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Szymanowski enfin complet

Cracow
Philharmonie
10/18/2014 -  
Karol Szymanowski : Ouverture de concert opus 12 – Extrait de Hagith, opus 25 – Chants d’amour de Hafis, opus 26 – Symphonie n° 4, opus 60
Wioletta Chodowicz (soprano), Rafal Majzner (ténor), Urszyua Kryger (mezzo-soprano), Ewa Kupiec (piano)
Orkiestra Filharmonii Krakowskiej, Michal Dworzynski (direction)


M. Dworzynski (© Chris Christodoulou)


L’édition critique des œuvres de Debussy, en France, n’est pas encore achevée : le premier tome a paru en 1985 et l’on attend encore la musique de chambre, Pelléas et Mélisande... En Pologne, la parution de Hagith vient de mettre un point final à l’édition des œuvres complètes de Szymanowski, qu’avait inaugurée, en 1965, le Stabat Mater. Teresa Chylinska aura mis cinquante ans pour venir à bout de cette immense tâche, que lui avaient confiée les Editions polonaises de musique. Parcourant le monde à la recherche de documents et de témoignages, elle a également édité la Correspondance du compositeur, une somme de huit mille pages environ, ainsi que ses Ecrits, avant de rédiger une monographie de référence, véritable Bible pour les chercheurs.


Le concert Szymanowski donné le 18 octobre à la Philharmonie de Cracovie, ville où les Editions polonaises de musique se sont installées après la guerre, était donc un événement. Très pertinemment, le programme mettait en perspective l’ensemble de l’œuvre et de la carrière du compositeur, de l’Ouverture de concert de 1905 à la Symphonie concertante pour piano et orchestre de 1932 en passant par les Chants d’amour de Hafis de 1914 : un itinéraire fait d’évolutions successives plus que de ruptures brutales, quoi qu’on dise souvent. Au pupitre, le directeur de l’orchestre maison depuis la saison dernière : Michal Dworzynski, un des meilleurs chefs de la jeune génération – on l’a déjà entendu, en France, avec l’Orchestre national de Lyon et l’Orchestre national d’Ile-de-France. La phalange cracovienne a retrouvé grâce à lui un niveau d’homogénéité et d’excellence qu’on ne lui avait pas toujours connu.


L’Ouverture de concert cravache, très narrative, animée d’un irrésistible élan juvénile, plus proche que jamais du Don Juan straussien, mais impeccablement tenue, sans concession au pathos, avec cette clarté des textures caractéristique de Szymanowski, même dans l’exaltation dionysiaque. Les quelques mesures du duo d’amour de Hagith, ce premier opéra où le compositeur lui-même disait craindre sa « straussomanie », assez artificiellement extraites d’un ouvrage très durchkomponiert, constituaient avant tout un clin d’œil à l’achèvement de l’édition complète, pas très bien servis d’ailleurs par Wioleta Chodowicz en Hagith, pourtant familière du rôle titre, et Rafal Majzner en Jeune roi.


Les Chants d’amour de Hafis, en revanche, premier témoignage de l’impressionnisme orientalisant de Szymanowski à partir de 1914, sont d’une autre eau : un chef-d’œuvre pour le coup, et une interprétation de premier ordre. Urszula Kryger, comme Liedersängerin, ne connaît guère de rivale en Pologne : pureté de la voix et de la ligne de chant, maîtrise du souffle, souplesse de l’émission, avec des aigus aisés, même chantés pianissimo comme à la fin des « Perles de mon âme », sens de la relation entre le mot et le texte. Le chef allège son orchestre, tisse un subtil réseau de lignes et de timbres, il ne lui manque qu’un peu de sensualité.


Avec l’indépendance de la Pologne, Szymanowski renouvelle son inspiration, puisant le plus souvent dans la musique des monts Tatras alors qu’il perpétue les grandes formes de la tradition. Ainsi en est-il de la Symphonie concertante, écrite à son usage pour assurer un quotidien de plus en plus difficile. La direction concilie le vitalisme souvent percussif de la partition et ses relents impressionnistes, assurant ainsi l’équilibre de la structure – elle évite le double écueil du décousu et de la massivité. Ewa Kupiec, elle, privilégie avant tout la clarté et l’énergie, sans dureté mais parfois au détriment des couleurs.



Didier van Moere

 

 

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