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Schönberg en berlinoise compagnie

Bordeaux
Grand Théâtre
11/19/2014 -  et 20, 22, 23* novembre 2014
«Pierrot lunaire cabaret 30»
Arnold Schönberg : Pierrot lunaire, opus 21
Mischa Spoliansky : Alles Schwindel: Ouverture, «Das Lied der Gesellschaft» & Prélude – Es liegt in der Luft: «L’Heure bleue»
Michel Lévine : Ma chair frissonne
Ralph Maria Siegel : Ich habe noch einen Koffer in Berlin
Friedrich Höllander : Der blaue Engel: «Ich bin von Kopf bis Fuss auf Liebe eingestellt» et «Ich bin die fesche Lola» – Wir wollen Alle wieder Kinder sein
Kurt Weill : Aufstand und Fall der Stadt Mahagonny: «Alabama-Song»
Norbert Schultze : Military – Lili Marleen
Georg Crumb : Sonate pour violoncelle (Improvisation autour du deuxième mouvement)
Stéphane Rougier : Improvisation au violon
Nicolas Farine : Improvisation au piano

Julia Migenes (soliste)
Musiciens de l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine: Stéphane Rougier (violon et alto), Zorica Milenkovic (flûte), Stéphane Kwiatek (clarinette), Aurélienne Brauner (violoncelle), Nicolas Farine (direction musicale et piano)
Stephan Grögler (conception, scénographie, installation lumineuse et mise en scène), Véronique Seymat (costumes)


Présenté au Grand Théâtre par l’Opéra national de Bordeaux dans le cadre de l’édition 2014 dont il est l’un des temps forts, le «Pierrot lunaire cabaret 30» conçu par Stephan Grögler à La-Chaux-de-Fonds en 2012 autour de l’opus – presque – éponyme de Schönberg – qu’il resitue au cœur de créativité berlinoise des années vingt et trente, dont il peut être considéré comme l’une des matrices – repousse autant les limites du genre que du plateau. C’est en effet du haut du grand escalier de l’édifice de Victor Louis que Julia Migenes ouvre le spectacle, jouant du haut-de-forme et de la complicité avec l’auditoire réuni autour, sur les marches ou contre les piliers. Dès les pièces de ce prélude en avant-scène jouant habilement des codes de la revue, le jeu proposé par la soliste américaine fait vivre plus qu’elle ne restitue un improbable et mouvant équilibre entre théâtre et musique. Prenant appui sur la relative raucité de son timbre, la déclamation n’exagère point la gouaille et sait flirter avec la vocalité dans le «Lied der Gesellschaft» ou «Ich habe noch einen Koffer in Berlin».


Le temps de laisser le public rejoindre la salle et de s’y installer sans hâte, c’est devant une haie de boules luminaires que l’on retrouve Julia Migenes. Intime jusque dans ses tons nocturnes, la poésie économe de la scénographie épouse les inflexions du texte, et celles de la soliste, dès les premiers accents du «Mondestrunken», soutenant les étrangetés de lyrisme, sans en exagérer la morbidité aux confins du macabre. Entre les trois parties divisant également les vingt-et-un morceaux du mélodrame, on a inséré des interludes de cabaret, prolongeant le fil tissé à l’entrée: plus qu’une mise en perspective, le contraste dans l’alternance avec le Schönberg souligne, sans l’isoler, le fantasque onirisme de l’ouvrage, par des éclairages plus chauds, comme une halte où le matériel n’est que la coulisse d’un rêve aux tons bleutés. L’apparence disparate n’altère en rien la cohérence de l’ensemble – au contraire.


On appréciera autant l’improvisation de Stéphane Rougier que celle de Nicolas Farine au piano, ou encore les variations d’Aurélienne Brauner sur un mouvement de la Sonate pour violoncelle seul de Crumb. L’«Alabama Song» de Weill fait résonner un ton décidé tandis que Lili Marleen s’évanouit dans de mélancoliques chuchotements. Plus chanter parlé que parler chanté sans doute, l’interprétation de Julia Migenes refuse, de concert avec le souci de l’émotion de la conception générale, d’enfermer la partition dans l’intellectualisme, et l’on sent autant la violence insistante des «Croix» que l’évanescence du «Vieux parfum» après lequel se dissipe cette enivrante traversée. Coordonnant les interventions des quatre musiciens de l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine, Nicolas Farine confirme une intelligente sensibilité que l’on avait déjà remarquée la saison passée à Nantes dans La Rose blanche, autre réalisation de Stephan Grögler, preuve que les sentiers non battus méritent d’être explorés. En cela, Novart a ici parfaitement rempli son cahier des charges.



Gilles Charlassier

 

 

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