About us / Contact

The Classical Music Network

CD

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

12/04/2022
« Il n’y a pas d’amour heureux »
Giovanni Girolamo Kapsberger : Rosa bianca
Gregorio Strozzi : Balletto primo
Luigi Rossi : Begl’occhi che dite ? – Lamento di Zaida Turca – Passacaille del Signor Louigi – Dopo lungo penare
Alessandro Piccinini : Toccata V – Corrente IIII – Chiaccona in partite variate
Tarquino Merula : El me tira – Quand’io volsi l’altra sera
Mario Savioni : Fermate, occhi, fermate
Cipriano de Rore : Ancor che col partire (diminutions de Riccardo Rognoni)
Giovanni Salvatore : Corrente I – Corrente II
Gregorio Strozzi : Mascara sonata e balata da più Cavalieri Napolitani del Regio Palazzo
Angelo Michele Bartolotti : Prélude
Bellerofonte Castaldi : Sonata Prima
Claudio Monteverdi : Lamento d’Arianna
Georges Brassens : Il n’y a pas d’amour heureux

La Palatine : Marie Théoleyre (soprano), Noémie Lenhof (viole de gambe), Nicolas Wattinne (théorbe, guitare baroque), Guillaume Haldenwang (clavecin, orgue) – Laurent Sauron (percussions)
Enregistré à l’Espace culturel Claude‑Joseph Bonnet de Jujurieux (15‑18 avril 2022) – 59’41
Ambronay Editions AMY316 – Livret de 33 pages (en français et en anglais)





La Palatine est un ensemble assez jeune, crée en 2019, qui a déjà remporté de nombreux prix et est soutenu par le Centre de musique baroque de Versailles. Ce disque est une rencontre entre Aragon/Brassens et la poésie amoureuse (amours trahies) du XVIIe siècle.


Le livret présente et explique une partie des choix de cet ensemble. L’originalité tient dans cette rencontre entre la poésie d’Aragon Il n’y a pas d’amour heureux et les principales héroïnes tragiques des mythologies gréco‑latines présentes chez les compositeurs baroques italiens incontournables du XVIIe italien. Outre de grands airs que l’on ne se lasse pas d’entendre, la comparaison avec Aragon est presque un prétexte à faire un titre accrocheur et une introduction et une fin rendant hommage au poète et à Georges Brassens. Cet album relève presque du classicisme des choix des airs et des compositeurs. Savioni a l’avantage de ne pas figurer dans les enregistrements de ces dix dernières années chez d’autres que Les Arts Florissants.


La qualité du son, qui est indiscutable, met en exergue un manque de consonnes dans l’exécution des textes de la chanteuse. Certains choix d’enchaînements de plages, qui n’amènent pas assez de rythme et qui ne font que poser des tragédies les unes après les autres, sont à déplorer. La qualité technique des interprètes est grande mais le résultat tient plus des individualités mises ensemble que de la coopération au service de la musique qu’ils donnent. Rosa bianca en est un exemple. Le talent des accompagnateurs se fait dans l’exposition technique de leur partie en oubliant quelque peu l’expression du texte et d’en accompagner parfois le sens et non pas de remplir le vide harmonique qu’il y aurait entre la hauteur de la voix chantée et leurs parties...


Quelques latences dans les enchaînements, un caractère un peu excessif dans l’exposition de la douleur des personnages féminins pourraient démontrer quelques superficialités dans l’approche et dans la représentation symbolique de ce que sont ces femmes dans la mythologie d’abord, puis dans la traduction qu’en ont fait la Renaissance, puis le baroque prenant forme dans la première partie du XVIIe siècle et de la traduction des idées et affects liés à ces figures de fantaisies qui sont bien loin de l’image de leurs cultures initiales.


Ainsi Arianna hurle un peu trop ou s’adonne à la tiédeur de l’expression de l’abandon par son lâche Thésée, Zaïda Turca a la douleur superlative dans l’aigu et molle et désincarnée dans le medium et le grave de la tessiture. Les accompagnements sont dans l’habitude d’exécution. El me tira a la diction un peu molle par un manque de consonnes de la chanteuse qu’essaye de compenser un guitariste aux appuis très forts et trop marqués. Fermate, occhi, fermate manque quant à lui d’ancrage dans le temps, tout passe un peu vite, la lamentation et l’emphase que le texte demanderait sont oubliées par endroits quand le texte est un peu récité. Dopo lungo penare montre deux énergies et élans différents entre instruments et voix. Le jeu avec les registres de la voix, le rythme, la fabrication du personnage, tombent à l’eau, à cause d’arrêts hésitants et pas franchement assumés comme étant rhétoriquement et intrinsèquement partie du texte. Le texte manque de vérité dans son accent italien, la succession des « zitto » est très française dans la diction et fait perdre en tonicité un texte à la fois coquin et revanchard. On peut noter malgré tout, une remarquable interprétation de la chanson de Brassens/Aragon, aussi émouvante et touchante que l’originale.


Le tout, un peu décousu, donne l’impression que peu d’entre eux sont en phase avec ce qu’ils disent, jouent, ou juste ce qu’ils construisent. Les héroïnes ne sortent pas d’un livre de madrigaux, ou d’un opéra dont le sujet est fraîchement inventé. L’histoire qui est racontée fait plus que partie intégrante d’une culture ancrée dans l’éducation rhétorique, littéraire, dramatique, poétique et stéréotypée du compositeur choisi.


Ce disque est un exemple parmi d’autres d’enregistrements de bonne qualité. Les interprètes sont intéressants et ne pourront que se bonifier avec une plus grande connaissance de l’Antiquité de la Renaissance. Un ensemble à découvrir malgré ces écueils de jeunesse et de premiers enregistrements.


Le site de La Palatine


Apolline Croche

 

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com