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Réincarnations sur scène

Vienna
Konzerthaus
02/11/2016 -  
Joseph Haydn: Sonates pour piano n° 39, Hob. XVI/24, et n° 47, Hob. XVI/32
Franz Liszt: Harmonies poétiques et religieuses, S. 173: 3. «Bénédiction de Dieu dans la solitude»
Johannes Brahms: Sept Fantaisies, opus 116
César Franck: Prélude, Choral et Fugue, M. 21
Serge Prokofiev: Sonate pour piano n° 7, opus 83

Denis Kozhukhin (piano)


D. Kozhukhin www.deniskozhukhin.com)


Le bâtiment du Konzerthaus était inhabituellement désert ce soir; une seule salle en opération sur les quatre disponibles – et dans cette salle de 700 places, de nombreux sièges vides. Un vainqueur du concours de la Reine Elisabeth, récemment acclamé aux côtés de Gergiev, dans un récital somptueux et habilement composé: que manquait-il pour attirer le public viennois?


Denis Kozhukhin est un pianiste que l’on pourrait qualifier de multidimensionnel: capable de s’adapter instantanément au style du compositeur, qu’il semble littéralement incarner sur scène (comme le démontrent en particulier ses lectures de Liszt et Prokofiev); capable de faire ressortir sans effort les différents niveaux de l’œuvre, aussi bien dans son architecture que dans les stratifications des voix; capable d’imposer son timbre sans écraser l’œuvre.


Les deux sonates de Haydn, qui ouvrent symétriquement chaque partie, sont jouées avec beaucoup de feu, à des tempi très véloces qui poussent la partition dans ses derniers retranchements: on est parfois à deux doigts de la précipitation, ce sera ici notre unique réserve, mais une technique impeccable permet au jeune Russe de ciseler la structure des phrases avec finesse et de mettre en valeur les irrégularités, accents et jeux de réponses qui parsèment les œuvres. On est ici à mille lieues d’une vision intime et raréfiée, où chaque note se savourerait depuis son attaque jusqu’à son extinction; c’est une puissance motrice fébrile qui nous emporte jusque dans les prestos finaux et annonce déjà la sonate de «guerre» de Prokofiev qui clôt le programme.


La pièce de Liszt «Bénédiction de Dieu dans la solitude» montre une toute autre facette de la personnalité de Denis Kozhukhin. On y retrouve certes son sens inné de la ligne, mais mis cette fois au service d’une noblesse sonore sans ostentation, qui efface toute velléité de virtuosité: l’esprit, la technique et le magnétisme de Liszt étaient tout trois réunis sur scène durant ces vingt minutes de musique.


On s’enfonce ensuite plus profondément dans le postromantisme avec un Brahms résolument germanique, aux sonorités généreuses habilement contrebalancées par des respirations amples et des étagements de nuances. Le Franck apparait en contraste plus clair, et moins impérieux. La Septième Sonate de Prokofiev constituait probablement la pièce de résistance du récital: Kozhukhin la propulse avec une inexorabilité musicale remarquable. Les tempi notamment sont choisis avec une extrême précision, lui permettant de caler les phrasés au fond des temps et de varier les timbres avec subtilité dans cette pièce diabolique. Le pianiste confirme ainsi son immense affinité avec le compositeur russe.


Le site de Denis Kozhukhin



Dimitri Finker

 

 

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