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05/23/2021
«La famille Rameau»
Jean-Philippe Rameau : Pièces de clavecin (1724): «Les tendres plaintes», «Les Cyclopes», Allemande en mi & «Le rappel des oiseaux» – Pièces de clavecin en concerts: «La Rameau» (transcription Taylor) – Nouvelles suites de pièces de clavecin: «La Poule», «Les Triolets», «L’Egyptienne», Sarabande en la & Gavotte et doubles – Premier livre de pièces de clavecin: Allemande en la & Courante en la
Claude Rameau : Menuet barosais
Jean-François Tapray : Les Sauvages (thème et variations)
Claude-François Rameau : La Forcray
Lazare Rameau : Sonate n° 1: Rondo Grazioso
Claude Debussy: Images (Première Série): 2. «Hommage à Rameau» (*)

Justin Taylor (clavecin, piano)
Enregistré au Château d’Assas et à la Cité de la musique (*) (novembre 2020) – 78’41
Alpha 721 (distribué par Outhere) – Notice (en français, anglais et allemand) de Justin Taylor


Sélectionné par la rédaction





Dans la famille Rameau, je demande... Bien évidemment, Jean-Philippe (1683-1764), le plus connu, l’auteur d’ouvrages célèbres en son temps et qui ont depuis longtemps conquis la planète musicale. Mais ce n’est pas le seul (quoique sans nul doute le plus talentueux) musicien de la famille: tant s’en faut! Si l’on se réfère à l’indispensable Rameau de A à Z sous la direction de Philippe Beaussant (Fayard - IMDA, mai 1983, not. p. 284 s.), il faut également compter avec Catherine (sœur de Jean-Philippe, qui fut claveciniste), Claude (le jeune frère de Jean-Philippe, qui fut longtemps organiste à Dijon), Claude-François (fils aîné de notre héros, musicien honnête à qui fut confiée l’entière propriété de la musique éditée ou inédite de son père), Jean (le père de Jean-Philippe, qui était également organiste à Dijon), Jean-François (fils de Claude, passé à la postérité comme ayant été le fameux Neveu de Rameau de Diderot, excellent claveciniste, «né musicien autant que son oncle» aux dires de Jacques Cazotte) et enfin Lazare (autre neveu de Jean-Philippe, qui fut organiste dans plusieurs villes du Royaume).


Après l’exploration de la généalogie Forqueray, c’est donc le tour de la famille Rameau pour cet hommage de Justin Taylor à travers ce disque haut en couleurs. Usant du clavecin du château d’Assas (dans le département de l’Hérault), attribué au facteur lyonnais Donzelague dans le premier tiers du XVIIIe siècle, il impose d’emblée une remarquable palette de couleurs et un sens inné de l’interprétation. Ecoutons immédiatement la célèbre «Poule» qui, ici, dérange plus qu’elle ne dépeint le volatile bien connu: les hésitations rythmiques et les attaques (parfois volontairement violentes) illustrent tout ce que peut être une véritable interprétation mais qui jamais ne singe, ni ne brutalise. Si l’on reste chez Jean-Philippe (à tout seigneur, tout honneur), on bénéficiera ici de toute la diversité dont savait faire preuve le génial compositeur: de la formidable «Gavotte et doubles», où l’ampleur de la mélodie bénéficie à la fois de basses profondes dans la première partie et d’une accélération qui, dans le dernier tiers de la pièce, vous entraîne irrémédiablement, aux deux Allemandes (mention spéciale à la magnifique Allemande en mi, où la mélodie nous entraîne tour à tour dans une douce sérénité ou dans une infinie tristesse) en passant par les célèbres «Tendres plaintes» au climat rêveur (la dernière note en suspension...) ou «L’Egyptienne», dont le caractère obsédant réside là encore davantage dans le rythme que dans la mélodie. Justin Taylor fait magnifiquement sonner ce clavecin qu’utilisa en son temps Scott Ross pour maints enregistrements (Couperin, Scarlatti ou, déjà, Rameau), dont les aigus sonnent très finement sans jamais être trop cristallins ou métalliques, les graves bénéficiant pour leur compte d’une étonnante rondeur qui offre ainsi un jeu de résonnances des plus subtils. La prise de son, remarquable, permet au soliste et à son instrument de prendre tout leur temps, les dernières notes bénéficiant toujours d’un léger halo qui laisse l’auditeur reprendre ainsi ses esprits (à l’exception néanmoins du Menuet barosais de Claude Rameau, coupé de façon étonnamment abrupte).


Venons-en justement aux autres membres de la famille. Si la pièce de Claude n’appelle guère de commentaire (moins d’une minute...), on écoutera avec plus d’intérêt le «Rondo Grazioso» de Lazare, au style très classique, presque mozartien dans ses sonorités, et surtout la très convaincante Forcray de Claude-François (en hommage aux Forqueray), pièce à la fois enjouée et volontaire où les deux mains de Justin Taylor effectuent un exercice d’aller-retour tout à fait remarquable.


En complément des membres de la famille Rameau, Justin Taylor a choisi ce thème et variations de Jean-François Tapray (1738-1819) sur le célèbre thème des «Sauvages» que Jean-Philippe Rameau utilisa notamment dans ses Indes galantes. L’ensemble, sans dévoiler un génie de la composition, n’en est pas moins agréable à l’oreille, le soliste s’amusant visiblement à varier volume, vitesse, doigté et ambiance au sein de cette pièce assez conséquente. Enfin, pour conclure, l’«Hommage à Rameau», tiré de la Première Série des Images de Debussy: troquant pour l’occasion son clavecin pour un superbe piano de la Maison Erard, datant de 1891 et conservé au Musée de la musique, Justin Taylor se montre tout aussi à son aise, abordant la partition avec délicatesse et retenue, l’équilibre entre main droite et main gauche étant idéal pour traduire cet hommage d’un maître français de la musique à l’un de ses tout aussi illustres prédécesseurs.


Bien que ce ne soit pas une découverte pour qui le suit depuis quelques années, Justin Taylor démontre une fois encore, avec ce disque, toute l’étendue de ses talents. Regrettons peut-être que la «famille Rameau» ne soit finalement pas davantage représentée (d’autres pièces de Jean-François ou Claude auraient été préférables, à notre sens, à celles de Tapray et Debussy, le disque traitant au fond plus des compositeurs autour de Jean-Philippe Rameau que de sa famille très précisément) dans cette parution qui, par son originalité et l’excellence de son interprétation, n’en demeure pas moins des plus recommandables.


Le site de Justin Taylor


Sébastien Gauthier

 

 

 

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