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01/10/2013
Richard Wagner : Lohengrin

Klaus Florian Vogt (Lohengrin), Annette Dasch (Elsa), Petra Lang (Ortrud), Jukka Rasilainen (Friedrich), Georg Zeppenfeld (Heinrich), Samuel Youn (Der Heerrufer), Stefan Heibach, Willem van der Heyden, Rainer Zaun, Christian Tschelebiew (Vier brabantische Edle), Chor und Orchester der Bayreuther Festspiele, Andris Nelsons (direction), Hans Neuenfels (mise en scène)
Enregistré en public à Bayreuth (14 août 2011) – 216’ (y compris bonus: entretiens avec Katharina Wagner, Hans Neuenfels, Klaus Florian Vogt et Annette Dasch) – Format LPCM 2.0 – Region code: 0 – Son: DTS Digital Surround
Album de deux DVD Opus Arte OA 1071 D – Notice de présentation en français, anglais et allemand





Ce double DVD permet de disposer d’une captation vidéo de ce qui restera comme le Lohengrin de Hans Neuenfels... davantage que comme celui de Wagner. Créé en 2010 au festival de Bayreuth et décrit par ConcertoNet comme «une expérimentation, une dissection de la nature humaine et des sentiments amoureux», ce spectacle nous parvient dans sa reprise de 2011... alors que celle de 2012 a, semble-t-il, dissipé les controverses les plus vives autour de ce Lohengrin de laboratoire où – pour reprendre les mots de Reinhard von der Thannen, signataire des décors et des costumes – «des expériences sont réalisées (...) les émotions (...) observées au microscope». Où les chœurs – «des descriptions d’état d’esprit», d’après Neuenfels – sont déguisés en rats géants. Et «comme des souris ou des rats attirés par un morceau de lard, les personnages tournent autour de la question interdite»: qui est Lohengrin?


Dans cet univers brechto-kafkaïen, les protagonistes ont tous l’air complètement déjantés – à commencer par une Elsa à mille lieues de représenter l’innocence (... pas très nette dans sa fascination pour ce cygne au long cou en plastique). Si les ressorts dramatiques sont globalement respectés, le résultat n’en semble pas moins distant et froid... stimulant l’intellect (malgré de nombreux choix incompréhensibles ou confus) autant qu’il éloigne de toute empathie envers les protagonistes et ôte toute crédibilité au livret. A partir du moment où le Lohengrin qu’on nous montre est une expérience clinique (qui tourne, du reste, au fiasco avec la destruction finale des rats), c’est au triomphe du concept sur le théâtre que l’on assiste. Une démarche qui fatigue et laisse imperceptiblement indifférent... avec ce désagréable sentiment – renforcé par une réalisation audiovisuelle très autoritaire (qui oriente le regard sans lui permettre de s’attarder sur l’ensemble de la scène) – d’être pris en otage d’une vision univoque et marginale de la pièce.


Salués par des applaudissements d’un enthousiasme délirant, les chanteurs s’investissent pleinement dans la mise en scène de Neuenfels – de même que le chef, dont la direction nerveuse et pleine de vie pèche pourtant en profondeur et surtout en poésie (à l’image d’un finale bien neutre et faible en émotions). Intensément éloquent, l’accompagnement d’Andris Nelsons n’en reste pas moins de grande tenue. Outre des chœurs impeccables (... une tradition à Bayreuth), les rôles de solistes sont à la fois vaillants et bien distribués. Le Roi de Georg Zeppenfeld convainc par son humanité, malgré un format léger (... une option intéressante dans ce rôle où l’on est habitué aux basses XXL). Le Telramund de Jukka Rasilainen déçoit franchement (laideurs dans le timbre, manque d’assise et de souffle), alors que le Héraut de Samuel Youn – qui n’est pas sans faiblesse vocale au premier acte – se sort impeccablement du deuxième acte. La voix de Petra Lang possède la couleur du rôle d’Ortrud: d’une puissance terrifiante à l’acte II (plus à l’aise dans les deux premières scènes que dans la quatrième, où la tessiture plus délicate à négocier lui pose quelques problèmes de souffle), elle se fait pile électrique dans l’éprouvant dernier acte.


Comme l’année d’avant et comme l’année d’après sur la même scène, comme dans la récente version Janowski (enregistrée trois mois après cette captation DVD), les deux rôles principaux sont tenus par Klaus Florian Vogt et Annette Dasch. Si la soprano allemande maîtrise celui d’Elsa – malgré une voix qui manque parfois de stabilité (notamment au troisième acte, bien que scéniquement elle y convainque davantage que son partenaire) –, le Lohengrin de Vogt (son rôle fétiche) demeure au-dessus du lot. La séduction de cette voix quasi extraterrestre opère toutefois avec moins de force qu’à l’accoutumée, le ténor semblant par moments détimbrer, forcer, voire manquer de legato. Reste un phénomène vocal inouï – assis sur une technique de souffle reconnaissable entre mille et un timbre d’une pureté troublante. Un trouble qui colle si bien au fils de Parsifal...


Gilles d’Heyres

 

 

 

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