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Un défi au négationnisme

Dijon
Grand-Théâtre
03/11/2015 -  et 12, 13 mars 2015
Victor Ullmann : Der Kaiser von Atlantis, oder die Todverweigerung, opus 49
Christian Backhaus (L’Empereur Overall), Jonathan Sells (Le Haut-Parleur), Conrad Schmitz (La Mort), Simone Eisele (Le Tambour), Antoine Chenuet (Arlequin), Benjamin Alunni (Un soldat), Yvonne Prentki (Une jeune fille coiffée à la garçonne)
Robert Fischmann (flûte), Jaroslava Tajanovská (hautbois), Karel Dohnal (clarinette), Pavel Jordánek (saxophone alto), Marie Pacesová (trompette), Vít Nermut, Petr Vyoral (violon), Michaela Vyoralová (alto), Teodor Brcko (violoncelle), Jan Korínek (contrebasse), Jan Meisl (clavecin, piano), Sergey Pereliatnyk (harmonium), Mikhail Pashaiev, Vladislav Sosna (percussions), Antonín Dlapa (guitare, banjo), Mahály Menelaos Zeke (direction musicale)
Benoît Lambert (mise en scène), Antoine Franchet (scénographie, lumières, vidéo), Violaine L. Chartier (costumes), Marion Bidaud (maquillages et coiffures)


Après Brundibar en février, l’Opéra de Dijon programme en mars l’autre opus lyrique associé au camp de Terezín, Der Kaiser von Atlantis, le premier pour y avoir été joué, le second pour y avoir été écrit, participant à la réévaluation d’un corpus empreint d’une douloureuse mémoire historique, qui a retrouvé ces dernières années un juste retour de faveur de la part des scènes françaises. Au demeurant, si Lyon inscrit les deux ouvrages à la programmation de son festival de printemps, intitulé l’année prochaine «Pour l’humanité», l’institution dijonnaise n’a pas attendu pour inaugurer avec la pièce d’Ullmann un cycle musical et théâtral, sur une dizaine de jours, autour de la Seconde Guerre mondiale et de l’expérience concentrationnaire, «Résistance par les arts», avec un accent mis sur les créateurs tchèques, de Janácek à Capek.


Composé en captivité en 1943, mais créé seulement trente-deux ans plus tard, L’Empereur d’Atlantis prend les atours de la fable et de l’absurde pour porter une satire politique et sociale, avec une profondeur existentielle sinon métaphysique aussi originale que sa facture musicale, mêlant l’économie d’un Schönberg – on songe entre autres au Pierrot lunaire – aux emprunts au jazz, au cabaret, à Mahler parmi d’autres «musiques dégénérées», sans omettre une parodie de l’hymne allemand. Les aventures du dictateur Overall dans un royaume où la Mort refuse son office et laisse les hommes dans un état de guerre générale sans rémission fatale ne prêtent pas seulement à penser, à l’instar du théâtre brechtien, mais confondent aussi par leur poésie singulière, où affleurent les tracas quotidiens de la captivité, à l’instar d’Arlequin qui «ne change plus de jour depuis qu’il ne peut plus le faire avec la chemise». Au-delà de la dénonciation, s’affirme une volonté de vivre et de sens qui défie le négationnisme nazi, et Benoît Lambert l’a bien compris dans une mise en scène intensément théâtrale, nimbé dans la poussière de la précarité, où point à la fin l’éclaircie naïve d’un soleil d’enfant dessiné en toile de fond. Soulignons à ce titre le travail scénographique d’Antoine Franchet comme les costumes de Violaine Chartier.


La physionomie particulière que les circonstances d’élaboration ont donnée à L’Empereur d’Atlantis le rend tout à fait pertinent pour de jeunes solistes, et l’Opéra de Dijon n’a pas manqué de saisir cette opportunité en confiant les rôles de cet ouvrage condensé aux membres de son académie, lesquels démontrent un bénéfique sens de la caractérisation. Christian Backhaus en témoigne en Empereur Overall tout comme Jonathan Sells, Haut-Parleur déclamatoire à souhait. Conrad Schmitz et Antoine Chenuet forment un duo savoureux, respectivement La Mort et Arlequin. Apprécions encore le Tambour de Simone Eisele, comme l’attachant couple du soldat et de la jeune fille – Benjamin Alunni et Yvonne Prentki, sans oublier le travail de Mahály Menelaos Zeke, à la tête d’une formation instrumentale sensible au foisonnement de l’inventivité de l’ouvrage.



Gilles Charlassier

 

 

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