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Fascinant Trifonov

Paris
Maison de la radio
01/14/2016 -  
Edgar Varèse : Intégrales
Serge Prokofiev : Concerto pour piano n° 2, opus 16
Antonín Dvorák : Symphonie n° 8, opus 88, B. 163

Daniil Trifonov (piano)
Orchestre national de France, James Conlon (direction)


D. Trifonov (© Dario Acosta/Deutsche Grammophon)


Fidèle à Paris, James Conlon retrouve le National, après avoir dirigé la saison passée l’Orchestre de Paris. Et ils reviennent à Varèse, eux qui avaient donné Amériques il y a dix ans. Intégrales ouvre en effet le concert, dans une interprétation très imagée, jamais sèche, où le chef américain va au-delà des purs agrégats sonores pour trouver un sens, une trajectoire, avec la complicité de vents et de percussions impeccables. Il est vrai que l’orchestre se trouve dans un de ses bons jours : la Huitième de Dvorák témoigne d’un travail plus approfondi que la Première de Brahms une semaine auparavant, avec des cordes plus homogènes. Conlon, aussi, connaît et aime son Dvorák, lui dont on n’a pas oublié la superbe Rusalka à Bastille. C’est, de plus, un chef de haute école. La forme s’avère ici pleinement maîtrisée, dès l’Allegro con brio initial, à la fois charpenté et aéré, très souplement tenu, où il ne « germanise » pas la musique comme avait tendance à le faire Christoph von Dohnányi dans la Septième à la Philharmonie le mois dernier. La fraîcheur agreste, préservée notamment grâce aux couleurs des bois, alterne dans l’Adagio avec une puissance dramatique qui ne confine jamais à la lourdeur. Le jubilatoire finale renoue pertinemment avec le souffle euphorique du premier mouvement, le chef parvenant à enchaîner naturellement les différentes variations grâce à un équilibre entre rigueur formelle et liberté rhapsodique, jusqu’à une fin littéralement dionysiaque. On a moins aimé le Scherzo, un rien trop droit, trop carré, qu’on aimerait plus charmeur et plus dansant.


Mais beaucoup étaient surtout venus entendre Daniil Trifonov, le jeune prodige lauréat du concours Tchaïkovski en 2011, qui ne joue pas comme tout le monde et que tout le monde s’arrache, se colleter avec le redoutable Deuxième Concerto de Prokofiev – le plus long des cinq. Une musique barbare et agressive pour beaucoup de contemporains... Trifonov, lui, prend le parti contraire, à rebours de toute une tradition – installée par les Russes eux-mêmes. L’Andantino - Allegretto, d’emblée, surprend : tempo plus que mesuré, jeu fantasque, scriabinien, plus postromantique que moderniste, d’une grande clarté au demeurant. Il joue ensuite le Scherzo sur les pointes, avec une légèreté mendelssohnienne, sans noirceur grimaçante. Le reste est à l’avenant, la cadence de l’Allegretto tempestoso final tenant presque de l’étude pour sonorités opposées. Evidemment, à force de privilégier la variété raffinée des couleurs et la pâte sonore, une telle approche émousse le vitalisme motorique et souvent hérissé de la partition, finit par presque la déstructurer. C’est un peu étrange, mais toujours inventif, fascinant, bluffant même – curieux, aussi, ce corps-à-corps avec le clavier, qui transforme le pianiste en gnome. On se demande ce que cela donnerait avec un chef aussi fantasque que le pianiste : Conlon, lui, maintient la partition dans le droit chemin, lorgnant plutôt vers la grande tradition symphonique. Le bis surprend beaucoup moins : Trifonov joue en poète le Prélude opus 9 n° 1 de Scriabine, pour la main gauche.


Le site de Daniil Trifonov



Didier van Moere

 

 

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