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Mystiques français

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Deauville (Salle Elie de Brignac)
04/19/2015 -  
Philippe Hersant : Im fremden Land
Olivier Messiaen : Quatuor pour la fin du Temps (*)

Amaury Coeytaux, David Petrlik (violon), Adrien Boisseau (alto), Volodia van Keulen (violoncelle), Guillaume Vincent (piano), Ensemble Messiaen (*): Raphaël Sévère (clarinette), David Petrlik (violon), Volodia van Keulen (violoncelle), Théo Fouchenneret (piano)


(© S. Guy)


La trésorière de l’association qui soutient de longue date et de façon indéfectible le festival de Pâques de Deauville – les Amis de la musique à Deauville – conseilla au public, lors de la présentation de sa dix-neuvième édition, de ne pas regarder, misonéiste, les dates de naissance des compositeurs à l’affiche pour ne pas s’effrayer à la vue de certaines d’entre elles. A vrai dire, il y a un public qui réagit heureusement différemment et est avide de découvertes voire passionné par la musique de son temps. ConcertoNet, depuis de nombreuses années, déplore même que la musique contemporaine n’occupe pas une place plus importante sur les pupitres des jeunes interprètes du festival. Il faut concéder qu’au début de la carrière, faire ses classes passe par les classiques du répertoire... En tout état de cause, l’affiche du présent concert, exclusivement vouée à la musique contemporaine, faisait justement exception, et sans déconvenue majeure côté public. Son programme était assez cohérent stylistiquement, rassemblant deux mystiques français même s’ils le sont de façon différente.


On entendit en effet tout d’abord une partition d’une quinzaine de minutes, Im fremden Land, pour clarinette, quatuor à cordes et piano (2002), composée par Philippe Hersant (né en 1948). Lyrique, très structurée, parfois véhémente, la pièce est clairement inspirée par le souvenir du dédicataire, le compositeur Olivier Greif (1950-2000), plusieurs fois entendu à Deauville (voir ici). Son esprit nostalgique lui confère comme des couleurs sépia, sans que l’on puisse parler de passéisme pour autant. Parmi ses cinq mouvements, son deuxième, une Totentanz, est sans doute le plus intéressant. Le piano, bruineux sous la pédale, y tente d’étouffer les cordes et leur thème juif. Le chant choral du final dévolu au quatuor à cordes, indéniablement théâtral, permet heureusement d’entrevoir une lueur d’espoir. Les interprètes sont tous excellents et montrent une cohérence exemplaire dans des pages où le respect (des morts, du passé) paraît être le maître mot.


Même chose pour le Quatuor pour la fin du Temps (1941) d’Olivier Messiaen (1908-1992), déjà entendu par deux fois, salle Elie de Brignac, la dernière en 2012. Si la «Liturgie de cristal» du début paraît manquer d’assurance et de netteté, la «Vocalise, pour l’Ange qui annonce la fin du Temps» permet d’entendre comme un murmure, aux frontières de silence, «Abîme des oiseaux» révélant un clarinettiste doté d’une palette de couleurs remarquable, à la discrète respiration et au chant envoûtant, parfois comme muet de stupéfaction devant le «silence de ces espaces infinis» pour reprendre les mots de Blaise Pascal. L’«Intermède» est aussi énergique que possible. La «Louange à l’éternité de Jésus» déçoit un peu, plus lyrique que spirituelle, la longueur d’archet du violoncelliste subissant quelques irrégularités sur la fin. La Danse de la fureur, pour les sept trompettes est l’occasion d’admirer la virtuosité des artistes et la parfaite mise en place des différentes voix, les interprètes assumant pleinement une belle prise de risque. Le «Fouillis d’arcs-en-ciel, pour l’Ange qui annonce la fin du Temps» est quant à lui lumineux. Enfin, la «Louange à l’immortalité de Jésus» fait entendre un violoniste peut-être manquant de précision mais certainement pas de Cœur et de goût. A l’issue, les cloches de l’église voisine n’avaient plus qu’à sonner.


A nouveau, un passionnant concert, donné devant un public attentif et finalement guère moins nombreux que la veille au soir.



Stéphane Guy

 

 

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