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Eté musical et rentrée
07/03/2020
La Roque d’Anthéron (au premier plan, parc du château de Florans)
Que seront l’été musical et la rentrée dans les salles de concerts et théâtres lyriques en France? Beaucoup d’espoirs mais aussi d’incertitudes.
Cette période pandémique aura été moins cruelle pour les musiciens que pour les comédiens. Pas les musiciens d’orchestre, artistes lyriques et choristes, réduits à des distanciations peu propices au travail de fosse ou de scène dont les activités sont reportées à des temps meilleurs. Les solistes ont pu s’exprimer dans des salles vides devant microphones et/ou caméras relayant leurs récitals sur les sites Internet à de plus vastes publics que la jauge habituelle des salles où ils se produisaient. Une des expériences les plus intéressantes aura été le week-end consacré par France Musique aux sonates et variations pour piano de Beethoven par neuf jeunes pianistes français réunis autour de François-Frédéric Guy, un marathon joué en direct, sans public, dans l’Auditorium de Radio France, qui a permis (et permettra encore, les concerts ayant été filmés) à des milliers d’auditeurs de découvrir ces interprètes et aussi certaines de ces sonates moins populaires que les plus jouées habituellement.
Dès le début de la généralisation de la pandémie en Europe, nombreux sont les festivals de musique qui ont annoncé l’annulation de leur édition estivale. D’abord les «grands» qui impliquent orchestres, opéras et interprètes et public internationaux: Salzbourg, Verbier, Bayreuth, Mörbisch, Aix-en-Provence et bien d’autres. Au fur et à mesure de l’évolution, certains ont adapté la programmation initiale pour satisfaire un public moins nombreux, comme Salzbourg, qui programmera quelques concerts, Ravenne en Italie ou Aix-en-Provence, qui existera virtuellement avec la rediffusion de spectacles phares d’éditions passées, des concerts donnés en direct et une énorme activité médiatique sur leur site Internet, Arte et France Musique comme si le festival se déroulait normalement.
Parmi les festivals français celui de La Roque-d’Anthéron consacré au piano a décalé ses dates et, bénéficiant du parc exceptionnel du Château de Florans, multipliera les concerts (trois par jour) à jauge adaptée aux recommandations sanitaires du moment en invitant quasi uniquement des musiciens français. D’autres se sont adaptés à ce défi nouveau comme le Festival des Forêts, Piano au Touquet, Musique en Dialogue aux Carmélites ainsi que Piano aux Jacobins à Toulouse, le Biarritz Piano Festival et Le Temps d’Aimer la danse à Biarritz, les Chorégies d’Orange, le Festival du Périgord noir, celui de Royaumont, l’Août musical de Deauville, Musica à Strasbourg, Les Nuits de la citadelle à Sisteron, le Midsummer Festival du Château d’Hardelot, l’Académie d’été de l’Orchestre des Jeunes du Centre à Tours, la liste n’est pas exhaustive. Moins heureux, le festival post-confinement organisé par l’Opéra de Dijon avec l’ensemble Les Dissonances a dû être annulé car un cas de covid-19 a été diagnostiqué parmi ses participants. Nouvelle qui ne réjouit pas les organisateurs car faisant planer le spectre toujours possible d’annulations de dernière minute...
Rentrée?
Certains théâtres lyriques adaptent leurs spectacles de rentrée à une éventuelle deuxième vague de la pandémie ou parce que les spectacles prévus n’ont pu être montés. C’est le cas de l’Opéra de Genève, qui remplace la Turandot à grand spectacle par une plus modeste Cenerentola», et du Capitole de Toulouse, qui devait ouvrir avec Les Pêcheurs de perles, remplacé par une production empruntée à l’Opéra de Drottningholm de Così fan tutte.
A part, le cas de l’Opéra national de Paris. Ayant subi de plein fouet plusieurs crises (les weekends des «gilets jaunes», les grèves contre les lois sur le travail et la réforme des retraites et enfin la crise du covid 19) qui ont entraîné annulation de quatre-vingt-trois représentations, remboursement au public et, malgré tout, payement des artistes et du fonctionnement de la maison, les dettes en cette fin de saison sont estimées à 45 millions d’euros et le fonds de roulement quasi vide. Le directeur sortant, Stéphane Lissner, a préféré écourter à fin 2020 son mandat, qui devait aller jusqu’à la fin de la saison 2020/2021, pour laisser les mains libres à son successeur, l’Allemand Alexander Neef, 46 ans, actuellement directeur de l’Opéra de Toronto (dont on ne sait toujours pas s’il pourra y abréger son mandat) afin de lui laisser la gestion de ce que devra être cette institution «à genoux» après un tel tsunami qui l’a littéralement transformée en bateau ivre. Afin de sauver une partie de la première saison de son successeur, Lissner a avancé des travaux prévus fin 2021 à l’automne 2020. Ainsi les deux maisons resteront fermées en septembre, Garnier devant rouvrir en janvier avec peut-être des spectacles donnés devant le rideau de scène et Bastille en décembre avec une programmation de reprises et peut être la Tétralogie de Wagner annulée en cette fin de saison en version de concert pour conserver les contrats signés et assurer une sortie digne au directeur musical, Philippe Jordan, avant son départ pour l’Opéra de Vienne. Le même Philippe Jordan dirigera les 13 et 14 juillet deux concerts solidaires et gratuits au Palais Garnier en hommage au dévouement et au courage du personnel soignant et de tous ceux qui ont œuvré en faveur de la collectivité (diffusion en direct sur France Musique du concert du 14 juillet, retransmission en direct des deux concerts sur la page Facebook et la chaîne YouTube de l’Opéra national de Paris).
Tous les autres théâtres lyriques et salles de concert à Paris et dans les régions ont envoyé les programmes de leurs saisons qui devraient se dérouler en accord avec les règles sanitaires qui changent au jour le jour. Cela ne facilite pas les réservations et achats d’abonnements. La rentrée de septembre nous permettra de refaire un état des lieux.
Olivier Brunel
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