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Il faut que tout change pour que rien ne change

Prades
Codalet (Abbaye Saint-Michel de Cuxà)
08/07/2014 -  
Ludwig van Beethoven: Sonate pour violoncelle et piano n° 4, opus 102 n° 1 [1]
Franz Schubert: Quatuor n° 8, D. 94 [2]
Toshio Hosokawa: Trio avec piano [3]
Maurice Ravel: Trio avec piano [4]

Olivier Charlier [3], Mihaela Martin [4] (violon), Philippe Muller [1], Arto Noras [4], François Salque [3] (violoncelle), Itamar Golan [4], Emmanuel Strosser [1, 3] (piano), Quatuor Artis [2]: Peter Schuhmayer, Johannes Meissl (violon), Herbert Kefer (alto), Othmar Müller (violoncelle)




Pour le visiteur qui reviendrait au festival Pablo Casals après quelques années d’absence, rien n’a apparemment changé, ce dont nul ne songerait au demeurant à se plaindre: Françoise Lethiec dirige toujours l’Académie où jeunes instrumentistes et formations constituées de tous les pays bénéficient des classes de maître données par les artistes du festival; le régisseur général, Jean-Pierre Lagard, est toujours au four et au moulin; les musiciens portent toujours des vestes blanches; Michel Barret, vice-président de l’association organisatrice, alias «le général» , veille toujours jalousement au placement des invités; les concerts se déroulent toujours à 17 heures, dans les villages environnants, et à 21 heures, essentiellement en l’abbaye Saint-Michel de Cuxà ou en l’église Saint-Pierre de Prades; à l’abbaye, durant l’entracte, les spectateurs peuvent toujours se régaler de pâtisseries maison et jus de fruits locaux; le concours de composition, créé en 2005, décerne toujours son prix, tous les deux ans au printemps, à une œuvre de musique de chambre; last but not least, le directeur artistique, Michel Lethiec, préside toujours aux destinées de la manifestation fondée par Casals en 1950.



Mais le clarinettiste a fait sienne la fameuse maxime du Guépard: «Il faut que tout change pour que rien ne change.» Donc tout change d’une année sur l’autre, à commencer par la thématique générale présidant à ces deux semaines: la soixante-deuxième édition, du 25 juillet au 13 août, est ainsi intitulée «Musiciens sans frontières», faisant sienne une belle pensée de Casals – «L’amour d’un pays est une chose magnifique, mais l’amour devrait-il s’arrêter à la frontière?» – qu’elle décline en trente concerts (sans compter les neuf offerts par les étudiants de l’Académie), quatre conférences, deux projections, des «moments musicaux improvisés» au musée de Céret et un «jeu de piste musical dans Prades» pour les enfants. Lethiec conçoit des programmes astucieux et originaux, où des compositeurs rares – par exemple Paisiello, Cimarosa, Rebecca Clarke, Rudi Stephan et même Jean-Jacques Rousseau – côtoient des œuvres contemporaines.


En même temps, rien ne change, bien sûr: les grandes œuvres du répertoire – de Bach à Chostakovitch en passant par Haydn, Mozart, Beethoven, Schubert, Mendelssohn, Brahms et Ravel – sont toujours à l’affiche, de même que les fidèles – les violonistes Olivier Charlier et Mihaela Martin, les altistes Nobuko Imai et Bruno Pasquier, les violoncellistes Frans Helmerson, Philippe Muller, Arto Noras et François Salque, le flûtiste Patrick Gallois, le hautboïste Jean-Louis Capezzali, le corniste André Cazalet, les pianistes Itamar Golan et Emmanuel Strosser, les Quatuors Artis et Talich...



M. Martin, I. Golan, A. Noras (© Nemo Perier Stefanovitch)


L’abbaye (Xe) demeure à la fois le lieu emblématique du festival et l’un de ses attraits, notamment le vaste cloître (XIIe) à demi reconstitué où il fait bon déambuler avant le concert ou durant la pause. Dans l’esprit du fondateur, la quintessence de la musique de chambre continue d’y résonner, ce que montre d’emblée la Quatrième Sonate (1815) de Beethoven, magnifiée par Philippe Muller, immense artiste que le non moins immense pédagogue – digne successeur de son maître André Navarra au conservatoire de Paris – a quelque peu occulté: musicalité hors pair, maîtrise de l’expression, clarté de la sonorité, il n’en empoigne pas moins avec énergie les ruptures beethovéniennes, soutenu par Emmanuel Strosser, tout en finesse et parfaitement en phase. Exactement contemporain, le Huitième Quatuor (1814) n’est pas l’œuvre la plus captivante de Schubert, mais elle est idéalement servie par le naturel, la qualité instrumentale et l’élan juvénile des Viennois du Quatuor Artis, dont les violonistes et l’altiste, comme de coutume, jouent debout.


La seconde partie de ce concert sous-titré «D’un siècle à l’autre» se projette à tout juste deux cents ans puis cent ans en avant, pour deux trios avec piano de nature très différente. Créé au festival Musica de Strasbourg en septembre dernier par le Trio Arbós, le Trio avec piano (2013) de Toshio Hosokawa (né en 1955) est, en réalité, sa seconde contribution au genre, après Memory, écrit en 1996 en hommage à son maître Isang Yun, disparu l’année précédente. Partant d’une note pianissimo que les trois instruments reprennent à l’unisson, ces 10 minutes d’un seul tenant évoluent de la méditation vers un paroxysme violent avant de revenir à un climat plus contemplatif, sans toutefois donner l’impression – nonobstant l’implication d’Emmanuel Strosser, Olivier Charlier et François Salque – d’éviter des formules déjà éprouvées. Formation entièrement renouvelée pour le Trio (1914) de Ravel, dont Itamar Golan, Mihaela Martin et Arto Noras, enchaînant quasiment sans interruption les quatre mouvements et touchant aux limites de l’acoustique du lieu, donnent une vision tout sauf routinière, personnelle, intense et passionnée, qui laisse ainsi entrevoir les conditions particulières de sa genèse, le compositeur l’ayant achevé rapidement, dans l’espoir de pouvoir être enrôlé dans les rangs de l’armée.


Le site du festival Pablo Casals
Le site de l’abbaye Saint-Michel de Cuxà
Le site d’Olivier Charlier
Le site de Mihaela Martin
Le site de François Salque
Le site du Quatuor Artis



Simon Corley

 

 

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