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11/03/2023
« La Harpe Reine. Music at the court of Marie‑Antoinette »
Jean-Baptiste Krumpholtz : Concerto pour harpe n° 5 en si bémol majeur, opus 7
Joseph Haydn : Symphonie n° 85 « La Reine » en si bémol majeur, Hob. I:85
Johann David Hermann : Concerto pour harpe n° 1 en fa majeur, opus 9
Christoph Willibald Gluck : Orphée et Eurydice : « Danse des esprits bienheureux » (transcription de Maistre)

Xavier de Maistre (harpe), Les Arts Florissants, William Christie (direction)
Enregistré en public à l’Opéra royal du château de Versailles (27‑28 juin 2016) – 70’09
Harmonia Mundi HAF 8932276 – Notice (en français, anglais et allemand) de Xavier de Maistre et Sylvain Blassel




Joseph Haydn : Symphonies n° 84 en mi bémol majeur, Hob. I:84 [1], n° 85 « La Reine » en si bémol majeur, Hob. I:85 [2], n° 86 en ré majeur, Hob. I:86 [3], et n° 87 en la majeur, Hob. I:87 [4] – Concerto pour violon n° 1 en do majeur, Hob. VIIa:1 [5]
Les Arts Florissants, William Christie (direction) [1‑4], Théotime Langlois de Swarte (violon et direction) [5]
Enregistré en public à la Cité de la musique, Paris (octobre 2020 [1, 4] et mars 2022 [2, 3, 5]) – 126’26
Album de deux disques Harmonia Mundi HAF 8905371.72 – Notice de Denis Herlin et entretien de Denis Herlin avec William Christie et Théotime Langlois de Swarte (en français, anglais et allemand)


Sélectionné par la rédaction





Lorsqu’on pense à William Christie, on pense évidemment à la musique baroque, plus particulièrement la musique baroque française (Lully, Desmarets, Campra...). On aurait bien évidemment tort de réduire le chef franco-américain à cela, William Christie ayant également exploré le répertoire classique à de nombreuses reprises, tant au concert qu’au disque. En voici deux exemples, l’un fruit d’une opportune réédition, l’autre reflet de récents concerts donnés à la Cité de la musique avec, comme compositeur phare, Joseph Haydn (1732‑1809) dont Christie et Les Arts Florissants nous ont notamment donné une mémorable Création et, il y a peu, de non moins somptueuses Saisons.


Le premier disque, paru en novembre 2016 et réédité donc récemment, nous fait entendre un très beau concert donné sous les ors de l’Opéra royal du château de Versailles. Le programme se voulait un hommage au goût de la reine Marie‑Antoinette pour la musique dont le musicologue Patrick Barbier nous a montré, il y a peu, combien il était à la fois authentique et diversifié. Il était donc normal qu’il mît en valeur la harpe, dont on sait que la Reine fut une adepte, avec pour commencer ce concerto de Jean‑Baptiste Krumpholtz (1743‑1790), compositeur d’origine pragoise, qui fut par ailleurs élève de Haydn et harpiste à la cour du prince Esterhazy avant qu’il ne vienne faire carrière à Paris. Ce concerto frappe par l’élan mélodique des mouvements rapides (surtout l’Allegro moderato initial à notre sens) et la douce rêverie qui émane du mouvement lent central. Xavier de Maistre en est un interprète de choix grâce à une technique sans faille et une apparente simplicité dans le jeu, qui convient parfaitement à l’esprit de cette musique qui n’a pas grand-chose à voir avec l’image simpliste d’un quelconque salon duveteux propre à ce XVIIIe siècle si élégant. Quand bien même la recherche ne serait pas le fil conducteur de ce concerto, on l’écoutera avec plaisir, notamment le Rondo conclusif aux légers accents rustiques qui dynamise un peu un concerto tout de même assez convenu.


Difficile pour ce programme de ne pas comporter la Quatre-vingt-cinquième Symphonie de Haydn, dite « La Reine » puisque, paraît‑il, elle aurait eu les faveurs de Marie‑Antoinette lors de sa création, l’éditeur Imbault lui ayant alors accolé le surnom désormais célèbre à partir de l’édition de l’œuvre en Quatre-vingt-cinquième 1788. La direction volontariste et sans fioriture de William Christie fait merveille dès le premier mouvement, où le discours est sans cesse relancé tout en étant renouvelé, les accents des cordes (alors sous la houlette de la regrettée Florence Malgoire) alternant avec les interventions solistes des bois dans une grande finesse générale. La « Romance » joue à la fois sur la simplicité du motif tiré de la chanson populaire La gentille et jeune Lisette et sur la richesse d’une composition où la surprise est le maître‑mot. Les deux autres mouvements (typiques des Parisiennes avec un Menuet et un Presto en troisième et quatrième positions) concluent avec réussite une interprétation pleine de fraîcheur.


Doté de seulement deux mouvements, le Premier Concerto pour harpe de Johann David Hermann (ca. 1760‑1846), pourtant pianiste de formation, frappe par son « écriture... pianistique » comme le souligne très justement Sylvain Blassel dans la notice d’accompagnement. Le jeu de Xavier de Maistre convient à ravir à ce concerto dont on devine sans peine les exigences techniques requises du soliste, la harpe intervenant généralement seule, sans véritable dialogue avec l’orchestre même si elle sert en plus d’une occasion d’écrin pour l’intervention des vents (hautbois et basson). En conclusion de ce disque, une transcription faite par Xavier de Maistre lui‑même de la célèbre « Danse des esprits bienheureux » tirée d’Orphée et Eurydice de Gluck, compositeur si cher à Marie‑Antoinette ; nouvelle preuve des talents du soliste, qui couronne un disque des plus recommandables.


L’album suivant comprend également la Quatre-vingt-cinquième Symphonie et à juste titre puisqu’il s’agit du premier volume d’une intégrale des symphonies dites Parisiennes, ensemble de six symphonies commandées en 1784 à Haydn par les directeurs du Concert de la Loge Olympique. Composées dans les années 1785‑1786, ces œuvres ont été captées sur le vif à la Cité de la musique (applaudissements compris), les deux autres concerts, au cours desquels furent interprétées les Quatre-vingt-deuxième et Quatre-vingt-troisième Symphonies ainsi que la Quatre-vingt-quatrième, respectivement en mai 2019 et octobre 2020, ayant fait l’objet de comptes rendus dans nos colonnes. L’urgence et la spontanéité du concert s’entendent immédiatement. Le jeu des Arts Florissants est d’une très grande finesse, notamment dans les Menuets, marqués également par une élégance évidente : soulignons à cet égard le formidable bassoniste Claude Wassmer dans sa cadence au sein du Menuet de la Symphonie « La Reine » ou de Pier Luigi Fabretti au hautbois dans celui de la Quatre-vingt-septième. Les accents grotesques (dans le bon sens du terme) ne sont pas absents (le Menuet de la Quatre-vingt-quatrième) mais faits avec une subtilité qui rend parfaitement hommage à la verve haydnienne. Dans les mouvements rapides, l’orchestre est d’une vivacité jubilatoire dont la richesse des timbres (le jeu sur instruments d’époque avec des cors naturels ou la flûte enjôleuse de Charles Zebley dans la « Romance » de la Quatre-vingt-cinquième), le luxe de détails (une appogiature par‑ci, un trait soliste par‑là) et l’entrain général sont les maîtres‑mots. En dépit de quelque acidité lorsque les violons jouent dans l’aigu ou de quelques glissandi pas toujours du meilleur effet (notamment dans le deuxième mouvement de la Quatre-vingt-cinquième), les cordes sont chatoyantes et frappent tant par leur fluidité (le Vivace de la même symphonie) que par leur caractère alerte que la raideur qui transparaît de temps à autre dans la direction de William Christie n’entame en rien.


On l’a déjà écrit à propos des disques de Giuliano Carmignola ou de Zsolt Kalló mais il est dommage que les concertos pour violon de Haydn, ne soient pas davantage joués tant ils incarnent ce classicisme viennois de bon aloi, ces œuvres n’ayant pas à rougir face aux cinq concertos de Mozart. Avec Théotime Langlois de Swarte, qui dirige par la même occasion
Les Arts Flo de l’archet, voici qu’est pleinement rendu justice au Premier Concerto. La forme habituelle en trois mouvements laisse libre cours à une interprétation du soliste là encore tout en finesse, où l’on admire la parfaite justesse dans les aigus et la vivacité d’ensemble, les cadences offrant au violon de beaux moments de démonstration. On remarquera surtout un deuxième mouvement (Adagio) d’une rêverie communicative dans laquelle se love un orchestre aux sonorités chatoyantes ; une pleine réussite donc, qui nous fait attendre avec impatience les disques à venir et, qui sait, de futures Londoniennes par les mêmes interprètes ?


Le site de Xavier de Maistre
Le site de Théotime Langlois de Swarte
Le site des Arts Florissants


Sébastien Gauthier

 

 

 

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