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Aus Italien

Paris
Maison de la radio
03/24/2016 -  
Robert Schumann : Concerto pour piano en la mineur, opus 54
Richard Strauss : Aus Italien, opus 16

David Fray (piano)
Orchestre national de France, Riccardo Muti (direction)


R. Muti (© Silvia Lelli)


Début février, Riccardo Muti avait dû annuler plusieurs concerts à la suite d’une chute dans sa maison de Ravenne qui, après une opération à la hanche, l’avait contraint à prendre du repos: qui pourrait le croire en le voyant ce soir, fringant comme à son habitude, à la tête de l’Orchestre national de France pour ce concert, qui aurait dû être le troisième, le deuxième ayant été annulé et le premier placé il y a quelques semainessous la baguette d’Emmanuel Krivine? Et, sitôt les deux vedettes entrées sur scène, c’est par un bref discours du chef italien que débuta la soirée avec quelques mots en hommage aux victimes des attentats de Bruxelles et l’observation à sa demande d’une minute de silence par l’orchestre et le public, tous levés dans une communion intense et émouvante.


C’est fréquemment le cas: Riccardo Muti aime les «piliers» du répertoire mais également les raretés. Ce concert en était de nouveau la parfaite illustration puisqu’il débutait par le très traditionnel Concerto pour piano de Schumann, joué en famille, le jeune soliste, David Fray, n’étant autre que le gendre du chef puisqu’il a épousé la fille du maestro, Chiara Muti. On aurait donc pu s’attendre à une parfaite entente et à un résultat à la hauteur de cette collaboration prometteuse: malheureusement, il n’en fut rien. Côté orchestre, Muti dirige certes avec soin mais aussi beaucoup de retenue un National opulent et ronronnant, distillant de confortables sonorités, mettant notamment en exergue une petite harmonie toujours aussi agréable à écouter. De façon quelque peu étrange, certains crescendi ne sont pas conduits jusqu’au bout et certains forte surviennent donc par surprise, ne permettant pas aux cordes de s’illustrer comme on pourrait le souhaiter.


Quant au soliste, la déception aura été constante. Le jeu est lisse et inconsistant quand, au contraire, il n’est pas inutilement spectaculaire (au risque de conduire à de sérieux décalages comme en cette fin de troisième mouvement, décalages évités de justesse par le savoir faire de Muti qui recadre le tout avec autorité). Fray ne semble guère concerné par l’œuvre et en donne une interprétation sans aucune saveur qui, en fin de compte, aura été à la fois bien longue et bien ennuyeuse. Seul le bis, le choral de Bach en sol mineur Nun komm der Heiden Heiland (BWV 659) transcrit par Busoni (un morceau fétiche du jeune pianiste français comme en témoigne un récent concert), fut un moment de grâce, écouté dans un silence recueilli qui renvoyait plus ou moins consciemment à l’émotion ayant préludé au concert.


Après le très connu, voici venu le relativement méconnu, car a-t-on de nombreuses occasions d’entendre aujourd’hui en concert Aus Italien de Strauss? Oui si l’on suit Riccardo Muti, qui a eu l’occasion de l’enregistrer pour EMI mais aussi de le diriger dès 1968 et encore récemment, en janvier 2015, à la tête du Philharmonique de Berlin mais, sinon, avouons que cette «fantaisie symphonique» est plutôt une rareté. Pour preuve, le National ne l’a semble-t-il pas donnée depuis novembre 1997: c’était alors sous la direction de Pinchas Steinberg. Dans cette œuvre en quatre mouvements dédiée à Hans von Bülow, qui l’avait accueillie plus que fraîchement («Une erreur merveilleuse et enviable, la prodigalité d’idées, l’abondance d’associations, c’est tout» écrivait-il à Ritter en décembre 1887), l’orchestre doit briller de mille feux et force est de constater que le National est, contrairement à la première partie, transfiguré par la baguette magique de Muti. Car tout y est: dans le premier mouvement («A la campagne»), le cor solo d’Hervé Joulain est souverain, la harpe d’Emilie Gastaud féerique, le climat extatique du début formidable, la soixantaine de cordes offrant soudainement au public une incroyable plénitude sonore. Dans le deuxième mouvement («Dans les ruines de Rome») – (Strauss évoque ici l’impression grandiose ressentie notamment lors de la visite des thermes de Caracalla –,Muti fait des merveilles avec ces grandes masses orchestrales où le gentil marivaudage des bois côtoie avec subtilité les tutti éclatants des cuivres. Vite, précipitons-nous ensuite «Sur la plage de Sorrente», où le babillage des cordes et les douces mélopées des deux clarinettes évoquent parfaitement cette route escarpée mais ô combien séduisante qui serpente de Naples à Ravello en passant donc par Sorrente et Positano. Le dernier mouvement, fondé sur la célèbre mélodie napolitaine Funiculì, funiculà que Luigi Denza avait composée en 1880 à l’occasion de l’inauguration du funiculaire de Naples, permit à l’Orchestre national de France d’y jeter toute son énergie, la générosité sonore ne tombant jamais dans le vulgaire, chaque instrumentiste prenant un évident plaisir à jouer cette partition guidée une fois encore de main de maître par Muti.


Après avoir reçu les ovations attendues et méritées, l’Orchestre national de France confirmant pour l’occasion de vraies affinités avec la musique de Richard Strauss, le chef napolitain offrit un magnifique bouquet de fleurs à la première violoniste du rang Sumiko Hama-Prévost, dont c’était le dernier concert au sein de l’orchestre. Geste à la fois d’attention et de fidélité à l’égard d’une phalange où l’on espère le revoir dès la saison prochaine.


Le site de David Fray
Le site de Riccardo Muti


Le concert en intégralité sur Arte Concert:







Sébastien Gauthier

 

 

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