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01/04/2010
Karl Böhm répète et dirige la Symphonie n° 9 en ut majeur, « La Grande », D. 944 de Franz Schubert

Wiener Symphoniker, Karl Böhm (direction), Henri Colpi (réalisation)
Enregistré à Vienne (mai 1966) – 120’
Unitel Classica – Medici Arts 2072198 – Son PCM Stereo – Format NTSC 4:3 – Region Code 0






Si les témoignages filmés sur certains grands chefs d’orchestre sont légion (notamment sur Herbert von Karajan, Leonard Bernstein et Claudio Abbado), les images de Karl Böhm demeurent relativement rares. C’est bien dommage car nous avons là un des grands représentants de cette tradition allemande de la direction d’orchestre à jamais révolue. Né à Graz en 1894, décédé en 1981, engagé par Bruno Walter comme premier maître de chapelle au Nationaltheater de Munich, Karl Böhm reste un chef légendaire pour ses interprétations miraculeuses dans le domaine de l’opéra (on pense naturellement à Mozart, Wagner ou Richard Strauss dont il crée plusieurs œuvres majeures, qu’il s’agisse de Die schweigsame Frau ou de Daphne) ou de la symphonie (on dispose ainsi de témoignages extraordinaires de symphonies de Bruckner ou, là encore, de poèmes symphoniques de Strauss) à la tête des plus grands orchestres (on soulignera tout particulièrement les liens étroits qu’il a tissés en plus de cinquante ans de carrière avec les Philharmonies de Vienne et de Berlin).


Le présent DVD nous permet de voir Böhm dirigeant l’Orchestre symphonique de Vienne, au mois de mai 1966, dans un studio adapté pour le cinéma (si la notice nous précise que l’enregistrement tant des répétitions que du concert ont eu lieu au Musikverein, aucun indice visuel ne permet de corroborer cette assertion), dans la Grande symphonie de Franz Schubert (1797-1828). Familier du répertoire germanique, Karl Böhm a d’ailleurs gravé une intégrale des Symphonies de Schubert à la tête de l’Orchestre philharmonique de Berlin, restée pendant longtemps au firmament des versions disponibles. A l’écoute, celle-ci a néanmoins considérablement vieilli, souffrant notamment d’un legato excessif, de tempi très retenus et d’effectifs orchestraux pléthoriques, gommant ainsi une grande part de la jeunesse de leur auteur. Pour cette seule raison, le présent DVD est une heureuse surprise!


En effet, bien que puisant ses racines dans la plus pure tradition romantique, Böhm aborde cette symphonie avec légèreté, cherchant notamment à toujours imposer le bon tempo. Ainsi, contrairement à de nombreux chefs, il veille à ne pas aborder trop lentement le superbe Andante con moto, lançant d’ailleurs à l’orchestre qu’il ne faut «surtout pas traîner»! De manière générale, il adopte une vitesse relativement rapide, n’hésitant pas à expliquer aux musiciens pourquoi, au contraire, il tient à ralentir tel ou tel trait, de manière à renforcer la dynamique d’une phrase ou d’un passage en particulier. Ce souci constant est un des multiples exemples de la grande probité intellectuelle dont fait preuve Karl Böhm, s’efforçant toujours de servir au mieux la musique qu’il dirige. Parmi les rares images de Böhm en répétition qui nous soient parvenues, certains se souviennent peut-être de l’invitation qu’il fait en français aux musiciens de l’Orchestre de Paris de bien jouer «les petites notes» du premier mouvement de la Symphonie du Nouveau monde de Dvorák! Ici, dès l’introduction du premier mouvement, il prête une grande attention aux nuances et aux effets, rappelant aux hautbois leurs accents, invitant la clarinette à jouer plus fort, retenant au contraire les éclats des trombones…


Peu sujet aux effusions, Karl Böhm adopte généralement une battue très claire allant de l’imperceptible (sa main gauche regagnant d’ailleurs parfois la poche de son gilet!) à l’emportement total, se jetant alors à corps perdu dans la partition pour inviter l’orchestre à construire avec lui un superbe édifice sonore. La complicité se développant au fil de la répétition, son visage austère s’illumine parfois d’un léger sourire ou sa tête gratifie le musicien d’un simple hochement, signe de l’approbation par le chef de la justesse interprétative d’un soliste ou de l’orchestre dans son entier (à plusieurs reprises, il le gratifie d’ailleurs d’un «sehr gut»). Par ailleurs, fidèle en cela à sa réputation d’autocrate, Böhm n’hésite pas à employer un ton cassant, quelque peu professoral même, soit pour regretter que les trombones interprètent un passage qui «sonne comme un piano aimable» alors qu’ils devraient jouer sforzato, soit pour rappeler aux cordes qu’une répétition avec lui n’est ni le moment ni le lieu pour noter certains coups d’archet… S’il ne dispose peut-être pas d’un magnétisme aussi immédiat que certains de ses collègues (Karajan ou Furtwängler pour ne prendre que deux exemples issus de la même tradition), Böhm bénéficie néanmoins d’une autorité tout à fait équivalente: ainsi, il suffit qu’il donne une brève indication aux clarinettes ou aux hautbois pour que, dès la reprise d’un thème précis, ceux-ci jouent exactement comme il le souhaite.


La seconde partie du DVD est consacrée à un concert qui, en réalité n’en est pas un, puisque Böhm dirige l’Orchestre symphonique de Vienne dans la Grande symphonie de Schubert dans le même studio que précédemment, sans la présence du public. Comme on pouvait s’y attendre au regard du travail effectué en répétition, l’orchestre se montre particulièrement réactif, ne manquant aucun détail et donnant ainsi lieu à une superbe interprétation. On ne peut donc que souhaiter l’exhumation de nouveaux documents filmés sur Karl Böhm tant il est instructif de voir comment travaillait un véritable monstre sacré de la direction d’orchestre.


Sébastien Gauthier

 

 

 

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