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10/06/2010
Blanche Selva, naissance d’un piano moderne
Jean-Marc Warszawski (direction scientifique), Diane Andersen, Rémy Campos, Luca Chiantore, Stéphan Etcharry, Yves Ferraton, Claude Gay, Delphine Grivel, Ludivine Isaffo, Florence Launay, Florence Le Doussal, Cécile Quesney, Françoise Thinat, Damien Top, préface de Gilles Cantagrel
Symétrie – 300 pages, 50 €





Symétrie a eu raison de sortir Blanche Selva (1884-1942) de l’oubli. La poignée d’enregistrements que la pianiste a légués n’a pas permis de l’inscrire durablement dans la mémoire du mélomane. Sous la direction scientifique de Jean-Marc Warszawski, auteur d’une notice biographique condensée mais précieuse, ces actes d’un colloque organisé en 2005 éclairent les facettes d’une artiste vénérée en son temps et qui a occupé une place centrale dans la sphère musicale française.


Les nombreux écrits qu’elle a consacrés à la technique pianistique – insistant sur la clarté polyphonique et l’articulation – constituent une somme dont les jeunes interprètes feraient bien de se nourrir, comme l’expose Diane Andersen, tandis que l’essai de Françoise Thinat illustre dans quelle mesure son enseignement peut s’appliquer à la musique moderne. Mais la pensée de Selva véhicule une véritable philosophie de l’interprétation, toujours actuelle. Il s’agit sur ce point d’un trait essentiel de sa personnalité : à une époque de spécialisation croissante des métiers de la musique, elle intellectualisait et conceptualisait celui d’interprète, vécu comme un véritable sacerdoce. Issue de la Schola Cantorum, où elle enseigne dès l’âge de dix-huit ans, cette musicienne en quête d’exigence et d’absolu vénérait d’Indy, semble-t-il presque autant que Bach, et restait fidèle à un certain idéal qui l’a probablement éloignée d’un Roussel dès la Première Guerre mondiale. Mais ce dernier ne fut pas le seul homme d’importance à graviter autour de cette infatigable voyageuse et bourreau de travail : Albéniz, Séverac (dont elle rédige une biographie), Ropartz, Dukas ou encore Magnard, pour n’en citer que quelques-uns, lui doivent des créations, une défense infatigable de leurs œuvres ainsi que de précieux conseils au point d’apporter un peu trop de modifications aux manuscrits (sur Iberia ce qui fâcha d’ailleurs l’auteur).


Malgré quelques brouilles passagères (avec Roussel ou d’Indy qui lui reprocha de rejoindre Ropartz à Strasbourg), Selva fut fidèle en amitié, notamment avec les frères Castéra, surtout René qui lui tourna souvent les pages («mon derviche tourneur»), mais aussi le peintre Maurice Denis. Sa correspondance aborde souvent des questions existentielles sur le métier de musicien mais comporte aussi des traits d’esprits qui laissent notamment penser qu’elle souriait de son embonpoint («mon encombrante personne», écrit-elle, «la seule Blanche qui vaille... deux rondes!», selon Pierre Coindreau).


Cet ouvrage, qui bénéficie du soin habituel de l’éditeur lyonnais, se lit fort agréablement et ne peut qu’être recommandé, non seulement aux musiciens mais aussi aux amoureux de la musique française qui se plongeront avec délice dans cette époque passionnante. Il comporte, initiative bienvenue, de brèves notices biographiques des personnalités citées, le riche catalogue des œuvres de Selva (articles, livres, transcriptions, éditions mais aussi compositions, un aspect méconnu de son talent protéiforme) ainsi qu’une discographie qu’il serait instructif de rééditer dans les meilleures conditions de restauration.


Le site de l’association Blanche Selva


Sébastien Foucart

 

 

 

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