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Une fête de l’intelligence et de la sensibilité

Paris
Salle Pleyel
02/10/2001 -  

Iannis Xenakis : Metastasis
Henri Dutilleux : L’Arbre des songes
Johannes Brahms : Symphonie n° 2, opus 73

Renaud Capuçon (violon)
Orchestre philharmonique de Radio France, Myung-Whun Chung (direction)

Les musiciens saluent d’abord la mémoire de Xenakis, hommage bienvenu rendu en présence de sa femme Françoise, au travers de Metastasis, l’une de ses partitions emblématiques, qui, lors de sa création en 1955 à Donaueschingen sous la direction de Rosbaud, lui valut une notoriété immédiate.


Ceci étant, Chung, s’il rend avec probité l’intensité de cette pièce inspirée, de l’aveu même du compositeur, par les années noires de l’Occupation, manifeste sans doute davantage d’affinités avec la poésie raffinée de L’Arbre des songes. Est-ce la présence de Dutilleux dans la salle? est-ce le fait de jouer avec la partition? est-ce l’acoustique une fois de plus défaillante de la Salle Pleyel? est-ce l’écriture de ce concerto pour violon, qui unit étroitement le soliste à l’orchestre? Toujours est-il que le jeu de Renaud Capuçon, d’une grande retenue, ne vise pas à s’imposer. Finesse de la sonorité (ce n’est sans doute pas par hasard qu’il joue un Stradivarius ayant appartenu à Kreisler), réserve, parfois même à la limite de la fragilité, ne sont en rien déplacées: non seulement elles n’excluent ni un (post)romantisme (schön)bergien, ni une virtuosité et une précision remarquables (Dutilleux révèle d’ailleurs qu’il a attentivement étudié Paganini, Enesco ou Ysaÿe), mais elles constituent probablement le meilleur sésame pour accéder à un compositeur et à une musique dont la caractéristique principale serait la pudeur dans l’expression.


Jean-Pierre Derrien, qui assistait également à ce concert, devait rappeler au cours d’une émission présentée le soir même sur France Musiques que Xenakis lui avait déclaré, voici quelques années, que son compositeur de prédilection n’était autre que... Brahms. Dans la Deuxième symphonie, Chung sidère une fois de plus par la cohérence de sa vision et par sa capacité à renouveler l’interprétation d’un pilier du répertoire symphonique, sans pour autant verser dans la facilité ou dans la recherche du détail gratuit. Comme de coutume, cette hauteur de vues se conjugue avec la maîtrise absolue de tous les ingrédients (puissance, timbres, équilibre entre les pupitres), le souci de ne rien laisser au hasard et l’organisation d’un discours clairement structuré. A la tête d’un ensemble très fourni (soixante-dix cordes, bois doublés) et adoptant des tempi très modérés (18 minutes pour le seul allegro non troppo initial, sans la reprise), il ne cède pourtant jamais à l’emphase ou l’empâtement. Ce parti pris de lenteur, surmonté grâce à des phrasés très soignés, n’est pas celui de Celibidache ou de Giulini: bien loin d’enfermer cette œuvre dans un moule métaphysique ou contemplatif, Chung parvient ici à en restituer avec une grande limpidité les climats successifs.


Cette rare association de l’intelligence et de la sensibilité, tant du point de vue du programme que des interprètes, emporte l’adhésion enthousiaste de l’Orchestre philharmonique, dont les cordes (beaux violons et violoncelles) et les bois (merveilleux solistes) se sont particulièrement illustrés au cours de la soirée.


Concert diffusé sur France Musiques le lundi 19 février à 20 heures.




Simon Corley

 

 

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