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Le littéral et l’original

Strasbourg
Palais universitaire de Strasbourg (Aula)
10/07/2014 -  
Francesco Filidei : Missa super l’Homme Armé
Josquin Desprez : Missa l’homme armé sexti toni

Les Cris de Paris, Geoffroy Jourdain (direction)
Daniel Knipper (lumières)


Rendez-vous incontournable de la création contemporaine dans sa diversité depuis plus de trente automnes, Musica ne se limite pas au répertoire des XXe et XXIe siècles. Le festival sait aussi jeter des ponts entre les époques, ainsi qu’en témoigne le concert donné par Les Cris de Paris dans l’Aula du Palais universitaire de Strasbourg. Placé sous le signe de L’Homme armé, chanson profane qui connut une immense fortune à la fin du Moyen Age et au début de la Renaissance, inspirant maints compositeurs qui l’ont réutilisée en cantus firmus pour la liturgie, le programme mêle de manière originale la Missa l’homme armé sexti toni de Josquin Desprez à une création sonore de Francesco Filidei, Missa super l’Homme Armé. Cette dernière prend au pied de la lettre le texte de la matrice populaire, en concevant une pièce pour un arsenal militaire, sinon guerrier – armes à feu, bombes lacrymogènes, sirènes, sifflets, gilets pare-balles.


Mais plutôt qu’une juxtaposition du littéral et de l’original, Les Cris de Paris, commanditaire de cette page surprenante, écrite en 2010 pour un spectacle chorégraphique, et donnée ici pour la première fois dans une version révisée, ont choisi de récréer un office inédit mis en lumières par Daniel Knipper, où les deux œuvres se répondent au fil de la succession des cinq séquences dont chacune est composée. Le contraste ne s’en montre que plus saisissant, entre la gestation de climax qui se concluent par des coups de feu parfois en rafale chez Filidei – en particulier dans les trois premiers mouvements, «Entrée», «Offertoire» et «Consécration», quand bien même la coda du deuxième sur le thème de L’Homme armé s’aventure aux confins du murmure – et l’homogénéité de la polyphonie de Desprez, d’une belle lisibilité, que Geoffroy Jourdain et ses solistes font remarquablement ressortir – évidente dans le Kyrie et le Gloria, d’une économie à la mesure de son inventivité. Après une «Communion» jouant avec des bribes du motif dont l’auditeur peut s’ingénier à retrouver les pistes, la «Sortie» frappant sur de faux gilets pare-balles accentue l’opposition avec l’Agnus Dei serein de Desprez qui la précède. Indéniablement, le concert possède une dimension performative, voire spectaculaire, et à l’occasion décalée, suscitant des sourires dont il n’est pas exclu qu’ils soient plus de connivence que d’ironie. A cette aune-là, le ministère exercé en l’Aula du Palais universitaire de Strasbourg fonctionne, et c’est l’une des vertus d’un festival comme Musica d’en offrir l’opportunité. Cela ne garantit pas cependant qu’un tel projet résiste à la fixation discographique.



Gilles Charlassier

 

 

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