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Défi relevé

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Opera Vlaanderen
11/19/2015 -  et 22, 25, 27, 29* novembre, 1er, 4 décembre 2015
Gioachino Rossini: Armida
Carmen Romeu (Armida), Enea Scala (Rinaldo), Robert McPherson (Gernando, Ubaldo), Dario Schmunck (Goffredo, Carlo), Leonard Bernad (Idraote, Astarotte), Adam Smith (Eustazio)
Koor Opera Vlaanderen, Jan Schweiger (chef de chœur), Symfonisch Orkest Opera Vlaanderen, Alberto Zedda*/Ryuichiro Sonoda (direction)
Mariame Clément (mise en scène), Julia Hansen (décor, costumes), Bernd Purkrabek (lumières)


(© Annemie Augustijns)


Bienvenue dans le monde merveilleux des anachronismes. Pour Mariame Clément, l’intrigue de la rare Armida (1817) de Rossini se déroule dans l’univers du football. Tantôt joueur, tantôt chevalier, Rinaldo, prénom de star du ballon rond, terrasse Gernando d’un coup de boule, comme Zidane. Des croisés au visage ensanglanté s’adonnent à la débauche avec une poupée gonflable, Goffredo ressemble à un directeur de club, Eustazio a un communicant. Et voici que paraissent, en seconde partie, des filles-fleurs, comme dans Parsifal, et que Rinaldo et Armida posent ensuite à leur côté, comme dans un montage photographique de Pierre et Gilles – un violoniste, qui sera fera abattre, accompagne leur romance en imitant, assez mal, le jeu de l’instrument. Au fond, ici, qui est Armida ? Peut-être une actrice, peut-être, simplement, une bimbo détenant quelque pouvoir. Peut-être, aussi, faut-il lire le programme, entièrement rédigé en néerlandais, pour tenter de comprendre le concept dans toute sa finesse.


A l’Opéra des Flandres, à défaut de convaincre entièrement, les productions sont, au minimum, intéressantes, le plus souvent, inhabituelles. C’est donc encore le cas, sauf que Mariame Clément a proposé, ici-même, en 2012, des mises en scène plus inspirées et probantes du Voyage à Reims et d’Agrippina, aux livrets, pour sa défense, autrement plus stimulants que celui-ci, inspiré de La Jérusalem délivrée du Tasse. Même Julia Hansen a dessiné, pour ces deux spectacles, de plus beaux décors : piètrement réalisée et mettant peu en valeur le potentiel des équipes techniques, cette scénographie laisse penser que le théâtre se soumet à des restrictions budgétaires. Il y a heureusement la musique, le plus souvent magnifique, notamment ce duo d’amour fabuleux entre Armida, taillé pour la Colbran, et Rinaldo, et les redoutables airs du rôle-titre, dont celui sur lequel s’achève le dernier acte.


Sur le plateau évolue une solide distribution. C’est qu’il faut du cran pour relever le défi. Carmen Romeu n’a pas la voix la plus raffinée et la plus souple du circuit mais elle incarne Armida en torche vive, plus soucieuse de crédibilité théâtrale que de beau chant, dont elle respecte peu ou prou les canons. Dans ce rôle exigeant, dans lequel s’illustrèrent, jadis, Maria Callas et, plus récemment, Renée Fleming, cette soprano au tempérament dramatique affirmé maîtrise ses ressources jusqu’à son air final, qu’elle affronte vaillamment. Ce bel opéra exige en outre plusieurs ténors de haut vol. D’une mâle assurance en Rinaldo, Enea Scala est le plus impressionnant des trois chargés des rôles principaux : ardente dans les aigus, charpentée dans le médium, la voix, râblée et virtuose, séduit sur toute la tessiture. Malgré une émission nasale, Robert McPherson confirme, en Gernando et Ubaldo, son statut de ténor rossinien capable de surmonter les difficultés sans perte de contrôle. Le chanteur américain, qui se produit souvent à Gand et à Anvers, projette plus puissamment sa voix que Dario Schmunck, ténor moins typé et agile qui adopte, cependant, le style qui convient. La distribution comporte deux membres de la troupe de jeunes de l’opéra : Leonard Bernad qui, en Idraote et Astarotte, pense à chanter, et pas seulement à imposer une voix de basse profonde et puissante, et Adam Smith qui a trop peu à accomplir en Eustazio pour s’illustrer.


Et dans la fosse s’active un expert. Après La Cenerentola (1999), Semiramide (2010), Le Voyage à Reims et Otello (2014), Alberto Zedda, quatre-vingt-sept ans, retrouve un orchestre aussi motivé que lui : direction, comme d’habitude, animée, contrastée, détaillée, nuancée. Le plus souvent précis, les cuivres et les bois assurent leur partie avec sang-froid, et ce dès l’Ouverture, durant laquelle les cordes paraissent d’abord émaciées avant de gagner progressivement en chaleur et en souplesse. Rossini n’épargne pas non plus les choristes, très en verve.



Sébastien Foucart

 

 

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