéficient de lectures très aérées, où les vents n’ont aucun mal à se faire entendre par dessus un effectif de cordes relativement réduit. La vivacité des tempi de la Symphonie « Italienne » n’occasionne cependant aucune sécheresse, l’ensemble restant très lumineux, jamais astringent. Même légèreté, un peu moins en situation, dans la Symphonie « Réformation », où les chorals instrumentaux paraissent manquer un rien de massivité et d’esprit conquérant. La cérébralité du propos et ses tentations beethovéniennes semblent quelque peu pâtir d’une sonorité aussi svelte, mais Jaime Martín parvient néanmoins à ménager de belles progressions, en particulier dans les architectures complexes du quatrième mouvement, en évitant magistralement toute sensation d’ennui. Très beau bis aussi, le Scherzo du Songe d’une nuit d’été, où l’on retrouve la petite harmonie de l’Academy tout à son affaire, avec en premier lieu le flûtiste Michael Cox, d’une étourdissante virtuosité.


En milieu de concert, on fait connaissance avec Yulianna Avdeeva, qui a remporté en 2010 le premier prix du concours Chopin de Varsovie. Le programme souligne que cette jeune pianiste russe a été la première candidate féminine à remporter cette distinction depuis Martha Argerich, détail qui pourrait n’être qu’anecdotique mais qui prend plus de relief à l’écoute de ce tempérament effectivement hors du commun, qui nous rappelle un peu la pianiste argentine, moins peut-être par une interprétation exaltée que par une exceptionnelle franchise de toucher. Vraiment du grand piano, avec un exceptionnel éventail de nuances et une parfaite sécurité digitale, ce qui n’exclut pas une appréciable sensibilité d’approche. De quoi faire briller de tous ses feux un concerto rare (le Premier Concerto pour piano « officiel » de Mendelssohn, après quelques essais antérieurs sans numéro d’opus), dans une interprétation qui concilie à merveille un élan très juvénile et une remarquable musicalité des phrasés. En bis une piégeuse Fileuse, avec exactement la même faute de doigté qui se répète lors de la reprise du même passage... dans ce contexte d’absolue perfection, c’est réconfortant !



Laurent Barthel

 

 

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