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04/21/2023
« Impressions d’enfance »
George Enescu : Impromptu concertant pour violon et piano – Impressions d’enfance, opus 28
Claude Debussy : Sonate n° 3 pour violon et piano en sol mineur, L. 140
Eugène Ysaÿe : Rêve d’enfant, opus 14
Maurice Ravel : Sonate pour violon et piano n° 2 en sol majeur, M. 77
Nino Rota : Improvviso

Sarah Nemtanu (violon), Romain Descharmes (piano)
Enregistré au Studio Long Distance, Montreuil (février 2021) – 68’48
Alpha 834 (distribué par Outhere) – Notice (en français et en anglais) de Nicolas Derny, avec un avant‑propos de Sarah Nemtanu


Sélectionné par la rédaction





Rêves d’enfant, enfance de rêve, Sarah Nemtanu et Romain Descharmes proposent un programme bien bâti, principalement roumain et français, qui chante les impressions d’enfance de Georges Enesco (1881‑1955) et d’Eugène Ysaÿe (1858‑1931) et qui se complète par les sonates de Claude Debussy (1862‑1918) et Maurice Ravel (1875‑1937), qui ont marqué la jeunesse des deux exécutants. Ils terminent sur une vive et souriante pirouette : l’Improvviso (1969) de Nino Rota (1911‑1979). L’interprétation insuffle à l’ensemble les allures captivantes d’un voyage qui ne peut prendre fin.


Les Impressions d’enfance (1940) d’Enesco en deviennent le pivot. Malgré une saveur roumaine certaine, les dix miniatures enchaînées retracent des visions poétiques de l’enfance du compositeur sans jamais faire un appel direct à la musique populaire. C’est une construction musicale recherchée et inventive qui exige des exécutants non seulement des prouesses techniques mais aussi une sensibilité musicale engagée capable de prêter vie à ces instants fugitifs. Nemtanu et Descharmes en restituent toute la présence, calme, tumultueuse ou, comme le « Vieux mendiant », profondément touchante, leurs parties complémentaires, sans soumission l’une à l’autre.


« Ménétrier » lance la partition au violon seul. Nemtanu subjugue. C’est un tour de force compositionnel aux allures d’improvisation plus fortes encore que celles des évocations d’oiseau et de grillon qui viennent plus tard. Si le duo offre une « Chanson pour bercer » toute douce et lumineuse comme il se doit, « Tempête au dehors dans la nuit » déferle dans un registre grave d’un noir théâtral, le piano peut‑être trop lourdement tonitruant. Sous les doigts des deux musiciens, « Lever de soleil », qui termine l’œuvre, ouvre les vastes horizons d’un avenir incertain mais prometteur.


Le Rêve d’enfant (1901) d’Ysaÿe propose une seconde référence directe à l’enfance, brève mais expressive comme chacune des dix images frappantes d’Enesco. La composition, plus classique, suggère par sa fluctuation la nostalgie d’un bercement, le piano soutenant avec grâce la respiration et le beau son du violon mélodique et aérien de Sarah Nemtanu.


Ces deux mondes relevant de l’enfance séparent l’une de l’autre les sonates célébrissimes, si belles, de Debussy et de Ravel. Les deux musiciens révèlent toute la noblesse, la grâce et la subtilité de la troisième Sonate (1917) de Debussy. Ils réalisent sans heurt les tournoiements, les crescendos et decrescendos intenses de l’Allegro vivo, confèrent à l’Intermède une légèreté fantasque non dénuée d’une touchante gravité et livrent un Finale virevoltant et extatique entrecoupé du mystère satiné d’un intermède plus réflectif, avant l’étourdissante conclusion.


La Sonate (1922‑1927) de Ravel respire sous les doigts des interprètes, qui laissent chanter le charme et les caprices de l’Allegretto. Grâce à une bonne mise en place et au piano habile de Descharmes, ils rythment fort à propos le Blues ce qui est un exploit en soi tant le syncopé de certaines versions peut paraître malaisé. Les références à d’autres instruments que les leurs en deviennent un atout. Le Perpetuum mobile bénéficie des arpèges, des notes répétées et de la mobilité éblouissante de la violoniste, bien mis en valeur par les rythmes fascinants encore réussis et les épanouissements en cascade du merveilleux piano nerveux de Romain Descharmes.


D’Enesco encore, l’énergique Impromptu concertant de 1903 ouvre le programme. L’Improvviso de Rota vient comme un répons énergique en clôture. L’écriture de l’Impromptu, du jeune âge du compositeur, peut étonner par son équilibre fécond, bien assis, brillant et fluide. Le grand souffle romantique de la partition se déploie à l’aise grâce à l’interprétation adroite et ressentie des deux Français, le piano tout en soutien du violon au travers du caractère inventif de sa partie. Rota travaillait sur le flot halluciné du Satyricon de Fellini quand il a composé son Improvviso, percutante fantaisie explosive, mobile, colorée et aux sourires diaboliques strictement pour des virtuoses du calibre de Nemtanu et Descharmes.


Sarah Nemtanu et Romain Descharmes se produisent en duo pratiquement depuis leurs débuts professionnels. L’expérience de ces deux musiciens ajoutée à leur complicité fertile explique sans aucun doute ici la profondeur et le charme aisé de leur prestation.


La page de Sarah Nemtanu sur le site du Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris
Le site de Romain Descharmes


Christine Labroche

 

 

 

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