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Musiciens en guerre (1)

Prades
Arboussols (Prieuré de Marcevol)
08/08/2014 -  
Rudi Stephan: Grotesque pour violon et piano [1]
Claude Debussy: Sonate n° 1 pour violoncelle et piano [2]
Alban Berg: Quatre Pièces pour clarinette et piano, opus 5 [3]
Albéric Magnard: Quintette en ré mineur, opus 8 [4]

Patrick Gallois [4] (flûte), Jean-Louis Capezzali [4] (hautbois), Michel Lethiec [3], Isaac Rodriguez [4] (clarinette), Carlo Colombo [4] (basson), Mark Gothoni [1] (violon), Frans Helmerson [3] (violoncelle), Emmanuel Strosser [4], Oliver Triendl [1, 2, 3] (piano)


O. Triendel, M. Lethiec (© Nemo Perier Stefanovitch)


Journée du souvenir des deux guerres mondiales au festival Pablo Casals: avant d’en venir à la seconde, le soir en l’abbaye Saint-Michel de Cuxà, le concert de l’après-midi, intitulé «L’Europe des ténèbres», évoque la «grande guerre» au prieuré de Marcevol (XIIe), au milieu de vues à couper le souffle sur le massif du Canigou et les environs, au travers d’un programme intelligemment conçu par Michel Lethiec, directeur artistique du festival, qui le présente de façon très vivante au nombreux public réuni dans l’édifice roman.


Rudi Stephan (1887-1915), comme le Britannique George Butterworth (1885-1916), mourut sur le front – d’autres en revinrent, tel André Caplet (1878-1925), engagé volontaire, mais ne s’en remirent jamais vraiment. La musique du compositeur allemand a été redécouverte depuis une vingtaine d’années, notamment les deux Musiques pour orchestre, le Liebeszauber pour baryton et orchestre ainsi que l’opéra Les Premiers Hommes. La courte et versatile Grotesque (1911) pour violon et piano, souvent grinçante, parfois lyrique, confirme, sous l’archet de Mark Gothoni et les doigts d’Oliver Triendl, la perte d’un grand talent, encore fidèle à l’esthétique postromantique d’un Korngold ou d’un Schreker.


Pendant la guerre, Debussy laissa libre cours à son nationalisme exacerbé, cultiva son antigermanisme et revendiqua haut et fort sa qualité de «musicien français». En témoigne la série de six Sonates dont il ne put achever que les trois premières et qui débute avec la Sonate pour violoncelle et piano (1915): nulle allusion au conflit, pour autant, dans ces pages – à la différence d’En blanc et noir, exactement contemporain – mais un projet ralliant à une cause contemporaine un âge d’or de la musique française. Enchaînant sans interruption les trois brefs mouvements, Frans Helmerson est un peu défavorisé par l’acoustique, au profit du piano d’Oliver Triendl, mais au lendemain de Philippe Muller, que voilà encore du beau violoncelle, impeccable de tenue stylistique!



A partir de 1915, Berg passa la guerre sous les drapeaux mais put néanmoins commencer à s’intéresser très activement à un modeste soldat du siècle précédent. Car un événement capital s’était produit en mai 1914: ayant assisté à une représentation de Wozzeck, il s’était décidé à adapter et à mettre en musique la pièce de Büchner. Quelques mois plus tôt, à l’âge où disparut Rudi Stephan, il avait affirmé sa personnalité, en peu de notes mais avec une grande densité, dans ses Cinq Pièces pour clarinette et piano (1913): Michel Lethiec en exalte l’expression et les couleurs, et il est difficile ne pas entendre dans les abîmes de la dernière pièce un caractère sombrement prémonitoire.


Magnard périt le 3 septembre 1914 en défendant face à l’armée allemande sa propriété isarienne de Baron. Vingt ans plus tôt, son Quintette en ré mineur (1894) réunissait autour du piano une formation un peu inhabituelle – flûte, hautbois, clarinette, basson – et trahit l’influence de Vincent d’Indy, l’un de ses maîtres, même si toute la noblesse et la générosité typiques de sa musique sont déjà là. Les souffleurs réunis pour l’occasion sont remarquables, la clarinette d’Isaac Rodriguez et le basson de Carlo Colombo ne ratant pas les importants solos qui leurs sont dévolus respectivement dans les deuxième et quatrième mouvements, et le piano d’Emmanuel Strosser fait merveille, mais le lieu sature dans les tutti, en particulier lorsque la flûte de Patrick Gallois monte dans l’aigu.


Le site du prieuré de Marcevol
Le site de Patrick Gallois



Simon Corley

 

 

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