About us / Contact

The Classical Music Network

Berlin

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Le retour de Seiji : ようこそ (#)

Berlin
Philharmonie
04/08/2016 -  et 10* avril 2016
Wolfgang Amadeus Mozart : Sérénade n° 10 en si bémol majeur «Gran Partita» K. 370a [361]
Ludwig van Beethoven : Egmont, opus 84: Ouverture – Fantaisie pour piano, chœur et orchestre, opus 80

Lotta Hultmark (soprano), Christina Seifert (mezzo-soprano), Roksolana Chraniuk (alto), Holger Marks (ténor), René Vosskühler (baryton), Axel Scheidig (basse), Peter Serkin (piano), Jonathan Kelly, Andreas Wittmann (hautbois), Wenzel Fuchs, Walter Seyfarth (clarinettes), Alexander Bader, Joachim Welz (cors de basset), Paolo Mendes, Andrej Zust, Stefan de Leval Jezierski, Georg Schreckenberger (cors), Stefan Schweigert, Mor Biron (bassons), Matthew McDonald (contrebasse)
Rundfunkchor Berlin, Gijs Leenaars (chef de chœur), Berliner Philharmoniker, Seiji Ozawa (direction)


S. Ozawa


Initialement, l’Orchestre philharmonique de Berlin devait donner trois concerts sous la direction de Zubin Mehta à l’occasion des quatre-vingts ans du maestro indien: au programme, Brahms, avec le Premier Concerto (Daniel Barenboim en soliste) et la Première Symphonie. Comme le déplora l’administration de l’orchestre, Mehta a annulé ses prestations pour des raisons personnelles et il a donc fallu lui trouver un remplaçant. Et quel remplaçant puisque ce n’est autre que Seiji Ozawa qui fut choisi pour diriger les Berliner Philharmoniker! Pour la petite anecdote, quelle ne fut pas notre surprise en ce dimanche de voir le retentissement que ce changement pouvait provoquer, les bandeaux d’information en continu Berliner Fenster que l’on peut suivre dans les rames de métro berlinois affichant la nouvelle de ces deux concerts assortie d’un grand portrait d’Ozawa sous le titre «Star-Dirigent Seiji Ozawa kehrt auf die Bühne zurück»!


Mais, effectivement, quel moment tant attendu pour tous les admirateurs du grand chef japonais – ils sont nombreux! – qui, pour l’occasion, fêtait là le cinquantième anniversaire de sa collaboration avec le célèbre orchestre puisqu’il le dirigea pour la première fois en janvier 1966 dans un programme associant la Première Symphonie de Beethoven, le Concerto pour piano de Schumann et la Symphonie «Mathis der Maler» de Hindemith. Depuis, il n’a cessé de travailler avec l’orchestre que ce soit à Berlin ou à travers le monde (c’est par exemple lui qui le dirige en 2008 dans de mémorables concerts dédiés à la mémoire de Herbert von Karajan pour le centenaire de sa naissance), lors des plus grands festivals (à Salzbourg, pour la première fois, le 2 août 1970 dans un programme Mendelssohn-Bartók-Beethoven, Salzbourg où il débuta justement en cette même année 1966 mais à la tête des Wiener Philharmoniker) ou de manifestations plus festives et populaires comme lors de concerts donnés à la Waldbühne de Berlin. Après avoir conduit le Philharmonique dans un programme Mendelssohn-Bruckner en janvier 2009 et dans un électrisant Elias de Mendelssohn toujours au mois de mai de la même année, Ozawa se tint longtemps éloigné des podiums pour de graves raisons de santé. Depuis quelques mois, il a néanmoins repris ses activités musicales mais de façon considérablement allégée, sur les conseils de ses médecins, ne dirigeant plus de longs programmes comme par le passé.


C’est ce qui explique que les œuvres initialement prévues aient été modifiées, le nombre de concerts passant en outre de trois à seulement deux, la Philharmonie étant évidemment comble à chacune de ces deux représentations. La première partie permettait de mettre en valeur les vents du Philharmonique avec la Sérénade «Gran Partita» (1781) de Mozart. Sous la double houlette de Jonathan Kelly et Wenzel Fuchs, respectivement hautbois et clarinette solo de l’orchestre, les treize musiciens offrirent une démonstration de finesse et d’équilibre, à peine troublée par quelques affectations de Fuchs dans certains traits de l’Adagio, sommet de l’œuvre dans l’absolu, sommet en l’occurrence grâce notamment à l’entrée du hautbois: moment surnaturel! N’ayant rien à démontrer du point de vue technique (l’art du détaché, la propreté du trait en dépit de la vitesse d’exécution comme ce Rondo conclusif), les musiciens firent pleinement prendre conscience au public du caractère d’orfèvre que Mozart a déployé dans cette composition, permettant un superbe jeu d’échanges entre les hautbois et les cors de basset dans le premier Menuetto ou offrant dans le second Menuetto une atmosphère digne d’un Ländler de Schubert.


Puis c’est un public d’emblée totalement enthousiaste qui accueille Seiji Ozawa en ce début de seconde partie. Le chef japonais, toujours aussi chétif mais assez fringant, toujours aussi souriant et comme souvent vêtu de sa tunique noire arborant un petit papillon blanc, est accueilli avec chaleur par tous, y compris l’orchestre qu’il entraîne tout de suite dans une incroyable Ouverture d’Egmont. Contrairement à d’autres chefs, Ozawa n’a pas oublié que le prétexte était un drame de Goethe et c’est justement cette noirceur, ce dramatisme qu’il met en exergue dès le premier accord, puissant et étonnamment long. Même si l’ensemble aurait pu bénéficier d’un plus grand élan, on est admiratif devant la houle orchestrale ainsi domptée et devant l’énergie que dispense Ozawa dans une pièce propre à mettre en valeur les sonorités berlinoises.


C’est ensuite au tour de la rarement donnée Fantaisie pour piano, chœur et orchestre, l’orchestre étant rejoint par le très réputé Chœur de la Radio mais aussi, malheureusement, par le pianiste Peter Serkin, fils de Rudolf Serkin avec qui Ozawa a souvent travaillé. Or, là, qu’entend-on? Un soliste au jeu boursouflé, maniéré à chaque note, cherchant l’effet dans le moindre trille, artificiel dans le phrasé et, qui plus est, d’une lenteur rédhibitoire. Or, comme c’est lui qui lance la pièce, ma foi, l’orchestre est bien obligé de suivre sauf à faire perdre toute cohérence à l’œuvre. Et c’est donc contraint, cela se voyait, que Seiji Ozawa a dû faire jouer le Philharmonique de Berlin dans un climat excessivement pesant, à la limite du sur-place tant le piano n’en faisait qu’à sa tête, Serkin étant perdu dans son propre miroir sans prendre en considération l’ensemble auquel il participait. C’est d’autant plus dommage que les six solistes vocaux étaient plutôt bons et le chœur excellent...


Tant pis. L’essentiel de ce concert était bien ailleurs et, lorsqu’il revint avec Serkin sur scène, c’était bien Seiji Ozawa la vedette, celui pour qui chacun ce soir s’était déplacé, celui auquel allaient l’ovation finale et les chaleureux applaudissements du chœur et de l’orchestre. Chacun aura donc apprécié à sa juste valeur la prestation de la soirée: l’étoile de Seiji brille plus que jamais dans le cœur des musiciens et des mélomanes.


(#) Bienvenue



Sébastien Gauthier

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com