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Rain ou la répétition en gestes et en images

Paris
Palais Garnier
10/24/2014 -  et 23, 25*, 26, 28, 30, 31 octobre, 2, 3, 4, 6, 7 novembre 2014
Anne Teresa de Keersmaeker : Rain
Steve Reich : Music for Eighteen Musicians

Valentine Colasante*/Juliette Hilaire (Martha), Laura Bachman*/Camille de Bellefon (Fumyo), Amélie Lamoureux*/Laurence Lafon (Ursula), Christelle Granier*/Letizia Galloni (Rosalba), Léonore Baulac*/Charlote Ranson (Alix), Sae Eun Park*/Séverine Westermann (Taka), Muriel Zusperreguy*/Caroline Robert (Cynthia), Vincent Chaillet*/Jérémy Loup-Quer (Igor), Daniel Stokes*/Adrien Couvez (Clinton), Nicolas Paul*/Marc Moreau (Jakub)
Synergy Vocals, Ensemble Ictus, Georges-Elie Octors (direction musicale), Alex Fostier (ingénieur du son)
Jan Versweyveld (décors et lumières), Dries van Noten (costumes)


(© Benoîte Fanton/Opéra national de Paris)


La musique répétitive ne se limite pas à son accessibilité hypnotique, et constitue un excellent terreau pour la danse: Anne Teresa de Keersmaeker en témoigne. Après avoir mis des pas sur Drumming en 1998, elle lui donne, trois ans plus tard, un pendant avec Rain, sur Music for Eighteen Musicians, composant ainsi une sorte de diptyque Reich. Il a fallu une décennie de plus pour que le second offre à la Flamande une tribune sur la scène de l’Opéra national de Paris.


Si l’on reconnaît aisément les cellules thématiques organisant la motricité obsessionnelle de la musique de Reich, confinant à une extatique immobilité aux possibles vertus sédatives, la consistance de l’effectif – violon, violoncelle, deux clarinettes jouant également l’avatar basse, quatre voix de femmes traitées au microphone, quatre pianos, trois marimbas, deux xylophones et un métallophone – donne à l’ensemble une densité nouvelle par rapport à Drumming. L’exotisme très minimaliste années soixante-dix prend alors une tournure plus «symphonique», jouant ainsi d’effets de plénitude, sinon de saturation acoustique. L’Ensemble Ictus rend cela de manière fort pertinente, sous la direction de Georges-Elie Octors, et appuyé par l’ingénierie d’Alex Fostier.


L’ouvrage constitue ainsi un support dynamique pour l’écriture gestuelle d’Anne Teresa de Keersmaeker. Quoique désignés dans le cast par le nom d’un personnage, les dix solistes évoluent surtout comme des identités formelles, esquissant entre elles des rapports plus ou moins constants – on peut y deviner çà et là les intermittences du cœur ou de l’amitié, sans qu’une telle interprétation ne force la perception sémiologique ou esthétique –, pour mieux offrir au spectateur leur géométrie combinatoire, miroir des lignes inscrites sur le sol du plateau, dont la mathématique qui s’inscrirait dans les proportions humaines a probablement peu à voir avec Leonardo da Vinci et la Renaissance. Tout au moins peut-on se laisser porter, voire bercer, par la pulsation renouvelant régulièrement la configuration des groupes, bégayant parfois vers de faux saluts comme un tremplin pour mieux reprendre l’algorithme des ébats chorégraphiques.


Dû à Jan Versweyveld, l’aspect scénographique contribue à l’aspect apaisant de l’expérience proposée, avec ses douces modulations lumineuses, et son décor unique de filaments suspendus par les cintres, dessinant un rideau de pluie – d’où vraisemblablement le titre de la pièce – qui délimite le cercle théâtral, que l’on balaie parfois d’un bras, emporté dans la rotation d’un mouvement de sortie. Les clins d’œil ne manquent manifestement pas, et les amateurs s’en font l’écho, comme d’une satisfaction qui compense une demande plus en phase avec les dimensions de Garnier que d’autres grands piliers du répertoire, qui se verraient bien repousser ceux de la salle.



Gilles Charlassier

 

 

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