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08/14/2023
Jean-Baptiste Lully : Psyché
Ambroisine Bré (Psyché, Femme affligée), Bénédicte Tauran (Vénus, Muse), Deborah Cachet (Amour, Aglaure, Nymphe), Eugénie Lefebvre (Flore, Cidippe, Nymphe, Muse), Cyril Auvity (Vertumne, Amour jeune homme, Mercure), Robert Getchell (Vulcain, Homme affligé, Furie), Fabien Hyon (Palémon, Silène, Zéphire, Furie, Bacchus), Zachary Wilder (Apollon, Zéphire, Satyre), Philippe Estèphe (Jupiter, Homme affligé, Satyre), Anas Séguin (Lycas, Le Roi, Momus, Le fleuve, Furie), Matthieu Heim (Mars), Les Talens Lyriques, Christophe Rousset (direction)
Enregistré à l’Opéra royal de Versailles (29‑31 janvier 2022) – 144’49
Album de deux disques Château de Versailles Spectacles CVS 086 (collection « Opéra français » n° 16) – Notice bilingue (français, anglais et allemand) de Pascal Denécheau et Laurent Brunner





Christophe Rousset poursuit ses enregistrements des tragédies lyriques et opéras divers de Jean‑Baptiste Lully après notamment de superbes réalisations ; citons notamment Isis, Alceste, Amadis, Armide ou, dernièrement, Acis et Galatée.


Voici venu le tour de Psyché, tragédie lyrique en un prologue et cinq actes (1678) sur un livret de Thomas Corneille (frère cadet de qui vous savez...) et non du fidèle Quinault, écarté après que Madame de Montespan eut exigé (et obtenu) de Louis XIV que celui‑ci n’écrive plus pour Lully, la favorite n’ayant guère apprécié le livret d’Isis dans lequel elle estimait être moquée au travers du personnage de Junon : elle lui ressemblait quelque peu depuis sa disgrâce passagère après que le Roi eut jeté son dévolu sur la jeune et séduisante Mademoiselle de Ludres. Fondé sur une première pièce écrite cette fois‑ci par Molière et Quinault en 1671, Psyché raconte la lutte entre Psyché, condamnée à s’offrir en sacrifice à un serpent terrorisant son pays envoyé là par Vénus, jalouse par le seul fait qu’on ait osé comparer leur beauté respective. Or, Amour s’est épris de Psyché et les deux tombent amoureux l’un de l’autre, sous réserve que Psyché ne connaisse jamais le véritable nom de celui dont elle s’est éprise. Par un nouveau stratagème, Vénus la fait tomber dans le piège, Psyché manquant de se suicider. Heureusement, tout est bien qui finit bien – comme quoi cette œuvre n’a de tragédie que le nom – puisque Jupiter met fin aux tourments de la jeune femme, Vénus devant s’incliner devant la volonté paternelle et Psyché, devenue immortelle, peut vivre ouvertement sa relation avec Amour.


A la scène, l’œuvre avait été en quelque sorte recréée au Festival d’Aix‑en‑Provence de 1987 sous la direction de Jean‑Claude Malgoire mais les critiques de l’époque avaient semble‑t‑il trouvé cette résurrection quelque peu laborieuse. Au disque, Psyché n’a guère connu davantage de succès, peut‑être en raison du faible nombre d’airs de bravoure, la tragédie lyrique souffrant au surplus d’un certain déséquilibre (un troisième acte de moins de vingt minutes, un quatrième d’un quart d’heure à peine). On dispose néanmoins d’une excellente version codirigée, comme toujours, par Paul O’Dette et Stephen Stubbs, enregistrée fin juillet 2007 et parue chez CPO en 2008 avec Karina Gauvin dans le rôle de Vénus et Carolyn Sampson dans celui de Psyché. La présente version, enregistrée en concert à l’Opéra royal de Versailles, détrône à notre sens la version précédente qui ne manquait pourtant pas d’atouts, notamment côté voix.


Mais ici, c’est justement peut‑être avant tout l’orchestre qui nous marque. Lully use d’un orchestre étoffé aux cordes tour à tour bondissantes ou voluptueuses, aux flûtes des plus charmeuses (la fameuse « plainte italienne » à la scène 2 de l’acte I, les scènes 4 et 5 de l’acte II) et à une cohésion qui rappelle de temps à autre le brillant de l’orchestre louis‑quatorzien (dans la dernière scène de l’acte V, lorsque trompette et timbales sont requises). Christophe Rousset, qui connaît son Lully comme sa poche, dirige l’ensemble avec une attention portée à tous les détails d’une partition dont la finesse épouse, suivant les scènes, la colère de Vénus, la tragédie ressentie par le Roi et la sensibilité à fleur de peau de Psyché. L’introduction orchestrale de l’air pour les dryades (scène 3 du Prologue), où s’illustrent flûte à bec, basson et tambourin, ou l’accompagnement de l’air des furies à la scène 3 de l’acte IV ne sont que deux exemples parmi d’autres illustrant à merveille cette délicatesse orchestrale. Soulignons enfin le soin dans l’accompagnement des récitatifs (la scène 5 de l’acte II), qui reste par ailleurs une des forces de l’enregistrement CPO.


Dans le rôle de Psyché, Ambroisine Bré est idéale. Diction parfaite (ce n’est pas toujours le cas pour les chanteurs de ce répertoire, quand bien même ils seraient français), caractère d’écorchée vive (la première scène de l’acte IV), émotion incroyable dans certains airs où l’on sent toutes les fêlures du personnage (première scène de l’acte V), la jeune chanteuse s’illustre à chacune de ses interventions qui culminent dans la « plainte italienne » du premier acte où elle campe une femme affligée de toute beauté. Réussite incontestable également du côté de Bénédicte Tauran même si certains airs auraient sans doute pu être plus caractérisés (le très beau duo avec Vulcain à la scène 3 de l’acte II) ; sa prestation au dernier acte est à souligner, la chanteuse parvenant à nous émouvoir lorsque Vénus doit s’avouer vaincue face à la volonté jupitérienne alors que le personnage est bien évidemment des plus antipathiques. Dans le rôle de l’Amour, Deborah Cachet s’avère des plus sensibles mais n’oublions pas non plus ses interventions lorsqu’elle incarne Aglaure, tout aussi remarquables. Dans l’ensemble, les chanteurs sont excellents même si certains se voient cantonnés à des petits rôles. Pour autant, chacun veille à incarner son personnage au mieux, qu’il s’agisse du superbe duo entre Vertumne et Palémon (respectivement Cyril Auvity et Fabien Hyon) dans le Prologue ou du duo des Zéphires (Fabien Hyon de nouveau et Zachary Wilder à la scène 5 de l’acte II).


On l’aura compris, en dépit de quelques longueurs de l’ouvrage, voici une version de Psyché qui s’impose à l’évidence et, pour les amateurs, qui saura utilement compléter la version O’Dette -Stubbs (à notre sens, Karina Gauvin y campe une Vénus encore plus aigrie et manipulatrice qu’ici) plus qu’elle ne la détrônera véritablement.


Le site des Talens Lyriques et de Christophe Rousset
Le site d’Ambroisine Bré
Le site de Deborah Cachet
Le site d’Eugénie Lefèbvre
Le site de Robert Getchell
Le site de Fabien Hyon
Le site de Zachary Wilder
Le site de Philippe Estèphe
Le site de Matthieu Heim


Sébastien Gauthier

 

 

 

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