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CD, DVD et livres: l’actualité de mai
05/15/2017



Les chroniques du mois



Must de ConcertoNet


    La soprano Juliane Banse




 Sélectionnés par la rédaction


    Daniel Reuss dirige la Missa solemnis


    Rudolf Lutz dirige Bach


    Davide Cabassi interprète Goetz


    Le duo Beneventi-Rebaudengo




 Oui !

Rudolf Lutz dirige Bach
Francesca da Rimini à Martina Franca (2016)
La Capella Tiberina interprète A. Scarlatti
Leonardo García Alarcón dirige A. Scarlatti
Yannick Nézet-Séguin dirige Dvorák
Philippe Bernold interprète Mozart
Paul McCreesh dirige Les Saisons
Frieder Bernius dirige Mozart
Christian Benda dirige Rossini
Igor Markevitch dirige Moussorgski
Rudolf Kempe dirige Stravinski et Britten
Otmar Suitner dirige Mozart
Franz Konwitschny dirige Brahms



Pourquoi pas ?

Mark Bebbington interprète Vaughan Williams
Carlo Maria Giulini dans Il trionfo dell’onore d’A. Scarlatti
Le violoniste Wolfgang Schneiderhan
Le clarinettiste Jörg Widmann
Nicolas Hodges interprète W. Zimmermann
Emil Tabakov dirige Chostakovitch
Fabio Luisi dirige Rimski-Korsakov
Anthologie Evgueni Mravinski
La violoniste Virginie Robilliard
Le violoniste Augustin Hadelich
La violoniste Tasmin Little
Le violoniste David Oïstrakh
Roberto Trainini interprète Beethoven et Franck
A Swan Lake d’Ekman à Oslo (2014)
Günther Herbig dirige Brahms



Pas la peine

Gabriella Martellacci chante A. Scarlatti
Marek Stryncl dirige Zach
La violoniste Elmira Darvarova
La violoniste Sophie Rosa
L’Armée des romantiques interprète Franck
La flûtiste Noémi Györi
Adám Fischer dirige Mozart
Günther Herbig dirige Ravel



Hélas !

Domenico Nordio interprète Mozart





En bref


A Swan Lake dans son intégralité
Frieder Bernius à son meilleur dans Mozart
Trop sage Shéhérazade à Zurich
Suite de l’anthologie Mravinski chez Profil
Le Mozart trop poudré et sucré d’Adám Fischer
La Sonate de Franck dans tous ses états
Ouvertures de Rossini: que la fête commence!
Trésors est-allemands
Une première mondiale pour Jan Zach
Le Chostakovitch trop classique d’Emil Tabakov




A Swan Lake dans son intégralité





On a pu voir récemment une version «abrégée» d’A Swan Lake au Théâtre des Champs-Elysées dans le cadre de la saison de Transcendanses. L’accueil a été mitigé: véritable succès public mais commentaires quasi-unanimement négatifs de la presse spécialisée. Ce DVD est bienvenu car ceux qui ont manqué ce spectacle pourront le voir tel qu’il a été créé à Oslo en 2014 avec un véritable orchestre et ceux qui en auront vu l’avatar parisien pourront se faire une idée du spectacle original. Son chorégraphe, Alexander Ekman, danseur suédois ayant fait ses classes chez Mats Ek et Jirí Kylián et vite passé à la chorégraphie. Il a eu l’idée de faire danser sur un vrai lac, donc dans l’eau, exercice tout à fait particulier pour lequel ont été confectionnés par le styliste danois Henrik Vibskov des costumes dans des matériaux appropriés. A Swan Lake, donc «Un» Lac des cygnes, commande du Ballet national de Norvège, s’éloigne suffisamment du moule pétersbourgeois pour clamer son originalité. Exit Tchaïkovski: la musique originale percutante est signée du compositeur suédois Mikael Karlsson. L’argument, entièrement revu par Alexander Ekman, n’a quasiment plus rien à voir avec l’original. Mais il avait annoncé lors d’une conférence de presse à Paris que le spectacle serait présenté dans une version modifiée, les circonstances des tournées n’étant jamais les mêmes d’un théâtre à l’autre. Or, on s’aperçoit que ce que l’on a vu à Paris ne représente que la moitié du spectacle original. Privées d’un long premier acte en deux parties, les représentations parisiennes se sont limitées à la partie proprement aquatique du spectacle original, certes spectaculaire mais entraînant une frustration sur le plan de la construction d’un récit ou d’une chorégraphie. La première partie filmée à Oslo comprend un long prologue très fantaisiste et vraiment chorégraphié qui permet de mieux comprendre qui sont les personnages intervenant dans l’épisode aquatique, particulièrement celui du soprano. La deuxième séquence, une parodie de ce que pourrait être la commande d’un tel spectacle, est franchement hilarante. De plus, la musique du premier acte est constamment parodique de celle de Tchaïkovski, ce qui constitue une bonne introduction à la musique singulière du deuxième acte. Le deuxième acte est tel que l’on a pu le décrire dans le spectacle parisien, avec toute sa virtuosité aquatique. La parution de ce DVD sera donc une aubaine pour ceux qui ont aimé le spectacle dans sa version de tournée et l’occasion pour ceux qui l’ont trouvé insuffisant de comprendre pourquoi. Quelques bonus, dont aucun n’éclaire vraiment, pas plus que le feuillet double qui tient lieu de notice, sur le projet et son historique: quelques clips de type teasing témoignent de la campagne publicitaire précédant la création à Oslo et un petit extrait d’un documentaire sur le cygne en guise de clin d’œil (Arthaus Musik Blu-ray 108116 ou DVD 109323). OB




Frieder Bernius à son meilleur dans Mozart




Après une décevante Passion selon saint Matthieu, Frieder Bernius revient enfin à son meilleur avec cet enregistrement consacré à la Grand-messe en ut mineur de Mozart, dix ans après la réussite du Requiem, toujours chez Carus. Le chef allemand reste fidèle à son geste sans vibrato qui évacue tout dramatisme au profit d’une vision probe et objective. Pour qui serait habitué à la version de Neville Marriner (Philips, 1979) accompagné de la lumineuse Margaret Marshall, la surprise n’en sera que plus grande: pas d’exaltation du lyrisme et de l’emphase symphonique au profit d’une vision intimiste, très fouillée dans l’individualisation des pupitres et le détail orchestral. L’entremêlement des différentes voix solistes est également un régal tant l’expressivité est mise au service d’une clarté polyphonique d’une parfaite mise en place. On reconnait là les qualités habituelles de Bernius qui sait, cette fois, relancer le discours pour ne pas tomber dans les travers d’une version trop analytique. Il est à noter qu’il a choisi une nouvelle version de la messe inachevée, au bénéfice d’une instrumentation plus légère, en phase avec ses conceptions. Autour d’un toujours exemplaire Chœur de chambre de Stuttgart, on notera que les solistes (Sarah Wegener, Sophie Harmsen, Colin Balzer et Felix Rathgeber) ne se hissent pas au niveau des grands noms qui se sont illustrés jadis dans cette œuvre, mais ne déméritent pas pour autant. Un excellent second choix, à découvrir après les versions de référence de Marriner, Gardiner ou Herreweghe (CV83284). FC




Trop sage Shéhérazade à Zurich





La suite symphonique Shéhérazade de Rimski-Korsakov est rapidement devenue un morceau de prédilection pour tout grand orchestre, tant ses atmosphères diversifiées, sa partition luxuriante et ses accents exotiques offrent de multiples occasions pour celui-ci de prouver sa valeur. L’excellent Philharmonia de Zürich, enregistré ici en concert en juillet 2016, ne souffre aucun reproche sur les plans technique et formel. Outre un excellent premier violon solo, Bartlomiej Niziol, l’orchestre sait notamment pouvoir compter sur de magnifiques pupitres de cordes (dans le troisième mouvement!) et sur des bois d’une finesse incroyable. Pour autant, cette version, dirigée par le chef génois Fabio Luisi, ne laissera pas de grand souvenir en raison d’une interprétation globalement sans aspérité, et c’est bien là que le bât blesse. Car, dès «La Mer et le Vaisseau de Sinbad», l’ensemble s’avère beaucoup trop sage: on n’entend aucun accent, ni aucun emportement alors que la partition en recèle, ô combien! Dans le deuxième mouvement, «Le Récit du prince Kalendar», on ne perçoit pas davantage les emballements pourtant attendus (vers 6’56) et, au contraire, il semble que Luisi retienne son orchestre au point de conférer à la fin un climat pesant voire pataud. Le troisième mouvement, «Le Jeune Prince et la Jeune Princesse», est le plus réussi de ce concert grâce encore une fois à un très bel orchestre et, même si le chef aurait pu à notre avis se dispenser de ces ralentis ou rythmes syncopés assez artificiels, à une fluidité dans laquelle on se laisse facilement transporter. Le dernier mouvement donne une dernière fois l’occasion à Niziol de briller sur ce disque – au minutage un peu chiche, à peine 47 minutes – mais on en restera sans hésitation au génial Kondrachine (avec le Concertgebouw d’Amsterdam chez Decca) pour l’imaginaire oriental ou, pour qui souhaite une vision plus «symphonique» de l’œuvre, à Karajan (avec Berlin chez Deutsche Grammophon) ou Ozawa (Philips) dans un superbe concert à la tête des Wiener Philharmoniker (Accentus Music PHR 0106). SGa




Suite de l’anthologie Mravinski chez Profil




Profil poursuit par un nouveau coffret de six disques l’édition qu’il consacre à Evgeny Mravinski (1903-1988) et à l’Orchestre philharmonique de Leningrad, dont il fut le chef durant un demi-siècle. Comme pour le premier volume, l’assemblage hétéroclite d’enregistrements bien connus – la Symphonie «Pathétique» de Tchaïkovski de 1949 – et de bandes pas toujours convenablement rééditées jusqu’alors apporte des satisfactions inégales, notamment en raison de l’âge et de la qualité de certains témoignages, que ce soit en studio ou en concert, et de quelques imperfections orchestrales. Mais il est de nouveau frappant de voir comment la patte du chef russe s’impose dans tous les répertoires: implication de chaque instant dans le Concerto pour flûte et harpe de Mozart (1949, avec Boris Trizno et Elena Sinitsina), vision passionnante et atypique de la Symphonie fantastique de Berlioz (1960), sens narratif dans l’Ouverture de Rienzi de Wagner (1941), fermeté du trait et autorité dans de brefs extraits de L’Arlésienne (1946) et Carmen (1960) de Bizet, truculence et élan dans de larges extraits de Casse-Noisette de Tchaïkovski (1946-1948), flux continu de la Symphonie alpestre de Strauss (1962), force évocatrice et mordant de L’Oiseau de feu (1961/1962) et de Pétrouchka (1946) de Stravinski, évidence de la Deuxième Suite de Roméo et Juliette (1952) et violence épique de la Sixième (1958) de Prokofiev, dont il avait dirigé la création (PH16026). SC




Le Mozart trop poudré et sucré d’Adám Fischer


          


Adám Fischer, chef très réputé dans le répertoire classique, signe là deux disques de symphonies de Mozart où le très connu (Trente-cinquième, Trente-huitième) côtoie le plus rare avec les Première, Quatrième et Cinquième Symphonies). La parution d’autres volumes (voir ici), qui ont conduit le chef hongrois à signer une intégrale des plus complètes (puisque rassemblant finalement quarante-cinq symphonies!), est à l’image de ces deux disques (respectivement les volumes n° 1 et n° 10 de l’intégrale), qui suscitent à la fois intérêt et colère froide. L’Orchestre de chambre national danois est de très bonne facture et ses timbres sont agréables, jouant à la fois sur la légèreté des articulations et la fraîcheur des œuvres. Si l’on peut parfois trouver les cordes acides (le premier mouvement de la Cinquième) ou les timbales intrusives à l’extrême (premier mouvement de la Trente-huitième!), l’ensemble se distingue néanmoins par une belle tenue. Mais que dire de l’appréhension du chef On a malheureusement trop souvent l’impression que, pour lui, un coup de projecteur ici ou là tient lieu de vision alors qu’il ne fait bien au contraire que la masquer. Prenons l’exemple de la si belle Première Symphonie, composée par un Mozart alors âgé de huit ans (on est à Londres, en 1764!): est-il nécessaire d’appuyer les notes de cette façon dans le Molto allegro initial (à 0’46 ou à 3’20), surtout pour nous délivrer la plupart du temps un discours relativement alangui? Que dire du deuxième mouvement, si ce n’est que la vitesse prise par Fischer éreinte totalement ce petit bijou de 6 minutes? On n’est en fin de compte guère convaincu, le maniérisme prenant trop souvent le pas sur le naturel d’une partition où il n’est guère nécessaire d’en faire des tonnes. Passons ensuite aux «grandes» symphonies que sont les Haffner et Prague: là aussi, qui plus est face à une concurrence des plus solides, on en sera pour nos frais. La Trente-cinquième comporte certes de beaux moments mais la mollesse est de nouveau à la manœuvre dans l’Andante (à 1’35, à 5’50...) tandis que le Menuetto. Trio qui suit est caricatural à souhait. La Trente-huitième est globalement meilleure, en dépit d’un premier mouvement où la pulsation n’est guère tenue et où la fin est beaucoup trop précipitée. Bref, pour les symphonies de jeunesse, on en restera sans hésiter au génial Trevor Pinnock sur instruments anciens (Archiv Produktion) tandis que chacun pourra choisir sa version de prédilection pour les deux autres symphonies au sein de références multiples (deux disques Dacapo 6.220536 et 6.220545). SGa




La Sonate de Franck dans tous ses états


                    
          


          


          


          


Huit nouvelles versions et une réédition pour la Sonate de Franck, infatigable cheval de bataille des violonistes qui a aussi attiré les convoitises des violoncellistes et flûtistes.
Ancien concertmaster du Met, la Bulgare Elmira Darvarova, enregistrée en mars 2013 en Colombie-Britannique, déçoit par une sonorité étriquée, une justesse aléatoire, un ton larmoyant et un engagement inégal, qui affectent hélas pareillement la Cinquième Sonate «Le Printemps» de Beethoven, malgré l’accompagnement correct de Shoko Inoue, troisième prix au concours de Cleveland en 1999. C’est également fort dommage pour les beaucoup plus rares Trois Romances de Clara Schumann (Affetto Recordings AF1701).
Enregistrée durant l’été 2014 dans le Sussex, la Britannique Sophie Rosa inscrit l’œuvre dans un déroulé plus cohérent, sous le titre «Rêve d’enfant» – c’est d’ailleurs la pièce éponyme d’Ysaÿe (créateur de la Sonate de Franck) qui conclut le programme, où l’on peut entendre par ailleurs une page de jeunesse de Franck, un Andantino quietoso (1844). Mais la peinture, certes fine et sans faute de goût, tient trop de l’aquarelle et manque de caractère. Avec le pianiste Benjamin Powell, l’implication est en revanche plus nette dans Ravel, avec la Seconde Sonate et la Vocalise-étude en forme de habanera arrangée par Georges Catherine (Champs Hill Records CHRCD123).
Autre parcours intéressant que celui proposé en studio à Bois-Colombes en octobre 2014 par Virginie Robilliard et son frère Bruno Robilliard, qui, sous le titre «De Baudelaire à Proust», donnent les deux principales sonates françaises à pouvoir prétendre avoir inspiré la Sonate de Vinteuil dans A la recherche du temps perdu – celle de Franck, bien sûr, mais aussi la Première de Fauré – ainsi que la Sonate de Debussy. Davantage que la séduction de la sonorité de la violoniste, on apprécie son engagement, avec enfin un piano plus présent, le tout pour des versions habitées de ces partitions rabâchées (Hortus 128).
Le jeune Allemand Augustin Hadelich, enregistré en juin 2015 à Purchase (New York), propose des associations plus inattendues: Tango Song and Dance de Previn, la Première Sonate de Schumann et les Tre Pezzi de Kurtág précèdent la Sonate de Franck pour former ce qui s’apparente à un programme de récital avec la Coréenne Joyce Yang, deuxième prix au concours Van Cliburn en 2005. Au regard de cette grande variété stylistique, l’interprétation, propre et très tenue, laisse malheureusement l’auditeur sur sa faim (Avie Records AV2347).
Enregistrée en mars 2016 à Paris, L’Armée des romantiques a choisi, pour sa part, de coupler la Sonate à l’autre grande partition chambriste de Franck, antérieure de sept ans, le Quintette avec piano. Après toutes ces versions n’apportant somme toute pas grand-chose à une discographie déjà très riche, l’envie était forte de saluer une parution soigneusement présentée et revendiquant, jusque dans la notice très personnelle de Michel Faure, un parti pris à la fois historique et sortant des sentiers battus. Sur instruments anciens (cordes en boyau et Erard à cordes parallèles de 1895), les jeunes musiciens s’illustrent cependant par un radicalisme auquel il est difficile d’adhérer. On ne doute pas qu’ils se fondent sur une documentation très précise de l’usage du portamento en cette fin de XIXe siècle, mais le résultat paraît difficilement supportable aux oreilles d’aujourd’hui, d’autant qu’il est associé ici à une sonorité chétive et à une intonation douteuse et qu’il s’inscrit dans un discours maniéré, lent, précautionneux et surarticulé. Il y a certes davantage d’élan et de fougue dans le Quintette, mais l’expérience n’en agacera pas moins probablement ceux qui demeurent attachés à la tradition interprétative – avec tout ce qu’elle peut certes avoir de faux et de contestable (L’Autre Monde LAM3).
Enregistrée dans le Suffolk en avril 2016, l’Anglaise Tasmin Little nous ramène avec enthousiasme et intensité au confort de cette tradition, au risque même d’une trop grande affectation, à l’unisson du pianiste australien Piers Lane. Avec la même générosité, les compléments jouent la parenté plus ou moins évidente avec Szymanowski – la Sonate, le diptyque Nocturne et Tarentelle et la Romance (avec en écho celle de Fauré), soit l’intégralité de ses œuvres originales pour violon et piano à l’exception des essentiels Mythes (Chandos CHAN 10940).
En récital le 21 janvier 1959 à Paris, David Oïstrakh conjugue perfection – davantage que Vladimir Yampolsky à ses côtés –, rigueur, hauteur de vue et générosité. Qui plus est, la Sonate «Didon abandonnée» de Tartini ne souffre pas d’une approche pourtant évidemment datée, il parvient à rendre intéressante la Fantaisie de Schumann (revue par Kreisler) et il porte à incandescence Tzigane de Ravel, avant un bis – Andante de la Deuxième Sonate de Bach – datant de 1965 à Los Angeles. Cela étant, on entend beaucoup les bruits de la salle et le son porte son âge. Il est vrai que la manière dont travaille l’éditeur, pour ce treizième volume de sa collection dédiée au grand violoniste russe, laisse pour le moins songeur: si le disque, comme c’est parfois l’usage pour des bandes anciennes, conserve les interventions du présentateur de la radio, ce n’est cependant pas du tout celui de l’époque, puisqu’on reconnaît immédiatement la voix de... François-Xavier Szymczak (Doremi DHR-7950).
Dès 1888, le violoncelliste Jules Delsart (1844-1900) réalisa un arrangement pour son instrument de la Sonate de Franck (avec l’approbation du compositeur), qui s’est assez largement imposé au répertoire. En février 2016 dans un studio polonais, l’Italien Roberto Trainini convainc moins par son intonation et sa sonorité que par son phrasé et son chant, très bien soutenu par le piano profond, ample et coloré de Cristiano Burato. Le complément, également en la, est beaucoup plus rare: la passionnante adaptation par Auguste Franchomme, le maître de Delsart, de la Neuvième Sonate «A Kreutzer» de Beethoven, qui bénéficie elle aussi d’un bel engagement de la part des interprètes (Brilliant Classics 95191).
Bien d’autres arrangements de la Sonate de Franck – notamment pour saxophone (alto), tuba, alto et même pour piano seul – sont répertoriés mais ceux destinés à la flûte sortent du lot, promus par des musiciens tels que Jean-Pierre Rampal et James Galway. En studio en septembre 2015 à Budapest avec la pianiste Katalin Csillagh, Noémi Györi a choisi l’édition du flûtiste suisse Peter-Lukas Graf. Malheureusement, malgré le titre («Sonorités rayonnantes») donné à l’album, le résultat s’en tient trop souvent à une simple lecture de la partition, de même que dans la plus surprenante adaptation de la Sonate «Arpeggione» de Schubert (par la flûtiste hongroise, à partir des éditions de Galway et Graf) ou dans une œuvre conçue quant à elle pour la flûte, l’insipide Sonate «Ondine» de Reinecke (Hungaroton HCD 32767). SC




Ouvertures de Rossini: que la fête commence!





Le tour de force mérite d’être salué puisqu’en seulement deux sessions d’enregistrement qui se sont respectivement tenues les 5 et 6 septembre 2011 ainsi que les 30 et 31 mai 2012, Christian Benda a gravé à la tête du Sinfonia de Prague l’intégrale des ouvertures de Rossini, au nombre de trente, qui forment donc ce coffret de quatre disques. Intégrale? Pas tout à fait à vrai dire puisqu’on ne trouvera par exemple ni l’Ouverture de La Dame du lac ni celle de La Pierre de touche (même si celle de Tancrède lui ressemble certes fortement...), ni d’ailleurs celle de L’occasione fait le larron ou de Cyrus à Babylone (rappelons au passage que Le Voyage à Reims ne comporte pas d’ouverture, le morceau apocryphe en ayant parfois tenu lieu n’étant qu’une reprise de la musique de ballet du Siège de Corinthe). Pour autant, c’est bien la première fois que l’auditeur dispose ainsi d’un tel ensemble où l’on trouvera entre autres raretés les ouvertures d’Eduardo et Cristina, Torvaldo et Dorliska ou de Bianca et Falliero. L’intérêt de cette somme réside finalement davantage dans cette opportunité que dans la diversité ou l’interprétation de ces trente ouvertures. Car les «ficelles» rossiniennes, pour appréciables qu’elles soient, ont tendance à se répéter (surtout lorsqu’on écoute à plusieurs reprises autant d’ouvertures d’affilée!): des introductions assez pompeuses, une verve par la suite qui éclate avec force piccolo et percussions, des échanges finalement assez classiques entre cordes et vents... Mais comment ne pas apprécier ces soudaines accélérations de cordes, ces bois d’une finesse généralement exemplaire (la clarinette solo et le piccolo à partir de 4’05 dans la rarissime Ouverture de Matilde di Shabran, la clarinette solo toujours dans celle d’Hermione ou, cette fois-ci, l’ensemble des bois dans celle d’Eduardo e Cristina), ces cuivres éclatants (l’assurance du cor solo dans l’Ouverture de Mariage par lettre de change!), ces facéties du compositeur (les archets qui claquent sur les pupitres dans l’Ouverture d’Monsieur Bruschino même si on pourra les trouver un peu lourds comparés à ceux du Philharmonia sous la baguette de Giulini, EMI), ce recours imaginatif aux percussions comme la caisse claire dans l’Ouverture de La Pie voleusecette symphonie si pittoresque» comme la qualifiait Stendhal dans sa Vie de Rossini)... Même si le Sinfonia de Prague n’est pas mauvais, l’interprétation manque un peu trop souvent de caractérisation et même de verve, étant entendu que Christian Benda semble plus à son aise dans les ouvertures les moins connues, les plus célèbres souffrant peut-être de la comparaison (ici, celle de Guillaume Tell frappe par son inertie et son manque de dynamisme tandis que celle du Barbier de Séville pâtit d’une accélération finale dont on comprend mal l’intérêt) et donc des gravures à la tête des meilleurs orchestres mondiaux dont elles ont pu faire l’objet. Globalement bien enregistrées (encore que les trombones, outre une fragilité technique perceptible, soient très lointains dans l’Ouverture de Mahomet II vers 6’15), ces diverses ouvertures ravissent l’oreille et, quitte à contredire Stendhal (qui trouvait dans son maître-ouvrage sur Rossini que celle de L’Italienne à Alger était «trop gaie; [et que] c’est un grand défaut»), nous mettent bien souvent le sourire aux lèvres. Même si cet ensemble s’avère des plus recommandables, on n’en oubliera pas pour autant les disques consacrés aux ouvertures les plus célèbres signés Giulini (EMI), Reiner ou Abbado (tous deux chez RCA), dont le naturel et l’excellence orchestrale demeurent des références (Naxos 8.504048). SGa




Trésors est-allemands

          


          


          


Après La Femme avisée d’Orff sous la direction de Kegel, Berlin Classics poursuit sa série de rééditions à prix moyen du catalogue Eterna: un cachet ancien est apporté à cette collection (disponible en CD mais aussi en vinyle) dont chaque disque fait revivre les couvertures et notices (en anglais et en allemand) d’origine (complétées par des textes nouveaux faisant notamment appel à la mémoire des membres des différents orchestres) ainsi que les fiches mi-dactylographiées mi-manuscrites consignant les relevés techniques des ingénieurs du son de la VEB.
Igor Markevitch (1912-1983) dirige en mai 1973 le Gewandhaus de Leipzig dans un programme Moussorgski. Pour les Tableaux d’une exposition, le Gewandhauskapellmeister de l’époque, Kurt Masur, préférait l’orchestration, plus «moussorgskienne», de Gortchakov et, même si, comme la plupart des autres chefs, c’est celle de Ravel que Markevitch a choisi d’enregistrer, il recherche lui aussi une sorte de retour aux sources en privilégiant la précision, l’objectivité et une certaine sécheresse sur le chatoiement des timbres, pour dessiner une vision inhabituellement mate, sombre et lente. Dans Une nuit sur le mont Chauve (dans la révision de Rimski-Korsakov), on trouvera plus d’éclat mais pas davantage de concessions (0300891BC).
Pour le reste, ce sont tout naturellement les grands chefs actifs avec les formations est-allemandes qui sont à l’honneur, à commencer par Rudolf Kempe pour ce qui devait être, en janvier 1976, son dernier enregistrement, moins de quatre mois avant sa mort: la Suite (1919) de L’Oiseau de feu et, ironie du sort, la Sinfonia da Requiem. Il retrouvait la Staatskapelle de Dresde, sa ville natale, formation à laquelle il demeura toujours étroitement associé – on se souvient notamment de ses Strauss de référence (EMI) – même s’il n’en fut le directeur musical qu’entre 1949 et 1953: dotée d’une forte personnalité sonore, elle brille de mille feux dans un Stravinski à la fois détaillé, rutilant et cursif, avant un Britten glaçant, anguleux et tendu (0300890BC).
Moins connu, l’Autrichien Otmar Suitner (1922-2010) fut directeur musical à Dresde de 1960 à 1964, mais, même une fois en poste à l’Opéra d’Etat de Berlin (1964-1990), il continua d’enregistrer avec la Staatskapelle, comme ces Trente-neuvième et Quarantième Symphonies de Mozart, l’un de ses compositeurs de prédilection (novembre 1974 et mars 1975). Sans surprise, l’approche reste certes frappée du sceau de la tradition et ne se caractérise pas par son audace, mais elle n’a rien de poussiéreux ou de paresseux et nous parle encore par son élégance, sa justesse et sa luminosité, servies qui plus est par un orchestre magnifique – la finesse des cordes (0300881BC)!
Franz Konwitschny (1901-1962), qu’on surnomma «Generalmusikdirektor de la RDA» naissante et qui contribua aux débuts de l’éditeur Eterna, fut le prédécesseur de Suitner à l’Opéra d’Etat de Berlin (1955-1962) mais aussi à Dresde (1953-1955), tout en étant Gewandhauskapellmeister à Leipzig (1949-1962). C’est à la tête de cet orchestre qu’il grave en juin 1962, six semaines avant sa mort, une Première Symphonie de Brahms passablement démodée et massive mais d’une force, d’une ampleur, d’une énergie impressionnantes, traçant un parcours impérieux porté par un souffle puissant (0300839BC).
Günther Herbig (né en 1931) fut directeur musical adjoint de l’Orchestre symphonique de Berlin (devenu en 2006 Orchestre du Konzerthaus de Berlin) entre 1966 et 1972, du temps où Kurt Sanderling en était le directeur musical, fonctions qu’il exerça lui-même ensuite (1977-1983), avant d’émigrer aux Etats-Unis. Enregistrée en 1978-1979, son intégrale des Symphonies de Brahms (incluant les Variations sur un thème de Haydn et l’Ouverture tragique) souffre de la comparaison avec Konwitschny et le Gewandhaus, s’agissant tant de la direction – plus académique et moins inspirée que celle de son aîné – que de l’orchestre – plus terne et moins séduisant que la phalange lipsienne: sérieux et méthodique, davantage soucieux d’architecture que de poésie, Herbig n’évite pas des baisses de tension, en particulier dans la Quatrième et les Variations. Mais un quatrième disque offert en bonus donne à voir un visage nettement plus intéressant des mêmes interprètes, dans des œuvres de Lutoslawski (Musique funèbre, Livre pour orchestre) et Schönberg (Pièces opus 16, Variations pour orchestre), enregistrées respectivement en 1979-1980 et en 1982-1983, qu’ils empoignent de manière autrement plus véhémente et passionnante (coffret de quatre disques 0300911BC). En revanche, le programme Ravel (Pavane pour une infante défunte, Suite de Ma mère l’Oye, La Valse, Boléro) réalisé en juin 1978 – premier enregistrement de musique française d’un orchestre fondé vingt-six ans plus tôt (un élargissement de son répertoire auquel Herbig tenait visiblement beaucoup) – manque trop souvent de finesse, de légèreté, de souplesse, d’humour et de verve – pour tout dire, au risque d’un lourd cliché, c’est clairement plus allemand que français. Cela étant, la musique n’est pas toujours maltraitée pour autant, comme dans une Valse à la péroraison d’une effrayante noirceur, une «Laideronnette» virevoltante ou un Boléro qui avance comme le rouleau compresseur de la Septième de Chostakovitch (0300880BC). SC




Une première mondiale pour Jan Zach




Après un volume dédié au méconnu Frantisek Jiránek, Supraphon poursuit l’édition de sa passionnante collection consacrée à la musique du XVIIIe siècle à Prague avec un disque cette fois dévolu aux œuvres religieuses de Jan Zach (1713-1773). C’est peu dire que cet enregistrement réalisé dans les conditions du direct manque d’électricité: on aimerait dynamiser la direction de Marek Stryncl, trop placide pour réellement donner davantage de drame et de ferveur à cette musique fort bien troussée dans l’enchaînement de ses mouvements très courts. C’est d’autant plus dommage que les interprètes (Musica Florea) comme le chœur (Collegium Floreum) se montrent à la hauteur de ce petit maître qui annonce Haydn. Le Requiem solemne en ut mineur, troisième du genre et plus connue de ses compositions religieuses, date de sa période praguoise (avant 1740), où sa renommée lui permit d’obtenir le poste de maître de chapelle à Mayence en 1745, avant de parcourir l’Europe en indépendant dès 1756. Il est également impossible de dater précisément les Vêpres de la Vierge en majeur, ici enregistrées en première mondiale – elles ont semble-t-il été aussi composées avant 1740. D’un esprit plus aérien, ces Vêpres font davantage appel aux solistes, qui montrent ici leurs limites techniques – les hommes surtout (SU 4209-2). FC





Le Chostakovitch trop classique d’Emil Tabakov




Un disque consacré aux concertos pour violon de Sibelius et Vladigerov, paru en 2015, avait déjà pu nous faire apprécier tout l’excellent travail d’Emil Tabakov à la tête de l’ Orchestre symphonique de la Radio nationale bulgare, une formation dont il a assuré la direction musicale de 2008 à 2015. Le chef bulgare, également compositeur, poursuit aujourd’hui une intégrale des symphonies de Dimitri Chostakovitch après les Quatrième, Septième et Huitième déjà gravées depuis 2014. Il s’attaque avec ce nouveau disque à la rare Onzième «L’Année 1905» (1957), peu fréquentée au concert comme au disque en comparaison des précédentes citées, alors que ses qualités sont bien réelles. Son atmosphère sombre, parfois méditative, la rapproche des passages lents des «symphonies de guerre» – tout particulièrement ceux des Septième et Huitième Symphonies. C’est donc fort logiquement que Tabakov a enregistré ces œuvres à la suite, sans doute pour inciter sa formation, d’une qualité honorable, à se montrer à la hauteur des versions illustres qui l’ont précédée dans ce répertoire. Il réussit son pari pour la mise en place, d’un équilibre parfait, sans parvenir pour autant à donner une réelle identité à sa formation, qui manque de couleurs et de caractère. Le geste narratif respire en une direction d’une belle lisibilité, sans verser dans l’analytique, mais reste un rien trop sage du fait notamment de graves trop en retrait, au détriment de la noirceur attendue en maints endroits. Une version très honorable, mais qui ne peut se hisser à la hauteur des nombreuses références, de Kondrachine à Mravinski, en passant par Rojdestvenski, voire Haitink (Gega New GD 383). FC



La rédaction de ConcertoNet

 

 

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