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La saison 2017-2018 des Berliner Philharmoniker
05/07/2017


S. Rattle, U. Knörzer, E. Hilsdorf, (de dos) O. Maninger
(© Sébastien Gauthier)



Sans transition


Beaucoup plus tard que la plupart des grands orchestres à travers le monde, le Philharmonique de Berlin dévoilait enfin, en ce mercredi 3 mai, sa saison 2017-2018. Diffusée en direct à la fois sur les réseaux sociaux et en vidéo par le biais de son Digital Concert Hall, cette conférence de presse était attendue puisqu’elle allait être la dernière de Sir Simon Rattle en tant que directeur musical de l’orchestre.


Sir Simon Rattle donc, Martin Hoffman (directeur administratif de l’orchestre), Ulrich Knörzer (altiste mais également représentant du bureau) et Olaf Maninger (premier violoncelle et représentant de l’organisation «média» de l’orchestre) intervinrent à tour de rôle avant qu’Elisabeth Hilsdorf, chargée des relations publiques de l’orchestre, ne donne la parole aux différentes personnes présentes pour un jeu classique de questions/réponses.


Avec 123 concerts symphoniques et 10 représentations d’opéra, le Philharmonique voit de nouveau son calendrier bien rempli après avoir notamment programmé 127 concerts au cours de la saison 2016-2017. Si Simon Rattle se taille la part du lion (52 concerts et 8 représentations lyriques seront donnés sous sa direction), la prochaine saison sera également l’occasion de croiser les plus grands chefs de la planète (Christian Thielemann dans la Missa solemnis, Mariss Jansons dans le Concerto pour piano de Schumann avec Daniil Trifonov et la Sixième Symphonie de Bruckner, Daniele Gatti dans la Symphonie «Mathis le peintre» de Hindemith et la Deuxième Symphonie de Brahms, Daniel Harding dans deux programmes où seront notamment données la Symphonie alpestre de Strauss et la Grand-messe en ut mineur de Mozart, Ton Koopman dans la Messe en si de Bach...). Elle offrira également l’occasion pour Simon Rattle de répondre aux sollicitations de trois chefs qu’il admire et qui devraient chacun laisser des interprétations impérissables dans leurs répertoires de prédilection. Qu’on en juge: Bernard Haitink dans la Neuvième de Mahler, Herbert Blomstedt dans la Troisième de Bruckner et Seiji Ozawa dans L’Enfant et les sortilèges de Ravel!


Bizarrement, Kirill Petrenko, successeur de Sir Simon à la tête des Berliner Philharmoniker à partir de septembre 2019, ne dirige cette saison qu’un seul concert, où figurera notamment la rarissime Quatrième Symphonie de Franz Schmidt, œuvre que Rattle avoua avoir à l’esprit, tout en s’étant fait doubler par son audacieux confrère. On aurait pu penser que cette saison verrait Petrenko s’affirmer davantage en vue de sa prochaine prise de pouvoir mais il n’en est rien: deux styles, deux répertoires, deux façons même de faire de la musique vont donc se succéder de manière quelque peu abrupte.


La saison 2017-2018 connaîtra également les débuts d’Alain Altinoglu et de Dima Slobodeniouk à la tête de la prestigieuse phalange. A un journaliste qui s’étonnait que seulement deux nouveaux chefs se confrontent au Philharmonique au cours de la prochaine saison, Sir Simon Rattle rappela combien cet orchestre était «difficile» et qu’il était essentiel de ne pas précipiter les choses, un premier mauvais contact pouvant s’avérer rédhibitoire. Lui-même avait été approché avant 1987 et, aujourd’hui en tout cas, il ne pouvait que se féliciter d’avoir suffisamment attendu pour le diriger. A un autre qui s’étonnait qu’une seule femme, Susanna Mälkki, dirige les Berliner en 2017-2018, Rattle avoua que le choix des chefs invités était toujours compliqué; pour autant, il ne doutait guère que, vu le nombre croissant de femmes chefs d’orchestre, plusieurs d’entre elles seraient bientôt invitées par l’orchestre, citant par exemple Mirga Grazinytė-Tyla, qui lui a lointainement succédé à la tête de l’Orchestre symphonique de Birmingham.


Quant à Sir Simon Rattle, il dirigera notamment La Création de Haydn (son œuvre préférée avoua-t-il, estimant que s’il ne devait diriger qu’une seule œuvre de tout le répertoire, ce serait celle-là) pour ouvrir la saison et la Sixième Symphonie de Mahler pour la conclure, bouclant ainsi la boucle puisque c’est cette œuvre qu’il dirigea pour la première fois à la tête du Philharmonique de Berlin: on était alors en 1987. Sans être évidemment exhaustif, mentionnons également sous sa baguette Le Paradis et la Péri de Schumann, les Troisième Symphonie de Rachmaninov et de Lutoslawski, la Deuxième «The Age of Anxiety» de Bernstein (avec le pianiste Krystian Zimerman), la Neuvième de Bruckner (avec son quatrième mouvement), les Chants d’Auvergne de Canteloube (avec Magdalena Kozená), l’Ouverture Carnaval de Dvorák (qui va ainsi faire son entrée au répertoire de l’orchestre!), La Petite Renarde rusée de Leos Janácek (dans une mise en scène de Peter Sellars) et une prometteuse version de concert de Parsifal avec, entre autres, Stuart Skelton dans le rôle-titre, Franz-Josef Selig dans celui de Gurnemanz, Nina Stemme dans celui de Kundry et Gerald Finley dans celui d’Amfortas. Bien sûr, un peu de Brahms, de Ravel, de Schubert, de Beethoven, de Chostakovitch, de Bartók, de la musique contemporaine (dans le cadre des Tapas, petites pièces de musique contemporaine commandées par le Philharmonique et destinées à être jouées en prélude à des programmes plus conséquents) et l’occasion d’entendre Rattle au piano dans un très attendu Quatuor pour la fin du temps de Messiaen. Précisons également que la grande salle de la Philharmonie mais aussi la petite Kammermusiksaal accueilleront de multiples concerts de musique de chambre et de jazz, ajoutant à l’éclectisme d’un orchestre-phare qui couvrira plus de trois siècles de musique en cette nouvelle saison.


Si 89 concerts seront donnés à la Philharmonie de Berlin, l’orchestre n’oubliera pas ses résidences habituelles au festival de Pâques de Baden-Baden ainsi qu’à celui de Salzbourg. Outre une tournée en Asie en novembre 2017 (Hong Kong, Canton, Shanghai, Séoul, Tokyo...) et une non moins longue à travers l’Europe en mai-juin 2018 (Londres, Vienne, Amsterdam, Madrid...), mentionnons la venue du Philharmonique à Paris pour deux concerts au début du mois de septembre prochain. Occasion pour signaler qu’il semblerait, si l’on a bien compris la tonalité des propos de Martin Hoffman, que le triptyque Salzbourg-Lucerne-Paris, qui fait le pont entre la fin août et le début septembre, soit désormais de mise, permettant ainsi au public français (parisien en tout cas) d’entendre chaque année à la même période les Berliner Philharmoniker: ô joie! Quant au traditionnel Europakonzert, il sera cette année placé sous la direction de Paavo Järvi, qui dirigera d’ailleurs un autre concert à la tête des Berlinois au mois de mai (Sibelius et Chostakovitch). Dans le cadre de l’entreprise artistique de l’orchestre, signalons enfin que Mark Padmore succèdera à John Adams comme artiste en résidence, se produisent à six occasions différentes (deux concerts symphoniques et quatre de musique de chambre).


Le dévoilement de la nouvelle saison fut également l’occasion de souligner le partenariat sans faille de la Deutsche Bank aux côtés du Philharmonique de Berlin, celle-ci faisant figure de principal mécène de l’orchestre depuis 1989, mais aussi du soutien d’entreprises comme EuroArts ou Unitel grâce auxquelles plusieurs concerts peuvent être filmés et vendus sous forme de DVD ou de Blu-ray. L’importance du Digital Concert Hall, qui met à la portée de tout un chacun aujourd’hui plus de 450 enregistrements filmés (principalement des concerts mais aussi quelques documentaires), a également été saluée, 50 nouvelles représentations devant être filmées au cours de la saison 2017-2018. Les responsables du Philharmonique ont également insisté sur la dimension éducative (tant à l’attention des jeunes publics que des adultes) de l’orchestre qui revêt effectivement des formes multiples comme on en connaît par exemple à Radio France (concerts pour les familles, participation d’amateurs à des répétitions ou des concerts encadrés par des musiciens de l’orchestre, découverte des coulisses de la machine Berliner Philharmoniker...).


Enfin, l’Académie de l’Orchestre philharmonique de Berlin, rebaptisée depuis ce mois de mai «Académie Karajan», continue de prendre chaque année sous son aile une trentaine de jeunes musiciens après une sélection des plus drastiques, ceux-ci pouvant ainsi étudier et se frotter à la musique d’ensemble tout en étant subventionnés, et ayant ensuite vocation à intégrer un orchestre. Bénéficiant de l’aura des Berliner, ces jeunes musiciens ont également l’occasion de donner quelques concerts chaque année: la prochaine saison les verra notamment placés sous la direction de Marc Minkowski, Reinhard Goebel ou Simon Rössler, ce dernier dans une intégrale de l’opéra de Mozart La finta giardiniera qui sera donnée au festival de Pâques de Baden-Baden à la fin du mois de mars 2018.


Visiblement ému de donner là sa seizième et dernière conférence de presse comme directeur musical de l’orchestre, Sir Simon Rattle avoua qu’il était également heureux de pouvoir devenir un auditeur comme un autre à partir de la saison 2018-2019. Répondant par l’affirmative à la question consistant à savoir si Berlin aurait également l’occasion de l’accueillir comme chef invité, Rattle fit une nouvelle fois montre de tout son charisme à travers ses réponses. Il y a fort à parier que le discret Kirill Petrenko devra batailler (y compris peut-être contre lui-même...) pour faire rapidement oublier le flamboyant chef anglais qui, à compter de la rentrée 2018, prendra la tête de l’Orchestre symphonique de Londres.


La nouvelle saison de l’Orchestre philharmonique de Berlin
Le site de l’Orchestre philharmonique de Berlin


Sébastien Gauthier

 

 

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