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Unique Paris Théâtre des Champs-Elysées 10/15/2016 - et 13, 14 (Rotterdam), 17 (Luxembourg), 18 (Stuttgart), 19 (Freiburg), 20 (Keulen), 22 (Amsterdam), 23 (Rotterdam) octobre 2016 Béla Bartók : Concerto pour piano n° 3, Sz. 119
Gustav Mahler : Symphonie n°1 en ré majeur «Titan» Hélène Grimaud (piano)
Rotterdams Philharmonisch Orkest, Yannick Nézet-Séguin (direction)
Y. Nézet-Séguin
Cette fin de semaine à Paris après l’Orchestre royal du Concertgebouw d’Amsterdam à la Philharmonie de Paris (voir ici), c’était samedi soir au tour de l’Orchestre philharmonique de Rotterdam de se produire au Théâtre des Champs-Elysées avec son directeur musical jusqu’en juin 2018, Yannick Nézet-Séguin.
Le Troisième Concerto de Bartók est pour beaucoup son chef-d’œuvre concertant pour piano. Composé de trois mouvements vif/lent/vif comme au temps des classiques, il est ici bien servi par une Hélène Grimaud très à l’aise avec le côté percussif de l’œuvre des mouvements extrêmes, mais sans doute un peu moins dans le magnifique Adagio religioso, plus lyrique, et dans lequel on attendait plus de poésie. Le dernier mouvement, mené tambour battant par Yannick Nézet-Séguin, est particulièrement réussi, avec une belle osmose entre le chef et la pianiste. L’accueil très chaleureux du public laissait espérer un bis de la pianiste française mais il n’en fut rien: dommage!
Mais le grand moment de ce concert fut certainement une Titan de très belle allure. Tout au long des quatre mouvements, Yannick Nézet-Séguin insuffle à l’orchestre l’énergie qu’on lui connaît mais aussi, selon les moments, poésie, lyrisme ou mélancolie sans manquer ni de rubato ni de glissando! Tous les détails d’une partition foisonnante sont audibles grâce à une vraie transparence de la trame orchestrale. Réussissant particulièrement le premier mouvement, véritable laboratoire de l’œuvre ultérieure de Mahler, il a, dès son début, la judicieuse idée de placer les trompettes qui jouent la fanfare initiale hors scène, ce qui est de fort bel effet. Le deuxième mouvement met particulièrement en avant un exceptionnel pupitre de violoncelles, capables de magnifiques tutti parfaitement homogènes et de nuances extrêmes très réussies. Le troisième mouvement contient toute l’ironie et la mélancolie nécessaires. Quant au dernier mouvement, il est un feu d’artifice parfaitement conduit avec un vrai sens de la progression et de la construction. L’Orchestre philharmonique de Rotterdam se couvre de gloire tout au long d’une interprétation techniquement parfaite: les huit cors bien sûr, qu’on peut aussi admirer debout dans la toute fin comme le souhaitait le compositeur, les bois très sollicités et impeccables de musicalité et de précision, les cordes emmenées par le magnifique premier violon, les cuivres puissants mais jamais épais et les percussions toujours à leur juste place. Yannick Nézet-Séguin réussit de plus à adapter son interprétation à l’acoustique un peu sèche du lieu évitant toute saturation.
En bis, ces interprètes offrent à un public conquis une élégante Danse hongroise de Brahms, véritable carrefour entre Mahler et Bartók, comme l’explique le chef québécois avec son empathie habituelle.
Au total donc, un magnifique concert grâce à Yannick Nézet-Séguin, comme toujours, a-t-on envie de dire de ce chef dont la maîtrise ne cesse de ravir, mais aussi grâce à un Orchestre philharmonique de Rotterdam qui joue chaque fois un peu plus dans la cour des grands.
Gilles Lesur
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